Peu m’importe qu’il soit blanc, noir, jaune ou indien. Il suffit qu’il soit un homme, il ne peut rien être de pire ( Mark Twain)
Pigments et délires
Le Blanc s’est arrogé le préjugé favorable selon lequel il serait le plus fort, le plus beau, le plus intelligent. Ce fut une décision unilatérale et impudente, prise à la faveur des méandres de l’histoire et de l’ethnocentrisme morbide. Adam serait-il blanc ? Suivant un poncif largement diffusé par les Arabo-Musulmans, lui et Eve, sa femme issue de sa côte, auraient une teinte épidermique blanchâtre. De toute façon, le Coran ne donne pas une idée de la couleur du premier homme, ni sur celle des prophètes, ni d’ailleurs des anciennes peuplades. Qui nous dit expressément que les Abricantes, les Cananéens ou les Numides étaient blancs ou noirs ou blonds ? Selon toute vraisemblance, c’est le climat qui s’occupait de la peinture et de la tôlerie. Les premiers Arabes de la péninsule arabique seraient noirs de peau, sinon basanés, fortement hâlés par un soleil ardent. Le sort aurait seulement fait que les premiers despotes byzantins ou orientaux soient blancs de peau et « richards avec un cœur de lion », arrachant de haute lutte le trophée de l’intolérance. Leur cruauté et leur racisme n’avaient d’égaux que leurs délires architecturaux. L’on se rappelle que Nimrod avait conçu la tour de Babel, dont le sommet devait gratter le septième ciel, permettant, entre autre, de descendre Dieu en flammes, éventuellement. Atila, le roi des huns, se fit ériger une tour de sept étages dont les briques étaient simplement des têtes de morts. Ce chinois qui disait à qui veut l’entendre : « Moi Atila, le roi des huns, là où mon cheval passe, l’herbe ne pousse plus » sentait trop bon ; sa tenue d’apparat étant confectionnée de peaux de rats. Parce que c’était lui-même, il ne craignait pas la douve du rat, et s’enfichait fichtrement du petit muridé, porteur Yersinia pestis, responsable de la peste. Téméraire il s’empiffrait de Pangolin, le mindaeporteur ‘’sain’’ du Corona.
La prochaine anthropozoonose
Je ne devrais pas ici charger la Chine outre-mesure, dont la coopération sanitaire saine commençait déjà dans les années 60 et qui avait vaillamment imposé notre entrée aux Nations –Unies, en concédant à l’URSS de faire coopter la Mongolie extérieure. Mais c’est dire que la pandémie semble démystifier l’homme jaune, aussi bien que le fut, pour la première fois, l’homme blanc, lors de la première guerre mondiale. Malheureusement d’aucuns disent que la prochaine anthropozoonose (maladie transmise à l’homme par l’animal) viendrait de la Chine ; eux qui mangent tout, même ce qui ne se mange pas. Pour endiguer la famine, le grand timonier leur aurait recommandé de consommer tout ce qui bouge sur terre, excepté les automobiles. Dans les années 70, tandis que les grenouilles n’étaient que le signe d’un bon hivernage, les gens de Kiffa découvrirent, à leur grande stupeur, que la chair de ce batracien anoure était particulièrement prisée par la mission médicale chinoise.
Calligula n’est pas des nôtres
Jusque- là nous les autres, les barbares – comme quoi il n’y a que Rome et les barbares- nous sommes les souffre-douleurs de l’Europe et du monde outre- Atlantique, voire « les damnés de la terre », dirait Franz Fanon. Mais un regard rétrospectif, j’allais dire « retrovirustique », trouve que la variole, la Peste, la grippe espagnole et le coronavirus n’ont pas pour berceau l’Afrique. En nous couvrant aussi méchamment d’opprobre, on nous fait comprendre que nous sommes la matrice du despotisme et de l’absolutisme ubuesque. Or Calligula n’est pas africain, aussi bien queNimrod ; non plus, plus près de nous, Pinochet ; ce chilien qui, très pressé d’en découdre avec la résistance du communiste Salvador Allende, ensevelît le palais de la Moneda sous un déluge de feu, employant chars et avions couplés. Notre Afrique a subi bien des dictatures militaires. Mais toujours le Blanc était là pour faciliter la tâche aux tyrans, digne de ‘’Bigbrother’’ tout droit sorti du roman (1984) de Georges Orwell. Les belges savaient bien que Mobutu devait trucider Lumumba, et l’on sait que l’Adjudant-Chef Bokassa1.0, accusé d’avoir crevé les yeux à des enfants à Mbaragba, et d’avoir mangé la chair de ces sujets, rétorquait : « si j’ai mangé la chair humaine, Giscard en a bu la sauce ».Aussi, la traite négrière, les fours crématoires, le génocide arménien et la Colonisation (qui ne mériterait pas la repentance, selon Sarkozy) ne sont pas notre œuvre. C’est avec le règne de l’Empereur Corona premier, qui semble être chinois, que le mythe du blanc est définitivement balayé. La première démystification de l’homme blanc eut lieu lors du premier conflit mondial. Lorsque « les poilus » aussi bien blancs que noirs ont dû vivre « la condition humaine ». Tout le monde, confiné, dans les tranchées avait dû communier sous le signe la misère de l’Homme. Lors de cette catastrophe, pour les besoins de la montée en puissance, les Blancs emmenèrent dans leurs bagages des Régiments de Tirailleurs Sénégalais, les baptisant, par euphémisme, sénégalais ; or il y a bien d’autres pays Africains dans le contingent, dont une grande partie fut mitraillée à Thiaroye à défaut d’être payés. Sorti du premier cataclysme mondial, la France avait un problème de trésorerie sévère, comme un SRAS. Jusque- là, l’Africain – qui croyait que le Blanc bénéficiait d’une stature et d’un statut quasi-divins – le voyait maintenant obligé de faire dans sa culotte, sans autre forme de déféquer. Blancs et Noirs étaient contraints de co-vider leurs estomacs par le haut et par le bas. La démystification accéléra alors les indépendances et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes (…)
La prophylaxie trumpienne
Aujourd’hui le virus du Corona prend par la gorge, en premier lieu, les têtes couronnées et les grands dirigeants, tout en tenant en échec toutes les ‘’superpuissances’’, incapables de produire un vaccin ou de revenir à la rescousse des économies qui piquent inexorablement du nez. Après la pandémie qui perdure, les ‘’Grands’’ auront à se rendre à l’évidence et à repenser le monde avec une nouvelle approche altruiste. Maintenant que tous se savent misérables. Tous les puissants qui oubliaient qu’il y a un Tout-Puissant ont dû sauter de leurs lits, en criant «Mille castors alambiqués ! » Et quatre mois après la blitzkrieg du Général Corona, on est au stade des formules fantasmatiques. Cette semaine, l’air sérieux, le Chef de l’Etat le plus puissant s’est adonné a débité une bêtise, quand il recommande de boire des détergents, au moment où attendait qu’il sorte de son chapeau le remède miracle. Si on survivait à ce lavement, à quelque chose malheur est bon, tout sera purgé alors de notre sang : la haine de la personne humaine et tout ce qui va avec… In fine, la présomption de stupidité aura changé de camp, en même temps que notre vulnérabilité supposée. C’est d’autant plus vrai qu’aucun journal occidental ou outre-manche n’a fait état d’un santon appliquant des formules ésotériques au COVID 19. Non plus d’un féticheur proposant des scapulaires, des talismans ou autres remèdes cabalistiques.
La fin du calvaire
Dépassés, harassés, tabassés par le cataclysme les Chefs de guerre ont tendance, comme les enfants du Cinéma Lejouad, à dire : « Réveillez-moi à la casse-fin ». De guerre lasse, ils attendent que la courbe d’intensité du virus descende d’elle-même. Ils regardent maintenant vers le firmament, mais Dieu n’est pas visible par satellite. Spécialement, les Musulmans savent qu’une épidémie s’évanouit toujours après un ravage pas trop long. Le grand érudit Mohamed El Hassen O, Deddew nous promet d’ailleurs la délivrance dans la dernière décade de Ramadan. Ce fut, parait-il, à l’issue d’une virée dans le monde onirique. De toute façon, il faut prendre son courage à deux mains et son mal en patience. Il faudrait tout supporter pour mieux vivre. Les Oulad Deymanes demandèrent un jour à leur chef : « Votre fraction n’est pas la plus savante, ni la plus généreuse, ni la détentrice des formules ésotériques (Sîr), pourquoi alors vous êtes les leaders ? Lui de répondre : « Ce n’est pas compliqué, nous sommes arrivés à tout simplifier » En somme, les musulmans ne mourront pas dans cette pandémie, puis qu’à s’en tenir à leur eschatologie, les signes avant- coureurs de l’apocalypse ( Alakhira) ne sont pas encore là ; à savoir le retour de l’antéchrist (Dejjal) et de la bête ( Ad-daba ), etc. Donc, ne paniquez pas.
Brahim Bakar Sneiba
Ecrivain et Journaliste