28 décembre 2018 – C.R.I.D.E.M
Le procès du leader anti-esclavagiste mauritanien Biram Dah Abeid est censé s’ouvrir le 31 décembre 2018 à Nouackchott, la capitale mauritanienne. Depuis son incarcération, il y a quatre mois, ses avocats et ses partisans dénoncent une détention « arbitraire ».
« Il s’avère maintenant et aux yeux de tout le monde (…) que cette affaire n’est rien d’autre que l’expression claire de la volonté du pouvoir politique de faire obstruction aux activités politiques et des droits de l’Homme du député Biram Dah Abeid à travers l’entrave à sa liberté », dénonçait une nouvelle fois dans un communiqué publié le 14 décembre 2018 le Collectif des avocats de la défense de Biram Dah Abeid, le président de l’Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste (IRA).
Son procès devrait se tenir le 31 décembre 2018, selon le site qui lui est consacré. Depuis sa cellule, Biram Dah Abeid prévenait déjà en août 2018 dans un courrier : « On me prépare un procès politique. »
L’opposant, qui a annoncé sa candidature à la présidentielle de 2019, est incarcéré depuis le 13 août 2018 à la prison centrale de Nouakchott, la capitale mauritanienne. Biram Dah Abeid avait été arrêté en compagnie d’un autre militant de l’IRA, Abdallahi Houssein Messoud, à la « veille de (la) validation des candidatures » aux législatives où il se présentait.
Son incarcération fait suite à une plainte déposée par le journaliste mauritanien Deddah Abdellah qui a accusé le leader de l’IRA de « menaces, appel au meurtre et violation de domicile ». Dans sa lettre datée du 15 août 2018, Biram Dah Abeid explique notamment que le reportage réalisé par Deddah Abdellah est de « la même veine que ceux produits, envers IRA, par les services des renseignements mauritaniens ».
Depuis son arrestation, citoyens et organisations de défense des droits de l’Homme se mobilisent en Mauritanie et en dehors pour exiger sa remise en liberté. En France, le cas de Biram Dah Abeid a fait l’objet de questions écrites à l’Assemblée, introduites par Clémentine Autain et Danièle Obono, députées de La France insoumise. Début décembre 2018, la section belge de l’IRA manifestait à Bruxelles pour réclamer sa libération immédiate. D’autant que l’état de santé de Biram Dah Abeid est préoccupant.
My friend Biram Abeid has been in prison for the past 4 months and despite his deteriorating health, the racist government of Mauritania which has been arresting him for years now has refused to free him. Biram who was born a slave has been fighting to end slavery in Mauritania. pic.twitter.com/OItrZny1IM
— Farida Bemba Nabourema (@Farida_N) December 21, 2018
(« Mon ami Biram Abeid est en prison depuis quatre mois et, malgré la détérioration de son état de santé, le gouvernement raciste mauritanien, qui l’arrête depuis des années, a refusé de le libérer. Biram, qui est né esclave, s’est battu pour mettre fin à l’esclavage en Mauritanie »)
« Une justice aux ordres »
Biram Dah Abeid « a de sérieux problèmes de santé, notamment cardiaques », explique à franceinfo Afrique William Bourdon, l’avocat français de l’opposant mauritanien. « Il a d’ailleurs fait une crise cardiaque alors qu’il était détenu. Il a été hospitalisé dans des conditions extrêmement cruelles et, à bien des égards, inacceptables. »
Lors d’un plaidoyer en faveur de Biram Dah Abeid, le 3 décembre 2018 dans l’hémicycle, la députée tchadienne Coumba Dada Kane rappelait qu’il avait « obtenu aux forceps, le 27 novembre 2018, son évacuation pour les urgences du Centre national de cardiologie ». « Chaque jour qui passe, poursuivait la vice-présidente d’IRA–Mauritanie, les autorités posent des actes qui déshonorent notre modèle démocratique en instrumentalisant notre système judiciaire pour confirmer ce que tout le monde sait déjà : une justice aux ordres. »
Par conséquent, les avocats mauritaniens de Biram Dah Abeid « se heurtent à un plafond de verre très difficile à franchir », affirme Me William Bourdon. Ils travaillent « dans un contexte extrêmement difficile pour eux, où les droits de la défense ont subi, ces dernières années, une érosion spectaculaire. Quand l’autorité judiciaire est soumise au pouvoir politique, les marges de manœuvre des avocats sont réduites d’autant. »
Falila Gbadamassi