Devant l’aberration de l’emprisonnement de Biram Dah Abeid depuis 80 jours, ces épris de justice ont convié Moulaye Hacène, du mouvement Mauritanie Laïque, Laura Spinola, membre d’IRA France Mauritanie et Conseillère internationale du leader Biram Dah Abeid, et Elhadj Fall, membre éminent du staff du président Biram Dah Abeid en France.
Il s’agissait de décrire la situation actuelle de la Mauritanie à la lumière de l’arrestation du leader abolitionniste détenu en prison depuis le 7 août 2018 ; son élection comme député à l’Assemblée Nationale Mauritanienne depuis les élections du 1er et 15 septembre 2018.
Également, explorer les enjeux sous l’angle juridique, laïque, politique et constitutionnel, les tenants et aboutissants, de cette privation de liberté, inacceptable et unanimement rejetée par les deux communautés, mauritanienne et internationale.
Après avoir remercié les participants, le public, le club de presse de Bordeaux, et introduit le sujet, Kerfa Diallo a invité Laura Spinola à expliquer le contexte de l’incarcération du prix des Nations-Unies pour la cause des droits de l’homme en 2013.
L’humaniste française d’origine Cap-Verdienne, conseillère de Biram Dah Abeid, a rappelé les raisons qui l’ont poussé à accompagner le leader abolitionniste universaliste. Mademoiselle Laura Spinola a souligné les qualités d’inspirateur de Biram comme lui a témoigné le Tome Magazine américain qui l’a distingué en 2017, elle a cité son exceptionnel courage comme l’a qualifié le président Irlandais Michael Higgins qui lui a remis le prix de Frontline Defenders en 2013.
Laura a aussi souligné la simplicité et l’empathie du fondateur d’IRA-Mauritanie et concepteur de ses réseaux de par le monde. Elle a également souligné que cette constance de dénonciation d’IRA a fini par rétrograder la Commission Nationale des Droits de l’Homme de Mauritanie (CNDH), de la catégorie A réservée aux institutions indépendantes et conformes aux Principes de Paris, à la catégorie B propres aux institutions inféodées au pouvoir politique et réfractaires aux Principes de Paris.
Moulaye HACÈNE a relayé Laura Spinola à la tribune et a déclaré derechef le lien ombilical entre l’esclavage physique et l’oppression morale et spirituelle. Pour l’activiste du mouvement » Pour Une Mauritanie Laïque », ces forfaits représentant des crimes de droits humains, ont pour terreaux, l’assimilation, dans des États comme la Mauritanie, ainsi que la confusion entre le temporel et le religieux, donc l’amalgame que perpétue la classe dirigeante en Mauritanie, entre le pouvoir politique et la mosquée, la science politique et la science religieuse.
D’où l’appel de Hacène à la séparation des deux pouvoir afin de permettre l’exercice plein du pouvoir politique, et du dogme, en toute indépendance, chacun dans sa sphère.
Et Moulaye Hacène de rappeler que cet aspect d’obscurantisme et de contradiction avait conduit la condamnation à mort de Biram en 2012 lorsqu’il a brûlé les livres qui codifie la traite de l’esclavage et a abouti au feuilleton de Mohamed Cheikh Ould M’KHEITIR, condamné à mort pour apostasie, sa peine ayant été cassée et ramenée à deux de prison, il a été libéré par la justice mais juste après, kidnappé et séquestré jusqu’à nos jours par un État écartelé, ayant un pas dans le moyen âge et un autre dans le monde moderne.
L’initiateur de la conférence, Mohamed LAM, a illustré ses propos sur le plan juridique, notant que la première phrase de la constitution Mauritanienne est contradictoire en ce sens qu’elle associe le droit positif Français à la charria islamique. Dès lors, l’inspiration est faussée; pour monsieur Lam, ceci mène à des inadéquations.
Il rappela que toutes les contradictions dans lesquelles le régime mauritanien s’enlise, comme interdiction de l’esclavage en 1981, renouvelée de manière récurrente en 2007 puis 2015, sans toutefois pouvoir condamner, n’a condamné les criminels esclavagistes, deux personnes aussitôt libérées, et leurs condamnations étant dérisoires et bien en deçà des peines prévues par la loi. Parallèlement à cette impunité, les abolitionnistes sont arrêtés, torturés et persécutés tel Biram Dah ABEID.
Mohamed Lam note le déni du président de la Mauritanie qui préfère parler de séquelles et non de l’esclavage ou le fait de ne pas régler le passif humanitaire.
Par ces éléments, il conclut que le système judiciaire mauritanien est en régression totale et connait ses pires moments avec l’instrumentalisation qu’en fait l’actuel chef de l’État contre les opposants et défenseurs des droits humains. Les voisins de la Mauritanie ont opté pour le silence complice sur l’esclavage et les discriminations contre les personnes d’ascendance africaine, et s’adonnent à une indignation sélective sur le sort des migrants-esclaves en Libye, à déclaré madame Mariem DIOP membre de SOS-Esclaves de la Gironde.
Elhadj FALL, membre du staff de Biram Dah ABEID en France, a apporté son éclairage sur le contexte dans lequel son leader a été arrêté et incarcéré injustement; rappelant le contexte politique d’avant les élections législatives, municipales et régionales l’échéance des élections présidentielles de 2019.
Dénonçant le traitement très partisan, zélé et non sans abus, de la plainte contre Biram Dah ABEID par un journal eux, insulteur public de IRA et son président et roulant à la solde de la police politique du régime de terreur de Mohamed Ould Abdelaziz.
Elhaj Fall a rappelé que l’un des premiers objectifs qui consistait à vouloir empêcher Biram Dah Abeid à accéder au parlement n’a pas réussi car il a été élu au premier tour.
Il est revenu sur l’historique du mouvement à travers les différentes critiques qu’on lui a porté jusqu’au dernier avec concernant l’alliance avec le parti Sawab qui a déclenché la pression supplémentaire sur Biram et son mouvement.
Devant l’auditoire averti et très au fait de la situation de la Mauritanie, les questions et contributions d’Ousmane, Sidi Mohamed, Cheybani, Camara, Sow et les autres étaient particulièrement riches.
Que ce soit sur le passif humanitaire, l’éducation nationale, la probité de Biram, l’éclairage sur le mouvement laïque, les objectifs politiques, l’état de santé de Biram et sa situation juridique, les questions n’ont pas manquées et les argumentaires étaient constructifs.
Bordeaux, le 27 octobre 2018.
Source : IRA-Mauritanie