A la veille de la rentrée scolaire la question se pose de savoir où va notre système éducatif qui est sous perfusion depuis de longues années. En effet il ne serait pas exagéré de parler de mort clinique au vu des principaux indicateurs qui virent pratiquement tous vers le rouge.
Certes un changement important vient d’être opéré à la tête du département mais reste à savoir si le nouveau ministre saura gérer le lourd passif qui lui a été légué par son successeur.
En effet en 3 ans, ce dernier qui était sensé mettre en œuvre l’ambitieux projet d’école républicaine promis par le président de la République a passé le gros de son temps à gérer les jacqueries régulières des enseignants plutôt qu’à poser véritablement des actes pour sortir le système éducatif de l’ornière.
Et à la veille de son départ suite au dernier remaniement ministériel il a supervisé les journées de concertation sur la fameuse loi d’orientation qui a finalement été adopté par le parlement ; une patate chaude qu’il livre à son successeur.
Cette loi constitue en fait une pomme de discorde et nous ramène cinquante six ans en arrière avec cette question inextricable de la langue qui demeure pendante depuis les événements de 1966.
Ainsi depuis 1979 et l’institutionnalisation d’une école à deux vitesses (Arabe/Français) les différentes réformes qui se sont succédées ont montré leurs limites.
Ces réformes mal pensées et le plus souvent décrétées à la va-vite ont toujours buté sur la question de la langue d’enseignement ;une pomme de discorde qui a conduit à une politisation à outrance de cette problématique qui a porté un grand préjudice à notre système éducatif.
Et pourtant jusqu’en 1978, cette question de la langue avait pu être gérée avec tact et notre école s’en sortait plutôt bien. Et c’est justement le système qui avait prévalu jusqu’à cette date qui a permis au pays d’avoir ses meilleurs cadres.
Pourquoi alors le changer et pourquoi ne pas le réhabiliter au détriment du système moribond actuellement en vigueur ?
C’est toujours bien de regarder en arrière et de tirer des leçons du passé.
Aujourd’hui avec plus de 7 milliards d’ouguiyas de budget et les dizaines de millions de dollars déversés sur notre système éducatif les résultats sont plutôt écœurants et on continue comme si de rien n’était.
Le secteur est plus boulimique que jamais et l’argent est orienté vers des séminaires et autres formations ou activités sans incidence notable.
En matière d’infrastructures scolaires le déficit en salles de classes est toujours là malgré les efforts fournis.
Et l’on se demande comment le ministère compte relever le défi de la généralisation de l’enseignement publique pour l’année scolaire 2022/2023 où la 1ère année du Fondamental sera l’apanage de l’école publique ?
Les salles de classes sont insuffisantes et les conditions d’accueil sont précaires même à Nouakchott où on trouve des classes de plus de 100 élèves.
Ailleurs dans le pays, les écoles incomplètes sont légion et organisées sur un mode multigrade.
Au secondaire, la situation n’est guère meilleure et les disparités sont énormes (géographiques, sociales, de genre…).
Beaucoup de collèges et de lycées publics n’ont ni eau ni électricité et ne disposent pas de salles de travaux pratiques et de salles informatiques. Autre grand défi à relever, le niveau des enseignants dont beaucoup sont peu qualifiés du fait de leur niveau initial et d’une formation au rabais.
Ils ne sont pas motivés et travaillent le plus souvent dans des conditions extrêmes et sont généralement laissés à eux-mêmes, peu encadrés, peu suivi pédagogiquement, peu évalués.
Malgré l’existence de l’Inspection Générale qui dispose de moyens assez conséquents, l’encadrement pédagogique est réduit à sa plus simple expression notamment au niveau du secondaire où les inspecteurs se complaisent dans l’oisiveté se contentant d’une ou deux missions annuelles qui s’apparentent plutôt à des incursions touristiques.
Au niveau du pilotage du système la situation n’est guère plus reluisante. En effet tant au niveau central qu’au niveau des échelons inférieurs, les promotions sont fantaisistes et n’obéissent pas le plus souvent à des critères objectifs.
N’importe qui est placé n’importe où ce qui a des conséquences désastreuses sur la productivité et la gestion des institutions scolaires en général.
Ce sont là autant de défis que le tout nouveau ministre devrait s’employer à relever pour remettre notre système éducatif sur les rails.
Bakari Guèye
Initiatives News