Mauvaise gouvernance, gaspillage, pillage des richesses, enrichissement illicite, marchés douteux, prête-noms mystérieux, ce sont là des termes qui interpellent aujourd’hui par leur récurrence dans le discours politique.
Est-ce là l’expression d’un sursaut politique ? Le moment est-il enfin venu pour nettoyer les écuries d’Augias d’une décennie au bilan controversé ? Ou sommes-nous toujours dominés par notre prudence atavique qui à chaque fois nous invite à reculer et surtout à ne pas crever l’abcès ?
Une chose est pourtant sûre, aucun développent, aucun progrès ni justice sociale ne sont possibles à l’ombre d’une mauvaise gouvernance. Ce fléau est responsable de l’état de délabrement, d’arriération et de paupérisation dans lesquels se débattent bien des états.
Le monde est de plus en plus insensible à leurs cris de détresse lancés du creux de la vague. La politique de la main tendue ne semble plus payante. La tendance dominante est maintenant à plus d’isolationnisme. « l’Amrique d’abord » de Trump est une devise largement partagée parmi les grandes nations, même si par décence elle n’est pas ouvertement affichée. On assiste à un relâchement notoire des liens de solidarité internationale, les grands blocs sont en décomposition et au sein même, des nations jadis animés d’idéaux philantropiques, le populisme sectaire et xénophobe gagne de plus en plus du terrain.
C’est dire que la rigueur en matière de gestion est devenue une question existentielle. Toute obstination dans le sens contraire sera lourde de conséquences. Ils sont déjà légion, les dirigeants qui par indolence ou complaisance ont conduit leurs pays vers la faillite de l’état et par conséquent l’aliénation de la souveraineté. Manifestement le monde traverse une passe difficile et l’heure n’est plus aux accommodements et à la complaisance.
La corruption est un phénomène qui n’a que trop perdurer, il est temps de l’éradiquer. La tâche est-elle possible ? Oui, et pour ce faire, il suffit d’impulser et de renforcer l’autorité morale des instances de contrôle : l’Assemblée Nationale, et l’inspection générale, toutes deux guidées par les alertes d’une presse vigilante et responsable.
La réaction des réseaux maffieux ne se fera pas attendre et nous en connaissons déjà les axes principaux.
1. Distiller partout un discours fataliste prônant la résignation et l’acceptation du statu quo, tout statu quo, pour ne pas réveiller les vieux démons et raviver des tensions.
2. Jouer le jeu de la victime en criant à la chasse à la sorcière et au règlement ciblé des comptes.
3. Mobiliser les sensibilités tribales et régionales, les dresser en rempart derrière lequel se retrancher.
4. Enfin et pour noyer le poisson, lancer une vaste compagne de diffamation contre tous les acteurs politiques pour brouiller les traces et semer la confusion dans les esprits, comme pour dire, le mal est partout et personne n’est apte pour juger l’autre.
Tous ces manèges ne sont ni plus ni moins que des tentatives de diversion pour ébranler la volonté des décideurs politiques pour les résoudre à se rabattre sur la malheureuse formule qui consiste à dire tournons la page de passé et commençons à zéro. Ce recommencement continu, ce piétinement sans fin ne peut déboucher que sur un enlisement progressif imparable.
Comprenons bien qu’en continuant à lâcher du lest aux malfrats on finira par pervertir les valeurs motrices de la société. Et dieu sait que ces valeurs millénaires existent et crèvent les yeux pour quiconque sait séparer le bon grain de l’ivraie.
Pour illustrer mon propos je citerai ici quelques exemples :
– Maintenant que le temps a fait lumière sur la face cachée de nos anciens présidents, nous savons qu’ils ont presque tous quitté le pouvoir aussi dépourvus que lorsqu’ils y accéderent. Feu Moktar Ould Daddah a vécu à l’exil en s’appuyant sur la seule solidarité bienveillante de ses pairs africains.
Med Khouna Ould Haïdala est revenu modestement au train de vie des grands nomades du Sahara.
Maaouiya lui aussi, malgré l’enrichissement rapide qui a prévalu dans son entourage, est sorti du pouvoir propre, sans aucune fortune à suspecter. Dans son exil, il a eu, à un moment donné besoin de recourir au soutien de ses cousins proches, avant de bénéficier de l’hospitalité, sans doute généreuse, de l’Emir du Quatar.
– Ce même degré de probité insoupçonnée est fréquent parmi les cadres, on se souvient encore de ce cadre qui après des années à la tête du C.S.A, a décliné la candidature au poste député proposé par le PRDS parce qu’il était incapable de financer sa campagne.
– Ils sont fréquents les cadres, qui après avoir occupé plusieurs départements ministériels sont revenus à court de moyens pour partager la vie, combien austère, des professeurs de l’enseignement supérieur.
La bonne graine donc, existe bien, il suffit de l’entretenir et de bêcher tout autour, pour arracher sans discontinuer les mauvaises herbes.
Enfin pour aller au plus court, retenons que la décennie écoulée a été marquée par une campagne sans merci contre les auteurs de détournements ou de malversations, mais jusque là seul les petits ou moyens larcins ont été débusqués et sanctionnés. La campagne pour ne pas être sélective doit s’étendre pour toucher des domaines encore inexplorés où il est question de gros sous, et d’enjeux majeurs.