La mort de Souvi Ould Chein et l’évasion des prisonniers salafistes : Deux plaies, une mesure

Interview avec Ely Ould Krombelé : Les chances de Biram d'accéder au palais présidentiel, sont quasi-nulles et son alliance avec les nationalistes, sonne la fin d'un rêve | L'Information

Avant-propos

Je tiens à remercier tous ceux et toutes celles qui ont partagé la douleur de la famille Ehel Krombelé, suite à la disparition subite de notre frère bien-aimé, père, époux, ami et cousin, feu Chérif Ahmed Ould Sidahmed Ould Sidi Ould Krombelé, né le 22 septembre 1960 à Nioro, décédé le 6 Février 2023 à l’Hôpital Militaire de Nouakchott. Si la mort n’a pas épargné notre Prophète Mohamed Ibn Abdoullah (PSL), cela veut dire que c’est elle seule qui donne un sens à la vie. Alors qu’Allah nous Accorde longue vie dans la paix et la sérénité pour ainsi revenir à nos histoires byzantines, et nos préoccupations quotidiennes. Amen

Voilà deux événements qui ont tenu en haleine l’opinion publique mauritanienne, de par le manque de professionnalisme notoire des acteurs de la bavure policière de Dar Naim, d’un côté, l’évasion mortifère survenue à la prison Centrale de Nouakchott le dimanche 5 Mars 2023, de l’autre. Tenir en haleine une opinion publique hélas rabougrie d’incertitude, surfant tantôt sur l’espérance, tantôt sur la crainte de perdre espoir. Au bout de cette atmosphère néfaste, s’est construit un sentiment de déréliction avec une rare stupéfaction de l’opinion sur des événements, disons-le, spectaculaires que même l’inconscient collectif des citoyens, toutes tendances confondues, rechigne à évacuer … Le doute s’est installé dans l’esprit de chaque  mauritanien quant à la sécurité collective, quant à sa sécurité personnelle. En effet au moment même où l’on croyait que tout  était sous contrôle, voilà que deux situations démoniaques surgissent à l’improviste, entraînant des spéculations, des invectives, des dénigrements à l’égard de la police, et de la Garde Nationale, deux entités dépendant cependant du ministère de l’Intérieur. A qui profite ces crimes, se demandent  les éternels adeptes de la main invisible, voire manipulatrice, crimes qui ont déconstruit la » ligne Maginot » sécuritaire dont nous nous pourfendions face à la menace terroriste qui ravage les maliens et les burkinabè surtout? Nos décideurs politiques ne doivent -ils pas élaborer une autre stratégie sécuritaire, débarrassée de tout immobilisme décadent? Ces deux événements relevant de la possible défaillance des renseignements extérieur et intérieur, ont infligé à la mégalomanie sécuritaire mauritanienne un démenti cinglant, voyant son curseur descendre d’un cran. Ex nihilo nihil. Rien ne vient de rien, et les mêmes causes produisent les mêmes effets. Ce raisonnement scientifique trouve son écho à travers la trame d’errements qui ont secoué l' »image d’Epinal » de notre sérail. Qui sème la médiocrité, récolte l’incompétence.. et l’incompétence a accouché cette fois de deux scénarii ubuesques que sont la bavure policière de Dar Naim et l’évasion de la prison centrale de Nouakchott de terroristes meurtriers. A qui la faute encore ? Soyons clairs, les responsabilités sont à déterminer d’abord au niveau du premier échelon de la hiérarchie, autrement dit  au  tristement célèbre commissariat de Dar Naim 2 pour la bavure policière, et à la prison centrale de Nouakchott pour l’évasion où deux gardes ont perdu la vie le 5 mars en plus du gendarme mort lors de l’assaut sur les fugitifs, le 11 mars 2023. Dites-moi le Garci, cette unité d’élite ne pouvait-il pas encercler 4 fugitifs isolés, en attendant les renforts, afin de les capturer tous vivants? Quand l’immobilisme d’un côté, se mêle à la précipitation de l’autre, le professionnalisme et la rigueur déguerpissent.

 

A/ Une bavure policière : du déjà vu, mais…de grâce 

Au sortir de l’indépendance en 1960, notre police nationale, à l’instar de notre Garde Nationale, notre poste, notre santé publique, notre Gendarmerie étaient des joyaux; la qualité l’emportant sur la quantité. C’est au milieu des années « 80 » que tout bascule. L’argent coule à flot, le trafic de drogue séduit la jeunesse, la fédération des transporteurs inonde la direction de la sûreté d’émoluments, de rétributions etc… La corruption et son corollaire qu’est le laxisme, s’invitent au train de vie de nos fonctionnaires de police. Des généraux qui se sont succédés à la tête de la sûreté nationale tels Ghazwani, Ould Elhadi, Ould Meguett, ont tout fait pour éradiquer le fléau de la corruption, en vain, car le mal était profond. A telle enseigne que l’ancien président Mohamed Abdel Aziz  qualifiant  la police de « nid d’espions » au service de son cousin et rival, feu Ely Ould Mohamed Vall, lui préféra une nouvelle « création » du nom de GSSR, appelée communément Mesgharou.

Justement c’est sous le général Mesgharou Ould Sidi Ould Ghweizy qu’un certain défenseur des droits de l’homme Souvi Ould Chein a été tué dans un commissariat de Dar Naim, pour paraît-il une obscure histoire de dette assortie d’une fangeuse corruption à tous les étages. La convocation d’un citoyen au commissariat de police de cette sulfureuse localité aurait mal tourné, entraînant la mort de ce fameux Souvi Ould Chein. Une bavure, dont certains qui ont probablement des comptes à régler avec le directeur de la sûreté, Mesgharou, en ont abusé comme moyen de pression pour ainsi salir le général. Autant cette tragique mort est condamnable, autant l’est la campagne de dénigrement perpétrée contre un des meilleurs officiers de sa génération, intelligent et compétent, et qui ne trempera jamais dans une quelconque magouille de politique politicienne. S’attaquer à Mesgharou et à son fils, c’est faire semblant de ne pas croire que la bavure policière a eu lieu à leur insu et qu’il est irresponsable que certains journaleux demandent sans preuves tangibles le limogeage d’un directeur qui a fait le plus de bien pour rehausser l’image kaléidoscopique de la police nationale, depuis 1978. Demandez aux officiers, sous-officiers et agents de police, ils vous diront que du temps de Mesgharou, la police se relève, se mue en une institution qui cherche ses repères de normalité, perdus surtout du temps de Maawiya. Certes la bavure du mois de Février passé est à mettre sur l’excès de zèle d’un jeune commissaire inexpérimenté entouré de policiers, tantôt corrompus, tantôt mal formés. Sinon rien ne serait passé sans les règles de l’art, autrement : convoquer, auditionner, et puis relâcher. La mort de Souvi Ould Chein était une bavure, qu’il faut désormais éviter. Maintenant, était-elle préméditée? La justice nous le dira, car le temps de la justice est beaucoup plus long que celui de l’opinion, même choquée.

  B/ L’Evasion des salafistes :

L’évasion de quatre terroristes de la prison centrale de Nouakchott dénote de la négligence notoire du mauritanien d’une manière générale, dès que le danger immédiat serait passé. Sinon comment comprendre que des terroristes qui avaient tué froidement, se soient « intégrés » en prison à tel point de sympathiser avec le personnel pénitentiaire, que le régisseur de la prison soit laxiste, que l’Etat-major de la Garde n’en fasse de leur surveillance, sa principale préoccupation? Il y a chez le mauritanien des contradictions congénitales. Quand le danger passe, il baisse totalement la garde. Or c’est dans la tranquillité qu’il faut plutôt se préparer à affronter les éventuels dangers.

L’évasion des prisonniers salafistes est une faute professionnelle qui incombe d’abord au commandant d’unité qui doit sécuriser la prison. Moi, en temps que régisseur de cette prison, de surcroît avec un grade de colonel de la Garde Nationale, je dois prendre toutes les mesures nécessaires, si on me donne pas les moyens, je démissionne avec fracas. La responsabilité ne se partage pas. Car un terroriste qui a déjà tué froidement, tuera un autre jour, si l’occasion se présentait. Si le colonel avait cette pensée en tête, nos deux gardes seraient encore en vie, la république n’aurait pas été secouée des jours pénibles pour traquer quelques assassins dépourvus d’humanité.

 

   C/ Plus jamais ça:

Quelques concours de circonstances malheureuses, allant de la bavure policière, à l’évasion des prisonniers terroristes de la prison centrale de Nouakchott ont jeté le doute sur la bonne gouvernance d’un régime qui semble pourtant être le plus juste, et le plus à même de trouver des solutions réalistes aux nombreux problèmes socio-économiques des mauritaniens, depuis 1975. Avec sincérité et amour pour la patrie mauritanienne. Tant que l’on croit que la solution est uniquement verticale et qu’elle ne pourrait venir que du pouvoir exécutif, l’on se trompe. Si le colonel de la garde avait prévu un officier de permanence le dimanche 5 Mars et non un brigadier, s’il avait fait une ronde , si ses éléments ne s’étaient pas familiarisés avec les salafistes, en somme s’il avait fait réellement le travail qui devrait être le souci de n’importe quel commandant d’unité élémentaire, nous n’en serions pas là à dresser une comptabilité macabre..!!!

Les mois de février et mars 2023 deux plaies béantes ont émaillé de sang, de crainte, et d’incertitude le fragile tissu social mauritanien. Et pourtant ces manquements au professionnalisme et à la rigueur qui en découle pouvaient être évités si les protagonistes (le commissaire et le colonel) avaient fait leur travail tout court. Pour éviter à jamais ces deux plaies et qui resteront béantes au sein des forces du ministère de l’intérieur, à savoir la Garde et la Police, il faudrait une seule mesure: l’homme qu’il faut à la place qu’il faut. /.

 ELY OULD KROMBELE, FRANCE