Discours de Biram ou requiem pour un système politique agonisant: Après avoir pris connaissance de la liste des principaux candidats …

30 avril 2014 Écrit par 
Discours de Biram ou requiem pour un système politique agonisant: Après avoir pris connaissance de la liste des principaux candidats …

Et si le discours, exagérément décrié, de Biram était un chant funèbre montant de la thébaïde de ces laissés pour compte, dont le nombre croît sans cesse en même temps que s’approfondit la déchéance collective. Et s’il était un chant à la gloire des fantômes qui hantent les abris de fortune de Tarhil et scrutent avec une amertume légitime l’insolence hautaine des immeubles du centre ville et de Tevragh Zeina. Et si ce discours n’était qu’une exhalaison de la fosse commune où gisent les droits et les espoirs du peuple, assassinés par un gouvernement, passé maître dans l’art de décevoir et de faillir à ses engagements. Ne devrions-nous pas y être plus attentifs ?

Et si ce discours n’était que l’expression de la douleur des bas fonds de l’ordre social, là où des citoyens mauritaniens, en paix avec la nation, se sentent exilés dans leur propre pays et vivent livrés aux démons de la misère et aux turpitudes de l’exclusion. Et s’il n’était qu’un anathème fustigeant ce lieu de non Etat et de trop de manifestations d’Etat sous forme de taxes et autres caprices de l’administration ; en d’autres termes, du pays tout entier, moins quelques poches d’opulence et d’impunité. Ne devrions-nous pas y être plus sensibles ?

Et si ce discours, à la résonance lugubrement gauche, n’était que l’écho de la détresse des exclus. Celui de la complainte des pauvres femmes et hommes, transformés en zombies par l’oisiveté, le mépris et le chômage. Du cri des opprimés. De la résignation des faibles et du râle des misérables qui peuplent les Favelas de Nouakchott. S’il n’était que l’écho de la gronde des travailleurs, du ras-le-bol du consommateur et du y’en a marre de la jeunesse et des diplômés. L’écho du désespoir des éleveurs et des agriculteurs. L’écho du silence assourdissant de la Mauritanie tout entière (moins quelques nantis). Ne devrions-nous pas en saisir la dimension humaine pour en conjurer le danger subversif ?

 

Effets émancipateurs induits?

Perçus différemment suivant que l’on croit à la Mauritanie ou que l’on soit prêt à s’en exiler avec armes, bagages et argent à la moindre secousse, le discours de Biram, et maintenant sa candidature, sont selon certains, tout autant une occasion inespérée pour ce peuple d’avoir enfin sa destinée en main, qu’une menace pour un système politique agonisant, dont on peut désormais et sans le moindre souci de conscience, prononcer le requiem sur la partition de la ballade des pendus. ‘’Frères qui après nous vivez…’’

Une autre opinion trouve cependant cette candidature déplacée et inopportune, au motif apocryphe qu’elle n’émane pas d’un hartani bon teint du sérail ou d’un nègre de service comme il en existe des centaines disciplinés et corvéables à volonté. L’argumentaire de cette opinion ouvre grand la porte aux stratagèmes des hommes de l’ombre et des forces politiques occultes qui cherchent désespérément à l’invalider.

Il est vrai que monsieur Biram n’as pas la notoriété des haratines aux cols blancs du système, ce qui lui aurait permis de faire l’économie de bien des propos désobligeants et de passer au travers des mailles du filet de préjugés que des mains expertes tissent déjà pour lui barrer la route.

Mais, l’on ne sait apparemment pas que la force de l’activiste d’IRA réside justement dans cette différenciation qui le fait sortir du lot et le situe au dessus d’une mêlée haratine corrompue et qui développe autant de complexes d’infériorité, qu’elle a de raisons objectives de faire preuve de discrétion, voire d’effacement.

Si, comme le soutiennent les pro-Birame,  la candidature de celui-ci suscite des espoirs chez la majorité silencieuse des électeurs mauritaniens, elle n’en est pas moins à l’origine de craintes morbides chez ceux qui cherchent à séduire ces derniers pour en faire converger les suffrages dans le sens d’un deuxième mandat Azizien. Un mandat qu’il convient tout de même de justifier, à l’aune démocratique, avant d’en évoquer à tout bout de champ la nécessité pour la finalisation des projets en cour, rétorquent les pro-Biram.

Par ailleurs, et indépendamment de la manière dont on la perçoit, l’on ne sait pas pourquoi la candidature de Biram provoque déjà un mouvement de panique et de réprobation que certains milieux d’intelligence, administrative s’entend, tentent désespérément d’étendre à la société tout entière pour en contenir les effets émancipateurs induits?

L’on ne sait pas aussi pourquoi les appréhensions de ces milieux n’ont pas été développées devant les candidatures de Sghair Ould M’Bareck et de Messaoud en 2009 même si l’on sait que, contrairement à celle de Biram, ces candidatures avaient la particularité de légitimer le processus mis en place par les auteurs du putsch de 2008 au lendemain de leur forfait. Pourquoi certaines forces reconnaissent-elles à Boydiel des droits de représentativité qu’elles contestent au leader d’IRA. Et sur le compte de quelle cause Moudir Ould Bouna et Ould Dermane ont-ils donné des gages pour être perçus différemment de lui ???

C’est dans l’absence de réponses valables à ces questions et à d’autres, non moins pertinentes et tout aussi édifiantes sur une probable débâcle électorale dans le camp du pouvoir, que certains analystes croient débusquer la panique d’un système qui ne sait visiblement plus où donner de la tête.

C’est également dans l’absence de ces réponses qu’on croit lire le désarroi des apparatchiks de la nomenklatura politico-affairiste et de leurs journalistes attitrés, qui assistent impuissants à  l’emballement d’un compte à rebours impitoyable entraînant, dans un mouvement infernal et inexorable,  le rouleau compresseur qui laminera désormais leurs privilèges indus.

Et c’est toujours dans cette même absence de réponses et surtout de réactions, qui refléteraient, le cas échéant, la volonté démocratique de permettre aux mauritaniens de choisir en toute liberté leurs dirigeants, que ces mêmes analystes croient s’apercevoir que la peur, tout comme la quiétude d’ailleurs, est en train de changer de camp.

Ils affirment à ce propos que ce que l’on feint d’ignorer, dans le sérail du système c’est qu’au-delà de sa portée historique, la candidature de Biram même rejetée ou invalidée, n’en sera pas moins un acquis national sur la voie du changement définitif et irréversible. La voie qui donne sur la démocratie, la justice sociale et sur la mise hors d’état de nuire du système qui accapare les richesses du pays par des procédés justifiés à la seule aune du clientélisme et du trafic d’influence.

 

Funestes intentions des esclavagistes

Leurs arguments tiennent au fait que, si pour Biram et pour l’IRA, cette candidature est un acte de résistance et une volonté d’affirmer leur poids sur la scène politique, pour les mauritaniens, elle a valeur de symbole contre l’arbitraire et contre le règne de la peur, chevauchant les intérêts particuliers et armant les bras de ceux qui les défendent en arrière plan avec autant de fougue que de mépris pour les règles du jeu démocratique.

Le chemin sera certainement long et le combat acharné sur plusieurs fronts mais, à en croire ces analystes, Biram vaincra. Il triomphera même, ne serait-ce que parce qu’il incarne déjà la manifestation de la volonté du peuple de n’être plus associé à la gestion de ses affaires en tant que figurant. Un peuple dont le leader abolitionniste constitue l’ultime espoir de vivre dignement dans un pays où les droits, tout comme les richesses, subissent la délocalisation et les caprices des règles du marché, dans l’interprétation anglo-saxonne du terme.

Ces mêmes analystes reconnaissent cependant que le projet présidentiel de Biram est loin d’être une promenade de santé. Ils pensent d’ailleurs que sur le chemin qu’il a décidé d’emprunter, le lauréat du prix Onusien des droits de l’homme trouvera, dressées comme des barrières infranchissables, les funestes intentions des esclavagistes et des ennemis narcissiques de la démocratie.

Il y affrontera les ruses et les coups fourrés de la police politique. Il y essuiera les manœuvres des ONGs chargées par les Renseignements Généraux d’instrumentaliser son rayon d’activités, en l’occurrence les droits de l’homme, pour permettre au régime d’en occulter le recul à défaut de savoir y faire face pour un rendement proportionnel aux moyens mis en œuvre pour leur promotion.

Il retrouvera sur ce chemin mais cette fois-ci avec beaucoup plus de roublardise, les mêmes soldats de l’ombre de l’OAS (Organisation Armée Secrète) et de la cinquième colonne des droits de l’homme, qui tenteront de rééditer leur triste cabale afin de diaboliser son prix Onusien, après avoir piètrement échoué d’en annuler l’attribution et d’en banaliser le prestige national et la portée internationale.

Il trouvera aussi sur sa voie les peshmergas payés à la tâche pour tourner, dans une dérision empruntée au cynisme verbal traditionnel dont raffolent certains cercles sociaux, tout ce qui peut être dirigé contre les commanditaires des littératures journalistiques du moment. Il y trouvera les thuriféraires sadomasochistes de l’arbitraire et de l’humiliation et les gardiens du temple de l’esclavagisme et des privilèges fondés sur la naissance.

Toujours selon ces mêmes analystes, Biram trouvera sur son chemin, prête à se mettre en branle, la machine infernale héritée du PRDS et des HEYAKIL et dont les techniciens sont passés maîtres dans l’art de ‘’gagner’’ les élections, par la fraude, l’achat de conscience et les intimidations. Il trouvera encore sur sa voie, des commerçants et hommes d’affaires fidèles au rôle de pourvoyeurs en fonds qui leur est dévolu par le système et qui ne lésineront pas sur les moyens pour le tuer politiquement, à défaut de pouvoir inhiber ou émousser sa détermination.

Il trouvera sur sa voie, des Haratines embrigadés dans le style Tonton Macoute, payés à l’œuvre d’entacher sa réputation et de le clouer au pilori pour insubordination à l’ordre séculaire de la soumission à la tribu. Des consultants en religion, qui prendront à partie les fondements de notre Islam tolérant et unificateur pour le désavouer. Ils tenteront d’assimiler son discours à une sortie sur l’ordre établi et sur l’autorité du premier dans l’ordre (waliyou el emri) ; un premier dans l’ordre dont on se rappelle tous la manière par laquelle il avait pris le contrôle du ‘’Califat’’, sous prétexte d’y faire régner l’ordre. La suite peut se passer de commentaires et de tout sauf des pompiers.

Il trouvera sur sa voie des juristes et politologues payés aux contrats forfaitaires qui appelleront à son arrestation au motif fallacieux qu’il est en train de battre en brèche les fondements de l’édifice républicain. Des extrémistes qui mettront sa tête à prix, lorgnant vers la générosité suspecte de quelques commerçants obscurantistes, prêts à mettre la main à la poche pour faire payer cher les manquements à l’ordre inquisitoire. Des chauvins qui trouveront à sa candidature des relents de racisme ou d’exécution d’agendas extérieurs avec en arrière plan les Etats Unis ou le Mossad et pourquoi pas TSAHAL pendant qu’on y est ?

Mais, le président Biram sait, sans doute, que toutes ces armés ne font qu’une. Une armée qui se limite à un seul segment politique se subdivisant, pour sa part, en quelques ilots d’initiatives conjoncturelles et d’activistes défendant chacun une cause-ressource pour s’assurer un niveau de vie bien supérieur à la moyenne ambiante.

Il en sait donc quelque chose le Biram puisqu’il comprend, mieux que quiconque, que la scène politique mauritanienne est bien celle que des voix, de plus en plus nombreuses, décrivent dans des schémas hallucinants et loin de refléter la tendance de vote dont on accrédite à tort le président sortant.

Il sait que cette scène n’est qu’un théâtre d’ombres turc où 90 % des électeurs sont à l’image de Karagöz et les 10 % restants, à celle de Hacivat avec la culture et la finesse en moins. Un théâtre où des élections se préparent sur fond d’opérette viennoise avec le risque, si l’on n’y prend garde, de les voir se terminer en tragédie shakespearienne avant de sombrer dans un drame à la Somalienne.

Monsieur Biram peut désormais y aller. Tout ce qu’il a à faire est de se projeter dans le sens de la vague car l’océan est en ébullition.

M.S.Beheite