C’était au cours d’un atelier de renforcement de capacités, sous l’égide du Ministère du Travail avec l’appui du BIT. L’éternelle effervescence des rapports tendus entre les pouvoirs publics et certaines centrales syndicales a ressurgi dès la première journée au cours de laquelle, les arguments des partisans du renouveau se sont heurtés à ceux qui évoquent le statu quo.
Pendant deux jours, du 17 au 18 septembre 2019, les membres du Conseil National du Dialogue Social (CNDS) ont participé à un atelier de renforcement de capacité organisé par le Ministère de la Fonction Publique, du Travail et de la Modernisation de l’Administration (Ministère du Travail), avec l’appui du Bureau International du Travail (BIT) Alger dont dépend le bureau de Nouakchott.
Dialogue social et négociations collectives
Institué par décret 2014-156 du Premier Ministre en date du 21 octobre 2014, le CNDS dont les membres ont été nommés par l’Arrêté 085 du Ministre du Travail en date du 5 février 2019, suscite beaucoup d’espoir auprès des acteurs du travail, mais nourrit également le doute chez certaines centrales syndicales qui lui reprochent son faible ancrage institutionnel et le caractère purement consultatif de ses avis.
Le CNDS est composé de 21 membres, sept représentant l’Etat, sept les Employeurs et sept les Travailleurs. Son président a été nommé parmi les personnalités indépendantes. Il est composé d’une Assemblée Générale, d’un Bureau Exécutif et de trois sous-commissions.
En l’absence d’une définition conventionnelle du dialogue social, il est cependant établit que l’esprit de ce dialogue est ancré dans l’histoire et la culture locale, en tant que forme de négociation, de consultation et d’échanges qui se retrouve dans la Jemâa et la Choura, bien avant qu’il ne soit confiné dans des concepts juridiques et institutionnels.
Dans sa présentation sur les objectifs du CNDS, ses règles de fonctionnement, les attentes et les défis liés à sa mise en place, Hamoud Ould T’Feil, Conseiller technique du Ministre du Travail a rappelé quelques conventions de l’OIT ratifiées par la Mauritanie et qui sous-tendent l’assise juridique de ce nouvel organe de régulation sociale. Il s’agit de la Convention 98 sur le droit d’organisation et de négociation collective de 1954, la Convention 87 sur la liberté syndicale et la Convention 144 sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail. Sur le plan national, il a cité le Code du Travail en son Chapitre IV sur la Convention et les Accords collectifs du Travail.
Il a passé en revue les trois grandes négociations collectives qui ont eu lieu en Mauritanie en 2005, 2011 et 2016, lesquelles avaient permis aux travailleurs d’obtenir de substantielles améliorations de leurs conditions, tels que les augmentations successives du SMIG, l’assurance maladie, la formation professionnelle, la révision du statut des dockers, etc., mais aussi aux employeurs de négocier leur fiscalité, coûts de production, endettement, entre autres.
La question centrale de la représentativité syndicale
Parmi les tâches confiées au CNDS, la tenue d’élections professionnelles devant fixer la représentativité syndicale, une vieille revendication que les autorités mauritaniennes n’ont jamais voulu satisfaire conformément à la feuille de route du 6 mars 2017 et en totale violation de la loi 017/2004 portant Code du Travail Mauritanien et fixant les critères de représentativité des organisations syndicales, en ses articles 90 et 265.
Le Conseil est également chargé de la mise en œuvre du Plan d’Action National pour l’Elimination du Travail des Enfants (PANET-RIM) et la réactivation du dialogue social entre les partenaires sociaux interrompu depuis 2016.
Communications et groupes de travail
Les participants ont suivi plusieurs communications, dont trois présentées par Mohamed Kchaou, Expert en dialogue social et administration du travail. Le premier est intitulé « Conditions de réussite du dialogue social au niveau national », le second, « Règles de conduite et recommandations pour le bon fonctionnement des conseils nationaux de dialogue social » et le troisième « Organisation du fonctionnement du Conseil national de dialogue social en Tunisie ».
Invitée d’honneur de l’atelier, la présidente du CNDS Sénégal, Mme NTap Innocence, qui était accompagnée de trois de ses collaborateurs, a présenté les 5 années d’expérience de son pays.
Enfin, les participants ont animé trois ateliers pratiques, sur les « Méthodes et techniques du dialogue tripartite au niveau national », « Les priorités du dialogue social en Mauritanie » et « L’organisation des élections professionnelles en Mauritanie : les difficultés et les solutions ».
Les participants ont formulé et adopté à la fin de l’atelier un certain nombre de recommandations.
Il faut souligner que l’atelier a été ouvert par le Secrétaire Général du Ministère du Travail, Mohamed Mahmoud Ould Deh. Il a indiqué que son département travaille d’arrache-pied pour renforcer la capacité des partenaires sociaux, garantir leurs droits et préserver les acquis afin d’assurer l’équilibre des relations au travail. Il a enfin appelé les participants à profiter pleinement de l’atelier, louant au passage l’appui constant que le BIT n’a cessé d’accorder à son département.
Auparavant, le Président du Conseil, Mohamed Ould Baba, avait salué la présence des trois mandants de l’OIT, le Gouvernement, le Patronat et les Organisations syndicales, estimant que la qualité de leur apport servira certainement au succès de l’atelier.
S’exprimant au nom du BIT, Dr. Halim Hamzaoui, Directeur par intérim de l’OIT à Alger pour les Pays du Maghreb, dont la Mauritanie, a remercié les autorités mauritaniennes pour l’organisation de cet atelier dont l’objectif selon lui, est de renforcer la capacité des membres du Conseil National du Dialogue Social et améliorer leur expertise.
Cheikh Aïdara
Source : L’Authentique (Mauritanie)