Parmi ces droits, considérés comme étant des attributs inaliénables de la personne humaine, figure en bonne place, le droit de ne pas être tenu en esclavage ou en servitude, celui-là même que le militant français des droits de l’homme, monsieur Jean-Marc Pelenc, se donnait pour mission de plaider avant d’être éconduit, « manu militari », à son corps défendant, du territoire mauritanien, alors qu’il s’y trouvait en toute légalité.
Selon une source autorisée, digne de foi, cette expulsion est due à une méprise, ce qui veut dire que les auteurs ont agi de leur propre chef, en dehors de tout lien de subordination à caractère hiérarchique.
On est donc en face d’un acte détachable, insusceptible comme tel, d’être rattaché à une quelconque mesure de police administrative émanant de l’autorité de tutelle, et qui en conséquence, n’engage que la responsabilité de ceux qui en sont les auteurs.
Il appartient alors à l’autorité de tutelle, en l’espèce le ministère de l’intérieur, de procéder à une enquête pour déterminer les auteurs de tels faits, s’informer sur les circonstances dans lesquels ils ont agi, et prendre à leur égard les sanctions appropriées, celles-ci pouvant être échelonnées en fonction du degré d’implication et de participation aux actes incriminés de chacun des coauteurs, étant entendu que les faits reprochés, sont caractéristiques d’une voie de fait sur la personne du militant français des droits de l’homme, caractérisée par l’agression portée sur sa personne, sa séquestration, et sa reconduction « manu militari » contraint et forcé, en dehors de la Mauritanie, alors que sa présence l’y était sur la base d’un titre de séjour régulier.
Par ailleurs, la victime elle-même, a la faculté de porter plainte contre X devant les juridictions mauritaniennes, la règle de conflit renvoyant à la loi du for, c’est-à-dire la loi mauritanienne, à l’effet de déclencher l’action publique, qui va consister à identifier les auteurs des faits incriminés, les appréhender et les traduire devant la juridiction compétente pour s’entendre condamner aux peines prévues par la loi, sans préjudice de tous autres dommages intérêts auxquels pourrait prétendre la victime.
Les infractions d’agression et de séquestration sont gravissimes ; elles exposent leurs auteurs au renvoi devant la Cour criminelle. Chacune de ces infractions fera l’objet d’une condamnation propre, puisque chacune d’elles défend des valeurs différentes de l’autre ; il n’y aura donc pas absorption de la peine la plus légère par la plus lourde, mains bien cumul de peines.
Certains objecteront que cette action est vaine, la justice mauritanienne étant par nature laxiste, chaque fois que les faits mettent en cause un élément d’extranéité, ce laxisme pouvant s’observer tant au niveau de l’instruction qu’au niveau des juridictions de jugement ; cette objection ne tient plus, car de nos jours, sous la pression des organisations de défense des droits de l’homme, la responsabilité des Etats, à défaut de celle des auteurs des faits incriminés, peut facilement être mise en jeu sur le plan international, si le plaignant soulève comme moyen, d’avoir été victime d’un dysfonctionnement judiciaire.
Bien des Etats ont été condamnés sur cette base, comme ils l’ont été sur la base de lois votées par leur parlement, alors que ces lois contredisaient les engagements internationaux desdits Etats.
Si enfin, et c’est la seconde hypothèse, les actes d’agression et de séquestration sur la victime, l’ont été sur la base d’une mesure de police administrative, alors la responsabilité de l’Etat de Mauritanie pour agression et séquestration du militant français des droits de l’homme est avérée.
Cette responsabilité pourra être mise en jeu sur le plan international, d’autant plus que la victime n’a été ni informée de ses droits, ni bénéficié « sans retard » de l’assistance consulaire, ce qui constitue une violation de la Convention de Vienne de 1964 sur les relations diplomatiques, ainsi que celle sur les relations consulaires de 1963, violations de nature à engager la responsabilité de l’Etat de Mauritanie, comme rapportée par une jurisprudence fournie et constante de la Cour Internationale de Justice, la dernière décision en date, ayant concerné le Pakistan, dont la responsabilité a été retenue, pour avoir incarcéré un ressortissant indien, avant de le condamner à mort par un tribunal militaire pour actes d’espionnage et de terrorismes, après l’avoir privé de bénéficier « sans retard » de l’assistance consulaire. (CIJ 17 juillet 2019 Affaire Jadheroc Inde c/Pakistan).
Il faudra bien que les mauritaniens, Etat et Peuple, acceptent en fait et en droit, et pas en droit seulement, que l’esclavage fait partie de ces agissements considérés comme tellement graves qu’il a été érigé en infraction internationale par la Déclaration Universelle des Droit de l’Homme du 10 décembre 1948, la Convention Européenne de Sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, la Convention relative à l’esclavage du 25 septembre 1926, la Convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui du 12 décembre 1949, la Convention supplémentaire relative à l’abolition de l’esclavage du 7 septembre 1956, le Protocole additionnel à la Convention des Nations- Unies contre la criminalité transnationale organisée, dite Convention de Palerme visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes humaines, en particulier des femmes et des enfants du 15 novembre 2000 et la Convention de Montego Bay , en ses dispositions pertinentes sur le trafic d’esclaves en haute mer.
On aurait dû recevoir, monsieur Jean-Marc Pelenc, avec les égards dus à la grandeur de la cause qu’il défend.
Taleb Khyar ould Mohamed Mouloud
*Avocat à la Cour
*Ancien membre du Conseil de l’Ordre
Source : Maître Taleb Khyar