Discours de l’AFCF à la 63ème session de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples à Banjul

Discours de l’AFCF à la 63ème session de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples à Banjul Mme la présidente, Honorables Commissaires, Mesdames/Messieurs les représentants des Gouvernements, des Institutions Internationales et des ONG des Droits de l’Homme. Avant d’entamer mon intervention, je vous informe que j’étais empêchée de participer à la 62ème session de la Commission, qui s’est tenue dans mon pays la Mauritanie, par les organisateurs avec d’autres militants en guise de sanction, de Mme la présidente, Honorables Commissaires notre engagement pour les droits humains.

Je rappelle aussi qu’à l’heure ou je vous parle, que des militants anti-esclavagistes sont en prison actuellement , Il s’agit de Abdellahi Salem Ould Yali et du député Biram Ould Dah Abeid.

Notre action ne sera pas stoppée par les intimidations, la répression et le musellement des libertés. Nous luttons, continuellement, pour l’avènement d’un Etat de droit respectueux des valeurs de la personne humaine dans notre pays.

En Mauritanie, comme malheureusement dans la plupart des pays africains, la situation socio-économique, politique et culturelle reste encore marquée par des inégalités Homme/Femme ; ainsi les femmes sont les premières victimes de discrimination de toutes natures, faisant d’elles des êtres inférieurs à l’homme. Tout ceci, encouragé par une politique de deux poids deux mesures et maintenu par des préjugés et des pesanteurs socioculturels tenaces encouragés par le pouvoir en place.

Quand à l’existence de l’esclavage en Mauritanie qui constitue une flagrante injustice et discrimination sur tous les plans à l’égard d’une frange importante de la population, il persiste sous ses formes contemporaines et traditionnelles.

Certes, tout un arsenal juridique et institutionnel est mis en place, mais il demeure inefficace parce qu’il n’est pas opérationnel qu’à certaines occasions, telle que lors des sessions de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, pour dissimuler cette pratique inhumaine et dégradante.

Dans ce cadre, 25 plaintes collectives et une plainte individuelle ont été déposé par les jeunes filles et femmes domestiques victimes de viol et des atrocités les plus inhumaines en Arabie Saoudite méritent un règlement immédiat de la part de l’Etat parti.

Ainsi, mon organisation est préoccupée par la signature d’un accord avec ce pays pour livrer 15 000 domestiques qui ne peut que rendre la situation plus difficile à gérer, puisque ses femmes seront exposées à l pure violence selon les expériences vécues dans d’autres pays.

Mme la présidente, Honorables Commissaires, Chers participantes et participants la dégradation des conditions des droits humains dans mon pays, en particulier les victimes de la servitude, la persistance de l’impunité inexpliquée des auteurs des exécutions extra-judiciaires et des déportations des citoyens mauritaniens au Sénégal et au Mali, lors des regrettables événements de 1989/1991, demeure sans solution et les victimes attendent toujours une solution adéquate sur la base d’un règlement par la justice transitionnelle pour mettre fin, à plus de 28 ans de souffrance et de négligence.

Il est claire que la situation des veuves de ses événements ne peut être séparer de celle de toutes les femmes mauritaniennes, qui sont à l’instar de leurs consœurs africaines, font l’objet de stigmatisations, tendant le plus souvent à les dévaloriser.

Elles sont aussi victimes de violations massives, en tous genres, de leurs droits élémentaires, allant du viol, kidnapping, à la violence domestique, l’esclavage, la traite, les pratiques néfastes, (MGF, mariage des enfants), pour ne citer que ces tares.

L’ampleur de ces violences faites aux femmes et aux filles interpelle, l’Etat parti à la charte africaine de protection des droits des femmes et le protocole de Maputo à assumer ses engagements en prenant des mesures visant à réviser le Code du Statut Personnel et le Code de la nationalité pour jeter la base de l’égalité qui commence, tout d’abord par la famille et pour être en conformité avec les engagements de la Mauritanie.

L’Etat parti a l’obligation de mettre en avant l’harmonisation des lois mauritaniennes avec les mécanismes internationaux et sous régionaux ratifiés (CEDAW, CDE la Charte Africaine de Protection des Droits de la femme, La Charte Africaine de Protection et du Bien être de l’enfant et le Protocole de Maputo) etc….

Il s’agit des mécanismes africains qui nous interpellent de plus d’un titre et demeurent malheureusement méconnu dans notre pays, notamment dans les sphères judiciaires, alors que la constitution stipule dans son article 80 que tout traité ratifié a autorité sur les lois nationale. Pourtant, les femmes bénéficient des mêmes droits que l’Homme, du moins en théorie, tel que proclamé par la Constitution, les divers textes législatifs mauritaniens ainsi que les multiples instruments juridiques internationaux, sous régionaux que la Mauritanie a ratifiés.

Les violences faites aux femmes qui sont le lot quotidien de nombreuses femmes et filles mauritaniennes, attestent l’inadéquation entre les pratiques et les déclarations de bonnes volonté des dirigeants de notre pays.

Ces dernières années, des ONG de défense des droits de l’homme féminines se sont mobilisées dans des campagnes d’information et de sensibilisation des populations et des décideurs sur un avant -projet de lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles. Cet avant-projet n’a pas été adopté par le parlement, malgré la recrudescence de toutes les formes des violences à l’égard des femmes et des filles.

En ce qui concerne l’éducation, la situation est catastrophique, en sachant qu’au aucun pays ne peut se développer, sans un enseignement de qualité et non un système de dilapidation du patrimoine scolaire par la vente des écoles et la marchandisation de l’éducation. De nombreuses écoles publiques, à Nouakchott ont été données à des personnes influentes pour construire à leurs places des marchés, alors que des enfants issus des populations pauvres y apprenaient.

Cet enseignement moribond est entrain de rendre son âme. En effet, les jeunes âgés de plus de vingt-deux ans, n’ont plus le droit de se porter candidat au baccalauréat et les étudiants ne cessent de manifester devant le Ministère de l’enseignement supérieur pour accéder aux bourses qui sont devenus inaccessibles à tous et pour les admis l’inscription à l’université. Ils ont eu droit à la réponse : police, matraques et bastonnades pour dire dieu, la scolarisation de nos enfants !

Plusieurs autres catégories d’enfants sont privés de l’état civil, particulièrement, ceux des couches considérées vulnérables, notamment les harratines, les rapatriés, les enfants de familles monoparentales dirigées par des femmes, les enfants nés hors mariage ou abandonnés, ainsi que ceux en situation de mobilité ou migrants résidents, malheureusement, l’accès à l’état civil reste encore un parcours de combattant.

Notre organisation continue à travailler avec ces victimes afin de leur permettre d’y accéder et nous exhortons la Commission d’interpeller l’Etat mauritanien de cesser de bafouer les droits de ces paisibles citoyens et de s’approprier du protocole de Maputo en ce qui concerne l’accès des femmes au foncier, aux grands prêts bancaires pour développer l’entreprenariat, seule garantie de leur émancipation.

Mme la Présidente, Honorables Commissaires, Mesdames/Messieurs les Délégués des Etats, la protection des femmes défenseurs en Mauritanie demeure préoccupante elles sont victimes des attaques des courants extrémistes, à l’autorité elle même et exposées à des multiples risques face à un manque de protection et d’accès à la justice.

Pour terminer, je tiens à interpeller votre auguste Commission afin qu’elle s’attèle à accueillir les informations fiables sur la l’ampleur de la corruption qui gangrène mon pays la Mauritanie.

Considérant les conséquences sur les droits économiques, sociaux culturels sont très dangereuses, nous comptons sur votre sens de responsabilité et de protection des droits humains en Afrique.

Je vous remercie

La Présidente AFCF

Aminetou Mint El Mokhtar

Source : AFCF