Le président français Emmanuel Macron a estimé dimanche à Niamey, où il s’est recueilli devant les tombes de 71 soldats nigériens tués en décembre, que la lutte contre le djihadisme au Sahel était à «un tournant», appelant les pays de la zone à redéfinir «plus clairement les objectifs».
«Les semaines qui viennent sont absolument décisives pour le combat que nous menons contre le terrorisme. Nous sommes à un tournant de cette guerre. Il nous faut (…) redéfinir plus clairement les objectifs» à l’occasion du sommet de Pau (sud-ouest de la France) le 13 janvier, a affirmé le président Macron aux côtés de son homologue nigérien Mahamadou Issoufou.
«Il faut définir de manière beaucoup plus claire les objectifs militaires, politiques et de développement pour les 6, 12 et 18 prochains mois», a souligné le président de la République. «Je ne suis pas là pour stigmatiser tel ou tel (pays)», a-t-il répondu alors qu’il était interrogé sur sa phrase de la veille à Abidjan («Si cette clarté politique n’est pas établie, la France dans certains pays en tirera toutes les conséquences»).
«Je vois des mouvements d’opposition, des groupes qui dénoncent la présence française comme une présence impérialiste néo-coloniale (….) Je vois dans trop de pays prospérer sans condamnation politique claire des sentiments anti-francais Je ne peux pas accepter d’envoyer nos soldats sur le terrain dans les pays où cette demande (de présence française) n’est pas clairement assumée», a-t-il poursuivi. «Quand il parle de clarification, le président Macron vise IBK (Ibrahim Boubacar Keita, le président malien) et Kaboré (Roch Marc Christian Kaboré, le président burkinabè)», avait récemment précisé une source sécuritaire à l’AFP.
«Appel à la solidarité internationale»
Le président nigérien Mahamadou Issoufou, allié du président français Emmanuel Macron dans sa vision de la lutte contre djihadisme, a également dévoilé que les pays du Sahel et la France lanceront «un appel à la solidarité internationale» lors du sommet de Pau (sud-ouest de la France) le 13 janvier. «Je pense qu’à Pau nous lancerons un appel à la solidarité internationale pour que le Sahel et la France ne soient pas seuls dans ce combat, afin qu’on puisse mettre en place la coalition internationale la plus large possible contre ce fléau», a-t-il déclaré, aux côtés du président Macron, venu rendre hommage aux 71 soldats nigériens tués en décembre.
Le président Issoufou a rappelé que le Niger consacrait «19% de ses ressources budgétaires dans le combat contre le terrorisme», soulignant aussi que la «France emploie beaucoup de ressources». «La menace du terrorisme est une menace planétaire, elle nécessite une riposte à l’échelle de la planète», a-t-il poursuivi. «Si les Européens ne s’engagent pas, ils auront à faire cette guerre sur leur territoire. Il faut endiguer le terrorisme au Sahel», a-t-il lancé, rappelant que le djihadisme avait aussi un impact sur les économies africaines alors que «10 millions de jeunes Africains» arrivent sur le marché de l’emploi chaque année. Il a ainsi évoqué «l’immigration clandestine» et averti : «ce qui se passe ici aura des conséquences en Europe».
L’invitation par le président français au sommet de Pau avait été mal ressenti par beaucoup, certains y voyant une «convocation» teintée d’attitude néo-coloniale. Le président Keïta a semblé faire allusion à cette tension samedi sur TV5, en indiquant que les pays unis dans la force militaire G5 Sahel souhaitaient «un partenariat respectable et respectueux». De source diplomatique, tous les pays devraient toutefois être présents à Pau. Après l’étape nigérienne, Emmanuel Macron est reparti dimanche en début de soirée pour la France.
Par Le Figaro avec AFP