Biram de retour au pays par le Guidimakha : Pourquoi fait-il si peur ?

Biram de retour au pays par le Guidimakha : Pourquoi fait-il si peur ?  Le retour de Biram suscite une peur bleue des autorités qui font montre d’un cafouillage sans précédent. Le leader abolitionniste est revenu dimanche 8 mai en Mauritanie. Pour marquer cet acte, le président de IRA Mauritanie a choisi l’arrondissement de Gouraye, frontalier de Bakel (Sénégal) pour entamer une tournée en pays soninké destinée à combattre les dernières poches de l’esclavage.


Ce fut le branle-bas de combat. Grosse panique des autorités qui versent dans le cafouillage. Avec un excès de zèle frisant le dédain, le gouverneur de la région, Diallo Oumar Amadou a sillonné toutes les villes et les villages pour menacer les communautés, les villageois, les associations et coopératives qui auront « l’audace » d’accueillir le dirigeant d’IRA.

Les autorités régionales leur auraient signifié que la « prison sera la sanction immédiate prévue pour chaque personne ou groupe qui accepterait d’accueillir Biram sous son toit. Aussi tous les militants qui ont opposé un refus ont-ils été arrêtés et détenus à Sélibaby, ceinturée par les forces de sécurité empêchant à tous non ressortissants du Guidimakha d’y poser pied.

Les cadres et notabilités de cette région au sein des rouages de l’Etat ou du parti au pouvoir auraient adressé une doléance solennelle au chef de l’Etat de ne « commettre l’erreur d’autoriser le leader abolitionniste à faire son périple dans le Guidimakha. « Ceci à coup sûr occasionnerait, à leurs yeux la victoire du non au référendum ».

Une tournée avortée

Les autorités régionales en ont décidé autrement. Ainsi toute la zone frontalière avait été quadrillée par un important déploiement sécuritaire. Le pouvoir a donné beaucoup de publicité et d’impact au passage dans cette région de Biram.

Ce qui lui fait dire que « le déploiement des forces sécuritaires mais aussi la mise en service des aboyeurs et laudateurs du système cooptés parmi l’élite et cadres des populations locales chosifiées et méprisées par un pouvoir monocolore afrophobe et réfractaire à toute égalité entre races, des droits de l’homme ou de démocratie ».

Traitement spécial

A sa descente de la pirogue, Biram est accueilli par le commissaire de police de Gouraye. Après les formalités d’usage, il est prié de s’asseoir et d’attendre les instructions. On lui demandera entretemps s’il souhaitait rencontrer les autorités administratives locales (le préfet de Sélibaby et le chef d‘arrondissement de Gouraye) pour discuter de la situation.

Il donnera son accord de principe. Plus tard, les autorités changent d’option face à l’affluence monstre des militants d’IRA. Elles décident d’escorter le véhicule du président d’IRA par la gendarmerie jusqu’aux confins du Gorgol où l’attendaient des militants de IRA refoulés la veille.

A Boghé où il séjourne le lundi (8 mai), Biram Dah Abeïd et sa délégation ont été sommés par le commissaire de police de la ville, Henoune Ould Sid’Elemine de quitter la maison d’un de ses proches Mohamed Ould Mbout, dans le quartier de Nioly.

Le leader abolitionniste opposera un niet catégorique à cette sommation indiquant que son séjour du reste privé, ne concernait aucunement les autorités. Le commissaire fera finalement un tri faisant sortir les « autochtones » non sans rappeler l’interdiction de tout rassemblement non autorisé par les autorités régionales.

« L’ordre vient d’en haut », dira-t-il. Une mesure qui a suscité l’étonnement de la délégation. Le commissaire était accompagné d’un peloton de policiers cagoulés et armés jusqu’aux dents.

Biram sera aussi déclaré persona non grata à Aleg où des policiers avaient été massés tout au long du Carrefour. C’est le directeur régional de la sûreté, Mohamed Aly Ould Malaïnine qui lui notifiera la mesure. Contre mauvaise fortune, bon cœur la délégation abolitionniste rejoindra Nouakchott où un comité d’accueil constitué de policiers aussi les attendait à l’entrée de la ville.

Lors d’une conférence de presse, Biram estime que « le bilan de sa tournée européenne et américaine est visible dans l’état d’esprit des autorités, du pouvoir en place qui est troublé par un retour pacifique, légal avec toutes les démarches digne d’une personne qui souscrit à la compétition légale des idées, des opinions et des stratégies. Le pouvoir en place accuse le coup de l’impact de la cohésion et de l’élargissement beaucoup plus grand d’IRA Mauritanie à l’intérieur du pays ».

Pour Biram Dah Abeïd, le régime de Mohamed Ould Abdel Aziz reste foudroyé par les deux grandes et dernières victoires d’IRA contre lui à l’intérieur du pays : lors de sa sortie de prison qui a tourné, dit-il, au plébiscite, le 17 mai 2016 matérialisé par un concert de congratulations, de soutiens. Mais aussi le pouvoir a été affaibli diplomatiquement par les distinctions et reconnaissances au niveau international.

Biram a balayé d’un revers de la main tout changement de discours de son mouvement ou d’option: « Ira reste sur la même lancée et restera sur les mêmes principes. Les priorités changent quand les urgences ont changé(…) L’action de IRA a gagné du terrain, de la compréhension au sein des larges cercles (..) Ira est moins esseulée, plus soutenue donc plus sereine et magnanime. Mais le fond de nos idées reste le même. Bien sûr, on n’a jamais épousé la violence », dit-il.

Relativement aux défections au sein de son organisation, Biram indiquera que IRA s’est habituée au fil des années à perdre « quelques personnes fraîchement sorties de prison. Ceci n’a aucun rapport avec le fonctionnement de IRA, ni la ligne du mouvement. Ce changement d’attitude est en rapport direct avec les effets de la prison, de l’idée épouvantable d’y retourner ou d’y rester ».

Compte rendu Thiam Mamadou

Source : Le Calame (Mauritanie)