« Témoin d’une époque » d’Al Jezzira : Tirs croisés sur Salah Ould Hanana

« Témoin d’une époque » d’Al Jezzira : Tirs croisés sur Salah Ould Hanana

D’abord, le choix porté sur un témoin de l’histoire politique de la Mauritanie, est considéré par plusieurs observateurs comme le produit d’un laxisme entre l’islamiste Salah Ould Hanana et le journaliste membre des Frères Musulmans d’EgypteMohamed Mansour d’Al Jazeera.

Depuis la diffusion de la première partie de cette émission, les critiques s’abattent sur cet ancien officier, radié du corps de l’armée en 2002, puis auteur d’un putsch manqué en 2003 et aujourd’hui reconverti en président de parti politique.

L’émission phare d’Al Jazeera, « Témoin d’une époque » qui devait mettre sur la sellette Salah Ould Hanana, était déjà très attendue par le public mauritanien. Plusieurs ont considéré que son témoignage était loin de la vérité, surtout très éloigné de l’objectivité historique.

C’est surtout son jugement sur le Père de la nation mauritanienne, Me Mokhtar Ould Daddah et certains des bâtisseurs de la Mauritanie naissante, à l’image d’Ahmed Ould Horma Ould Babana, qui ont surtout choqué une partie de l’opinion et généré une salve de critiques virulentes et acerbes. En effet, Salah Ould Hanana, dans cette première partie qui remonte à la naissance du pays, soutient que le colonisateur français était obligé avant son retrait de laisser derrière elle une élite mauritanienne acquise à sa solde, de crainte qu’une autre élite, plus nationaliste ne s’impose, comme cela est arrivé dans plusieurs parties du monde.

Ainsi, selon lui, le premier président mauritanien, Mokhtar Ould Daddah, Ahmed Ould Horma et Ahmed Ould Miské faisaient partie de cette élite mauritanienne à qui le colonisateur français avait remis les rennes du pays, rappelant qu’ils étaient tous d’anciens interprètes.

Ce sont ainsi selon lui, ces interprètes et leur descendance qui ont hérité de laMauritanie après le départ du colon. D’après lui, l’objectif d’une telle politique devait faciliter à maintenir le cordon ombilical entre la France et la Mauritanie, soulignant qu’une telle entreprise lui a toujours été difficile, du fait de la barrière linguistique, religieuse et coutumière que les autochtones lui ont toujours opposé. D’où la création de cette élite d’intermédiaires qui lui permettra de continuer à avoir une mainmise administrative sur un pays composé de nomades éparpillés dans son vaste désert.

Cette sortie de Salah Ould Hanana lui vaudra ainsi la sortie canonique de Mouna Mint Dèye, la Noria du RFD (Rassemblement des forces démocratiques, principal parti de l’opposition radicale), surtout dans la partie se rapportant sur la vie de Mokhtar Ould Daddah. Selon elle, Salah Ould Hanana n’a été ni convaincant ni crédible dans son témoignage, surtout quand il soutient queMokhtar était un agent à la solde de la France alors que c’est elle qui était derrière le coup d’Etat qui l’avait renversé, et c’est elle aussi qui a été surprise quand Ould Daddah a posé les jalons de l’indépendance économique et militaire de la Mauritanie.

Mais la réaction la plus posée est sans nul doute du Dr.Idriss Ould Horma, qui trouve déplacé un témoignage qui occulte l’histoire rationnelle du pays et qui tend à salir la mémoire d’hommes qui ont servi le pays plus que tout autre Mauritanien, à l’échelle de toutes les époques.

Dr.Idriss s’est tout de même contenté de défendre la mémoire de son père, mort en exil au Maroc et qui aurait laissé derrière lui en Mauritanie un registre honorable en termes de combats pour sa liberté et son épanouissement. Il trouve d’ailleurs le témoignage de Salah Ould Hanana tronqué dans la mesure où il porte un jugement sur une époque qu’il n’avait pas pu appréhender dans toute sa dimension, car il n’était encore qu’un enfant. Ce qui selon lui, enlève toute crédibilité à son témoignage sur cette période.

Les observateurs trouvent que cette polémique sur l’histoire passée et présente en Mauritanie, toujours remises en cause, tant cette histoire est écrite selon les humeurs, doit pousser les scientifiques mauritaniens, les autorités et la société civile, à prendre leurs responsabilités afin que l’Histoire de la Mauritanie soit enfin écrite.

JOB
Source : L’Authentique (Mauritanie)