L’éditorial de La Nouvelle Expression : A monsieur le Président, Mohamed Abdel Aziz

L’éditorial de La Nouvelle Expression : A monsieur le Président, Mohamed Abdel AzizC’est avec un intérêt particulier, Monsieur le Président, que je vous écris directement par le biais de cet éditorial.

La substance de mon écrit est pour moi, certainement sans être exhaustif, la somme des faits qui vous ont transformé ou révélé votre autre personnalité. Autre personnalité de cet homme qui se fait nommer « Le Président des pauvre » venus remettre de l’ordre dans un pays à terre.

Mr le Président, je le fais, même si j’ai l’intime conviction que c’est déjà tard et que c’est aussi trop prétentieux de ma part pour vous écrire en essayant de vous expliciter le labyrinthe dans lequel les laudateurs professionnels vous ont conduit comme ils l’avaient fait à Maaouya.

Tard parce que vous êtes arrivé au point de non retour. Tard parce que la frustration du peuple est grandement perceptible. Tard parce que les laudateurs ne vous laisseront pas écouter ni entendre une autre voix. Ces danseurs du ventre que vous connaissez pourtant bien vous ont pris en otage d’autant plus facilement que vous êtes otage de votre vision de la gestion de la Mauritanie. Tard, surtout pour le Président élu qui n’hésite point à clamer, urbi et orbi, qu’il «n’est pas fait pour démissionner ni perdre ».

Dans votre perception ou vision de la vie, le mortel que vous êtes, ne peut selon vous jamais perdre. Et les flagorneurs vous applaudissent pour cela. Voilà pourquoi mon écrit vient tardivement car vos souteneurs, le jour, et dénigreurs la nuit, me sauteront sûrement au cou pour me vilipender et couvrir d’insanités dignes des incultes et des tricheurs sans sophistication car sans honte ni retenue. Votre mentor Ould Taya en sait quelque chose.

Mais je vous écris quand même pour l’histoire. C’est un devoir et un droit pour tout citoyen d’interpeller la plus haute institution de la République pour parler des problèmes du pays.

Monsieur le Président, votre chance aujourd’hui, oui c’est une chance, c’est qu’aux cotés de votre mentor Maaouya vous avez vu et entendu ceux qui vous prêtent tous les attributs d’un super homme et même en blasphémant parfois. Vous le savez, ils ont fait la même chose à Maaouya qu’ils n’ont pas hésité à trahir le jour même de sa chute. Et vous vous prêtez, pourtant, au même jeu. Pourquoi ? Vous savez pourtant que Maaouya a connu une chute brutale et surprenante pour lui et cela par le cercle de confiance qui lui était le plus proche dont vous-même. Il avait connu une longévité de 22 ans à la merci des flagorneurs et autres applaudisseurs sans foi ni vergogne. On falsifia l’histoire et on attribua même des écrits islamiques anciens à son père.

Par leur mensonge et hypocrisie noire, ils ont convaincu Maaouya qu’il était un élu de Dieu, irremplaçable car indéboulonnable. Vos amis et vous les ont démentis. Et les soutiens de Maaouya et ses applaudisseurs d’hier dont vous connaissez la religion sont devenus, aujourd’hui, les plus écoutés et les plus assidus à votre cour aujourd’hui.

Monsieur le Président, si le pourvoir de votre mentor est trop lourd en passif, votre régime à vous, qui est le prolongement de l’autre que vous avez soutenu plusieurs années durant, continue de précipiter la Mauritanie dans les bas-fonds du danger et des lendemains incertains. Les Mauritaniens, hagards et ahuris, cherchent à comprendre pourquoi vous ne voyez pas et n’entendez pas et surtout pourquoi vous acceptez de prendre la même voie que celui que vous avez viré du pouvoir.

Monsieur le Président, le peuple est frustré. Les hommes d’affaires désabusés car sucés. Et les nouveaux riches, dans une insolence absolue, sont sans consistance ni ambition pour la Mauritanie mais prompts, avec leur bataillon politique, à précipiter votre chute.

Ces individus que vous avez enrichis veulent tout pour eux seuls et aidés de leur position dominante (grâce à vous), ils influencent les cercles de décision du pouvoir. Ils polluent et asphyxient le champ d’action des potentiels concurrents. Monsieur le Président, d’aucuns soutiennent que c’est avec votre bénédiction, car dit-on beaucoup de ces nouveaux riches ne sont que des prête-noms et que c’est vous le véritable homme d’affaires : c’est-à-dire leur chef.

Monsieur le Président, vous n’ignorez pas le secret de longévité d’un pouvoir digne de ce nom : c’est celui qui sait faire le discernement, qui sait distinguer ses biens et les biens du peuple. Le choix des Hommes, l’humilité, l’écoute et le sang-froid sont aussi des facteurs essentiels voire déterminants.

Monsieur le Président, lesquelles de ces qualités pouvez-vous revendiquer aujourd’hui alors que vous êtes cerné par les troubadours qui vantent vos mérites pour mieux profiter de votre pouvoir ? Les mêmes troubadours qui avaient chanté la gloire de Maaouya qu’ils n’ont pas hésité à qualifier de tous les noms d’oiseaux au lendemain de sa chute. Ne redoutez-vous pas que la mauvaise langue et le mauvais œil de ces gens précipitent sur vous le même sort que celui arrivé à Ould Taya ?

Ne savez-vous pas, Monsieur le Président, que même les plumitifs anonymes qui n’hésitent pas à nous insulter, viennent nous voir avec le même discours éculé : « Il faut nous comprendre, nous le faisons sans conviction, nous savons que ce régime est fini mais il faut faire avec car ces gens ne veulent rien entendre ni comprendre ».

Voici Monsieur le Président vos soutiens. Ils le sont devant vous pour vous faire entendre ce que vous voulez alors qu’au même moment, ils préparent leur discours pour amadouer votre successeur.

Vous n’avez pas la moindre excuse si ces tristes sirs vous plaquaient demain, car les connaissez assez pour savoir que cela a toujours été leur nature.

Avec toute ma considération, Monsieur le Président ?

Camara Seydi Moussa
Source : La Nouvelle Expression