En Mauritanie, les parlementaires chargés d’enquêter sur les années Mohamed Ould Abdel Aziz (2009-2019) ont dressé un premier bilan de leur travail. Près d’une trentaine de personnalités de divers secteurs ont déjà été entendues dans cette enquête dont le rapport final est attendu dans cinq mois.
Une enquête obtenue après la pression des élus de l’opposition
Une commission d’enquête parlementaire a été créée par vote à l’unanimité le 31 janvier dernier pour « faire toute la lumière » sur les onze années de pouvoir de Mohamed Ould Abdel Aziz. Cette commission fait suite à des pressions exercées sur le parlement, durant plusieurs semaines, par les élus de l’opposition.
Le travail des parlementaires mauritaniens consiste à passer au crible sept secteurs gérés par l’ancien régime entre 2009 et 2019. Il s’agit, entre autres, des secteurs de l’énergie, du pétrole, des ports, des aéroports et du patrimoine foncier.
Les dossiers concernent notamment la vente des biens fonciers de l’Etat à Nouakchott, la gestion de la fondation SNIM et la société chinoise de pêche Poly Hong Dong, accusée de pillage de ressources halieutiques nationales.
« Ne pas collaborer avec la commission devient une obstruction à la loi »
Plus d’un mois après, c’est l’heure du premier bilan. Les enquêteurs ont indiqué avoir entendu près d’une trentaine de personnalités. Parmi elles, des cadres de la haute administration, des ministres en exercice ou d’anciens ministres. La commission a remercié les personnes auditionnées pour avoir collaboré conformément à la loi, même si elles n’avaient vraiment pas le choix.
« Ne pas collaborer avec la commission devient une obstruction à la loi. L’obstruction à la loi est punie dans tous les pays et chez nous aussi. Personne n’a refusé de venir et personne n’a refusé de collaborer », a déclaré Lemrabott Bennahi, le porte-parole de la commission d’enquête.
Lemrabott Bennahi a également souligné que « la commission a le droit, au cours de ce parcours d’enquête, si elle trouve qu’il y a une connexion avec un autre dossier sur lequel il faut mener des investigations, d’en faire la demande et de l’ajouter suivant des procédures définies par la loi ».
Bouamatou, une autre grande victime d’Abdel Aziz
Ce qui suppose qu’elle pourrait s’intéresser par exemple au sort des hommes affaires mauritaniens tels que Mohamed Ould Bouamatou. Dans sa volonté de cadenasser toute l’économie nationale en faveur de son clan, l’ancien président Abdel Aziz a en effet nuit aux activités du banquier.
Il a notamment ordonné, sous fond de rivalités politiques, à toutes les entreprises publiques de retirer leurs dépôts auprès de la Générale de Banque de Mauritanie (GBM) appartenant à Bouamatou.
Il avait par ailleurs engagé le redressement fiscal injustifié de plusieurs entreprises appartenant au banquier. Abdel Aziz avait, en outre, interdit à la Société mauritanienne de commercialisation du poisson (SMCP-publique) de traiter avec la GBM.
Comme Bouamatou, plusieurs autres défenseurs de la démocratie ont été poursuivis par l’ancien régime. Heureusement, le nouveau pouvoir de Ghazouani les as tous réhabilités.
Le rapport attendu dans cinq mois
Notons qu’à la fin de ces travaux, qui doivent durer encore cinq mois, la commission d’enquête parlementaire présentera son rapport final devant l’Assemblée nationale. En cas de faits avérés, celle-ci lancera la procédure de formation d’une Haute Cour de Justice, la seule habilitée à poursuivre les présidents de la République s’ils sont accusés de haute trahison.
Par Philippe Get via cridem