Si en Algérie on célèbre, en cette année 2019, le 65ème anniversaire du déclenchement de la Révolution de libération nationale, en ce mois pas comme les autres, en Mauritanie, le 28 novembre coïncide avec le 65ème anniversaire de l’indépendance nationale.
Il m’est donc opportun, en cette heureuse circonstance, de précéder l’Evènement pour féliciter, au nom du peuple et du gouvernement algériens, ainsi qu’en mon nom propre, le peuple mauritanien frère et lui souhaiter bonheur et prospérité.
C’est également, à n’en pas douter, une bonne occasion pour évaluer la situation actuelle des deux pays, dans divers domaines, et évoquer les perspectives qui s’offrent à chacun de ces deux Etats.
En ce qui concerne la Mauritanie, tous les indicateurs et données disponibles poussent à l’optimisme pour un avenir radieux. En Algérie, l’on s’apprête à inaugurer une nouvelle ère en reconsidérant, avec sagesse, l’édifice institutionnel dans son ensemble. Après le bon déroulement de l’élection présidentielle du 22 juin 2019, en Mauritanie, l’Algérie s’apprête, elle, à remettre le pays sur les bons rails, en organisant une élection présidentielle le 12 décembre.
C’est dans ce cadre que l’Algérie aspire à poursuivre le développement de ses relations bilatérales avec la Mauritanie en traçant de nouveaux jalons dans une coopération solide et multiforme. Nous n’exagérons pas en disant que les deux pays ont toujours entretenu des relations privilégiées, comme alliés et partenaires économiques entretenant une idylle dont les moments méritent d’être contrés.
Dans les mémoires du président défunt Moctar Ould Daddah, l’on retrouve des exemples forts de cette fraternelle solidarité. J’ai particulièrement retenu ce passage dans lequel il relate, avec émotion, cet épisode : « J’ai entretenu une fois M. Boumédiene du projet de construction, en eaux profondes, du port de Nouakchott comme réalisation vitale pour la Mauritanie, et il m’a répondu : « quel est le coût du projet ? Et quand j’ai donné l’estimation de 250 millions de francs CFA, il m’a aussitôt dit : « votre ministre des Finances peut contacter son homologue algérien pour discuter avec lui des modalités de transfert de ce montant en Mauritanie. Sauf que la Chine, que nous avons sollicitée, avait décidé finalement de prendre en charge la totalité du financement du projet, de l’étude de faisabilité à l’exécution. Et quand j’ai informé M. Boumédiène de cette évolution, il m’a affirmé que nous pouvons conserver le montant et l’utiliser comme bon nous semble. »
Feu Moctar Ould Daddah termine son propos en ces termes ; « j’ai décidé que ce précieux don de l’Algérie soit le symbole de la solidarité entre les deux pays et c’est ainsi que l’hôpital régional d’Aleg deviendra l’une des plus importantes réalisations accomplies avec cet argent, en plus d’autres projets. » (La Mauritanie contre vents et marées, pp. 481-480).
Et quand la Mauritanie décida, en 1972, de créer sa propre monnaie, l’Ouguiya, cela ce réalisa avec l’Algérie et dans la discrétion la plus totale. Le leader Ahmed Ould Daddah, qui fut le premier gouverneur de la Banque centrale de Mauritanie (BCM), entre 1973 et 1978, a des souvenirs à ce sujet. Il m’avait raconté, par exemple, comment le gouverneur de la banque centrale d’Algérie, à l’époque, feu Mohamed Saghir Moustafa, lui permettait d’accéder à toutes les salles, sans exclusive, et ne lui cachait aucun secret ou information.
Il est de notoriété publique que la Mauritanie a nationalisé la MIFERMA (société de minerai de fer) en 1974, en coordonnant cette opération avec l’Algérie. J’ajoute que l’Algérie avait promu de mettre ses cadres, ingénieurs et experts, à la disposition de la Mauritanie, dans le cas où ceux qui faisaient tourner l’entreprise décidaient de se retirer. Elle avait même envisagé de les faire remplacer, s’il le faut, par des personnels qualifiés acheminés de pays amis. Beaucoup se rappellent, à ce sujet, que l’armée populaire algérienne avait mobilisé des troupes près de la frontière pour parer à toute éventualité.
L’ami est celui qui vole à votre secours en temps de détresse, dit un proverbe populaire. Quand la Mauritanie avait traversé la pire des crises de son histoire moderne, il y a trente ans, l’Algérie avait alors envoyé un bateau chargé de matériel militaire pour lui permettre d’assurer sa propre défense.
Et, pour dire vrai, la Mauritanie est le premier pays à avoir suggéré à l’Algérie de recourir au principe de l’autodétermination pour résoudre les problèmes de la sous-région. L’homme qui était à l’origine de cette initiative, que l’Algérie avait aussitôt adoptée, n’était autre que le grand militant et intellectuel feu Ahmed Baba Miské, à l’époque ambassadeur de la Mauritanie auprès de l’Onu entre 1964 et 1967.
Mais ce qui me rend fier aujourd’hui, en parcourant ces relations fraternelles entre l’Algérie et la Mauritanie, ce sont ces milliers de cadres mauritaniens sortis des universités algériennes et qui contribuent fort efficacement au développement économique, culturel et social de leur pays.
Et je termine en disant que l’accord portant annulation de la dette mauritanienne envers l’Algérie a porté un titre très expressif : « la contribution de l’Algérie au développement économique de la Mauritanie », sans avoir à évoqué cette question pour en faire une propagande ou en tirer un quelconque profit politique, chose que nous considérons comme une indécence entre pays frères.
Il s’agit là d’un bref rappel de choses vécues comme l’âge d’or des relations algéro-mauritaniennes livrées comme réminiscences à l’occasion des commémorations en ce mois de novembre cher aux peuples algérien et mauritanien en ce qu’il comporte comme symboles forts de leur indépendance et liberté.
Écrit par : M. Noureddine Khandoudi, ambassadeur d’Algérie en Mauritanie
(Traduction libre de : SNEIBA Mohamed pour le Courrier du Nord)
Source : Le Courrier du Nord (Mauritanie)