Election présidentielle du 21 juin : Biram conduit Messaoud à la retraite

Election présidentielle du 21 juin : Biram conduit Messaoud à la retraiteDeux combattants issus de la frange des harratins. Deux stratégies de lutte déférentes. Deux générations différentes. Deux discours différents, mais qui luttent pour une seule cause : la lutte contre l’esclavage et pour les droits des leurs. Acteur charismatique de la scène publique,Messaoud pourrait bien pâtir du score obtenu par Biram Dah Abeid au scrutin du 21juin.

Biram Ould Abeid a conquis une place d’importance sur la scène nationale. ExitMessaoud Ould Boulkheïr, le leader charismatique de la cause haratine. L’ancien président de l’assemblée et président de la formation politique l’APP, devrait à terme souffrir du score plus qu’honorable obtenu par son cadet Biram à la dernière présidentielle.

D’abord parce qu’il a été désavoué, lui qui a appelé ses militants voire les siens, à boycotter lesdits scrutins, ensuite parce que le score de près de 10% des suffrages obtenus par Biram consacre celui-ci comme leader de sa communauté. Entre les deux hommes, rien ne va. Si on perçoit un certain respect de Biram à l’endroit de son ainé, le contraire n’est pas forcément évident.

Et les sujets de contradictions sont nombreux : alors que Biram continue de faire de la lutte contre l’esclavage son principal cheval de bataille, Messaoud pense dure comme fer, que ce sujet est désuet. Alors que Biram demande de combattre les esclavagistes allant jusqu’à mettre à l’index, les Beidanes, et le système en place.

Alors que Biram rejette toute option de coopération avec le pouvoir, Messaoud lui s’aligne à ce pouvoir et y occupe même des postes de responsabilité. Des attitudes qui vaudront à l’ancien président de l’assemblée une popularité grandissante notamment au sein des siens. Lesquels verront leurs causes mieux défendues par Biram imbu d’un nouveau discours pour la déconstruction du système, une stratégie de lutte basée sur le terrain et qui affronte le système.

Si le style Biram a porté ses fruits, c’est surtout parce qu’il est différent de celui jusque –là adopté par les leaders politiques et les défenseurs des droits de l’homme : leader de l’IRA engage des initiatives courageuses sur le terrain loin des déclarations rédigées d’ONG ou partis politiques.

Séduite, la jeunesse le suit notamment celle de la communauté harratine, mais aussi les negro-mauritaniens victimes pendant des décennies de ce système. Le combat de l’ancien de greffier de Nouadhibou a vite commencé à porter ses fruits autour de sa personne et de son mouvement. Le contexte socio-économique national le favorisera : Mohamed Ould Abdel Aziz fabriquera son détracteur sans même le savoir.

D’abord en l’emprisonnant et en utilisant une répression brutale et barbare contre les militants de l’IRA. Ensuite en le recevant au Palais présidentiel. Avec son score et sa place de deuxième à la Présidentielle, Biram a réussi un coup de maître. Reste maintenant à savoir comment ses aînés, membres de sa communauté accuseront le coup.

Très fiers d’eux, ils ne devraient pas accepter facilement d’être coiffés au poteau après qu’ils aient enduré des années durant, dans la diète et le sacrifice. Et parmi ceux-ci, Messaoud. L’homme qui est certes terrassé par l’âge voit certainement mal l’ascension de Biram sans que lui-même n’ait participé et sans que jamais, il ne lui soit fait référence. A-t-il alors les moyens de reprendre sa place de leader ? Loin s’en faut.

L’homme a perdu ces dernières années, tout le poids et l’influence qu’il exerçait sur les siens. Ses principaux lieutenants ne l’ont-ils pas quitté ? Son parti n’a-t-il pas été coiffé au poteau par des partis de moindre importance lors des dernières législatives ?

Ould Boulkheïr qui vient de subir trois revers successifs, ne semble vraiment plus avoir de l’influence sur les événements extérieurs ! Désavoué lors de la dernière législative avec seulement cinq sièges remportés au Parlement, désavoué de nouveau par la communauté haratine et par ses militants qui se sont rendus en masse à la marche des haratines du mois dernier alors que lui avait demandé son boycott, le voilà surpris par les événements qui consacreBiram comme le leader le plus populaire des Haratine !

Cheikh Oumar NDiaye