Biram, suite à sa passe d’armes, avec Ould Diay « Je ne tergiversai pas, je ne reculerai pas( …) l’Assemblée nationale doit refléter(…)les préoccupations des populations mauritaniennes »

 L’Assemblée nationale a connu  ces derniers jours-ci une forte secousse avec des échanges nourris entre le député Biram Dah Abeïd, président de IRA Mauritanie, Cheikh Ould Baya, président de l’Assemblée nationale et le ministre de l’Economie et des Finances, Mokhtar Ould Diay. L’assemblée  connue pour  son calme plat et son passé trouble  de chambre d’enregistrement a été ébranlée, lors de  plénières épiques.

Ces passe d’armes alimentent les  conversations et font la une des médias. Suite à son altercation avec l’argentier du pays, le mercredi 23 janvier, le député abolitionniste a, au travers  d’une conférence de presse, tenu, ce jeudi, au siège de Sawab à rendre compte au peuple de ces joutes oratoires.

Dans son liminaire, Biram Dah Abeïd a expliqué que «  les plénières sont des occasions censées permettre aux députés de remodeler, d’accepter ou de refuser les projets de lois proposés par le gouvernement au pouvoir legislatif. Hélas, regrette-t-il, nous sommes confrontés à une habitude très résistante. Les ministres de l’exécutif de Mohamed Ould Abdel Aziz sont habitués à faire leur prestation devant une assemblée de députés acquis d’avance, des députés qui acceptent non seulement de s’aplatir mais aussi des députés qui font les éloges des ministres en pleine assemblée ou qui les  paraphrasent, qui se plient, se déshonorent devant ces ministres, qui adoptent un profil bas et qui capitulent devant les attaques qui sont préparées d’avance ; des attaques qui sont la norme de tout député qui fait la critique de l’ignominie et qui a un mandat donné par le peuple ».

  Chemin tortueux des sous

Mercredi, le ministre  de l’Economie et des finances est venu, relate Biram, nous proposer de faire table rase de 194 miliards d’Ouguiyasnque son gouvernement a pris de la BCM, des ponctions régulières, des  ponctions illégales, des ponctions injustifiées, des ponctions d’une manne financière qui allaient on ne sait où. Le ministre est venu imposer avec son gabarit envahissant, avec son discours méprisant, mensonger, qu’il a emprunté à son chef, son mentor Mohamed Ould Abdel Aziz. Il est venu nous imposer de nous taire, d’accepter, de voter et d’entériner. Bien sûr, poursuit Biram, je me suis dressé contre lui avec quelques uns de mes collègues en lui disant que nous ne sommes pas prêts à être une chambre de blanchissement des crimes économiques orchestrés par le pouvoir exécutif. Que cette manne financière qui a été ôtée à la BCM au détriment de  l’Etat, du contribuable et du peuple mauritanien doit etre  justifiee, que notre devoir est de réclamer la vérité et la transparence sur ce qui s’est passé. Où est allé cet argent, comment il a été dépensé. J’ai abondé dans ce sens en réclamant des comptes au ministre. J’ai dit que ce n’est pas la première fois qu’on entend que la BCM est devenue un guichet et une mallette pour le chef de l’Etat et ses collaborateurs. On avait appris que l’Arabie Saoudite avait fait un don de 50 millions de dollars à la Mauritanie. La rumeur continue à courir que le Chef de l’Etat a empoché cette somme sans aucun justificatif. J’ai réclamé au ministre d’éclaircir ce qui tourne autour de ces 50 millions de dollars, de démentir la rumeur. Je lui ai dit que cette prétendue guerre contre la gabegie, contre les prévaricateurs est une guerre qui a été astreinte à un champ comportant certaines perceptions régionales du trésor, certaines ambassades mais pas toutes. J’ai dit, chiffres à l’appui, narre le dirigeant abolitionniste, que malgré l’encre qui a été versé et les salives, les aboiements du chef de l’exécutif et de ses ministres, on a vu que le total de ce qu’ils prétendent avoir déniché ou trouvé comme gabegie ne fait pas 5 milliards d’UM bien que des fonctionnaires subalternes du trésor public sont en prison ».

Par la suite, Biram  s’est demandé qu’est ce qui représente ces 5 milliards dans ces fortunes qui ont poussé dans un clin d’œil et dont les détenteurs sont les clients, les proches du régime qui les protège dans leur rôle prédateur de brasseurs  de centaines de milliards d’UM volés du trésor public.

Sélectivité des  investigations

Sur la lancée, le « député du peuple » comme il se proclame s’est interrogé sur la sélectivité des  institutions d’investigation qui, d’après lui, n’ont pas concerné les services de la présidence, de la primature, du ministère des finances, les directions des douanes et des impôts, des audits de la BCM. Le tribunal contre la corruption n’a, dit-il statué que sur deux dossiers. Celui du sous officier de la garde cumulant 30 ans de service condamné à 6 ans de prison et une amende de 6 millions Le second est celui de  l’ex directeur de l’ENER Ousmane Wone  incarcéré depuis une année et demi en prison. On lui impute 26 millions  sur des milliards d’Ouguiyas qu’il gérait. «  Ces jugements et ces investigations sont sélectifs. Le pouvoir circonscrit exprès  les investigations et les traductions devant la justice loin des milieux sensibles, proches du régime qui fomentent la grande  délinquance financière », fulmine Biram.

« Le ministre non habitué à cette rigueur, à ces paroles hauts en couleurs, a répondu, déplore Biram,par des  invectives, des insultes .Je n’ai pas répondu et je ne répondrai jamais à certains élus qui sont dans l’assemblée agissant comme de petits soldats pour les ministres de l’exécutif qui les aident à insulter et participentnégalement, au dénigrement des députés. Je circonscris mes attaques bien étayées, bien justifiées, pertinentes aux programmes des ministres, à leurs projets de loi, aux zones d’ombre se trouvant dans lesdits projets, au manquement et à la transparence et  au respect du peuple mauritanien, cadre-t-il. L’exclusion, la faillite du bien être social mauritanien frappe sans distinction tous les mauritaniens. Il est de mon devoir d’en parler et de défendre le peuple  becs et ongles’devant ces fossoyeurs de l’économie, de la justice, de l’indépendance législative et judiciaire », tonne-t-il sous des tonnerres d’applaudissements de ses militants.

Pour Biram, le ministre de l’Economie et des Finances n’a pas trouvé de « réponse pertinente et adéquate à ces interrogations» et a abondé dans «  la langue de bois, dans le mensonge, en abusant l’opinion. Dans sa réponse, le ministre a déclaré, selon Biram  que la majorité de cette somme a servi  et  est allée dans les transactions  dans les  taux de change des chancelleries …Ce qui est extrêmement  vague. Lorsqu’on lui  a  demandé, il nous a dit que c’est sur plusieurs années ; pas  uniquement sur leur mandat à eux, mais ceux des  régimes précédents, il y a  eu une accumulation. Mais tout ceci, reprend Biram, il l’a dit sans vouloir  donner de preuves et  sans entrer dans les détails .Dans cette conjoncture, cette attitude  qu’ils veulent imprimer en voulant faire passer par force ce projet de loi vise à alourdir le fardeau pour les populations  largement éprouvées et que c’est contradictoire avec leurs déclarations et leur combat contre la gabegie.

Face à ces errements, Biram reste catégorique. « Je ne tergiversai pas, je ne reculerai pas et je persiste et signe que l’Assemblée nationale doit refléter les suggestions, les critiques, les préoccupations des populations mauritaniennes. Ces préoccupations seront dites  de manière raisonnable, responsable, conforme au règlement de la chambre.

Police de l’Assemblée

Sans sommer le ministre de présenter ses plates excuses, le président de l’Assemblée nationale a affirmé du haut de son perchoir que Ould Diay avait tort, en  provoquant. Biram note cette sortie comme une position à louer » mais, elle n’était pas suffisante, de son avis. «Le président de l’Assemblée nationale se devait, en plus de ses remarques, arrêter le ministre et lui intimer l’ordre de s’excuser immédiatement sinon de sortir de la salle des honorables députés ou retirer ses propos. Mais il n’a pas fait ça  et c’est pourquoi, Biram regrette le président de l’Assemblée nationale n’est pas allé jusqu’au bout de son rôle de police de l’Assemblée et de premier responsable. C’est pourquoi j’étais  obligé de répliquer au ministre pour le remettre à sa place. Il a attaqué  les responsables du peuple dans leur passé noir me citant.Il est dans l’école de son chef, des mal éduqués. Je lui ai dit qu’il a bien personnifié ce qu’il représente, lui en tant que porteur de valise de la corruption, de la gabegie, de la dévalisation de ce pays ».

Biram prévient : « les ministres  qui vont désormais venir, se pavaner devant les députés pour les mépriser et les regarder d’un haut doivent à partir de maintenant savoir au moins que il y a des députés redevables au peuple qui ont un mandat délivré par le peuple. Nous ne dommes pas comme d’autres députés dont les mandats ont été arrachés par le mot d’ordre et les remontrances du chef du pouvoir politique à travers l’intimidation des populations, l’écrasement des grands électeurs , la corruption et l’achat des consciences…Moi, Biram Dah Abeid j’ai eu mon mandat  lorsque j’étais entre quatre murs, en prison. Je suis redevable au peuple parce que ce sont les maures, haratines, les peulhs, Bambara, soninké et wolof, un peu partout à Néma, à Nouadhibou, à Bir Moghrein, à Ndiago, à Nouakchott, Rosso, Kaédi un peu partout qui ont décidé de m’amener au parlement .Ce sont  des  riches, des pauvres, des noirs, des blancs, qui se reconnaissent dans mon discours, dans mon engagement et ma capacité à les défendre à tenir tête à l’exécutif dans l’hémicycle. Je dois assumer. Donc, les ministres doivent se détromper. Ils doivent compter avec moi, avec ma détermination, ma verve, ma rigueur ma capacité de réplique…Je les pousserai jusqu’au bout. Aucun projet de loi ne passera sans escarmouches, sans passe d’armes, sans bataille dans l’Assemblée».Voilà, la guerre est annoncée.

Compte rendu THIAM