TRIBUNE. Coupe du monde féminine de foot : « Non à l’apartheid sexiste en Iran et en Arabie saoudite »

« Devons-nous fermer les yeux pour ne pas déplaire à ces riches Etats pétroliers, théocratiques et autoritaires ? » : la Ligue du Droit international des Femmes lance une pétition à l’occasion du Mondial féminin 2019.

Dans de nombreux pays du monde, les femmes ont un accès limité à l’exercice du sport. Mais dans certains pays, comme l’Iran ou l’Arabie saoudite, il leur est tout simplement interdit de pratiquer la discipline qui leur convient.

C’est une forme d’apartheid. Il faut en finir avec ces pratiques moyenâgeuses et soutenir le combat des femmes qui luttent dans ces pays. La Coupe du monde de football féminin, qui doit se jouer en France, du 7 juin au 7 juillet, est l’occasion de les aider. Il faut profiter de cette caisse de résonance planétaire.

Dans ces deux pays, malgré la répression, des résistances se manifestent. Des hommes iraniens, sous le hashtag #MeninHijab, soutiennent les femmes qui veulent se soustraire au port du voile et, plus généralement, luttent pour leur donner accès aux mêmes droits. Il faut encore se couvrir de la tête aux pieds pour pratiquer son sport. Bien que l’Arabie saoudite ait accepté récemment l’accès des stades aux femmes, comme spectatrices, elle maintient l’interdiction de la pratique du sport et de l’éducation physique pour les filles dans les collèges publics.

Des pratiques honteuses

Fait scandaleux : la participation de ces deux pays aux compétitions internationales est conditionnée à la non-mixité des lieux et compétitions. Les sportives qui contreviennent à ces règles se retrouvent poursuivies, harcelées.

  • Sadaf Khadem, la première boxeuse iranienne de l’Histoire, est en ce moment même menacée d’emprisonnement, ainsi que son entraîneur, pour avoir osé pratiquer son sport dans une tenue normale, lors d’une compétition, le 13 avril.
  • Shiva Amini, star du football iranien, vient d’être radiée à vie de l’équipe nationale pour avoir disputé une partie amicale, sans voile et en short, avec des garçons, lors d’un voyage privé en Italie et en Suisse.
  • Dorsa Derakhshani, championne d’échecs iranienne, a été sanctionnée pour avoir disputé des compétitions sans porter de voile, en dernier lieu au Tradewise Gibraltar Chess Festival de février 2017.

Devons-nous fermer les yeux pour ne pas déplaire à ces riches Etats pétroliers, théocratiques et autoritaires ?

Hélas, les pays occidentaux, sous la pression islamiste, acceptent d’accommoder les règlements internationaux à ces pratiques honteuses. Exemple : la levée de l’interdiction du port du hijab fait débat actuellement entre les fédérations internationales et nationales, en fonction des intérêts financiers des uns et des autres. Il faut en finir avec les atermoiements et trancher clairement en fonction d’une valeur universelle : le sport est un droit pour tous, sans distinction de couleur, de classe sociale ou de sexe.

Seulement 32 % des filles pratiquent un sport dans les REP

Or, ce combat ne se joue plus hors de nos frontières, mais déjà dans nos banlieues. Les quartiers urbains sensibles révèlent une sous-représentation des filles en raison de freins culturels spécifiques (exigences relatives à l’habillement, refus de la mixité, port du voile imposé). Ainsi, aujourd’hui, 32 % seulement des jeunes filles pratiquent un sport dans les zones REP (réseaux d’éducation prioritaire), contre 51 % en dehors. Si nous détournons le regard, le sport comme facteur d’émancipation, de liberté, va se réduire en fumée. Si nous laissons le modèle patriarcal, issu de l’islamisme politique, imposer sa loi, alors le communautarisme aura gagné.

Par le passé, l’Afrique du Sud fut exclue durant 30 ans de la famille olympique pour cause d’apartheid racial, condamné par les Nations unies. La « ségrégation » sexiste ne mérite-t-elle pas le même traitement que l’apartheid racial ? Les femmes seraient-elles des sous-hommes ? La France, pays des droits de l’Homme, durant un mois, sera le centre du monde du sport féminin. C’est le moment d’agir.

Nous exigeons que des sanctions sportives soient prises à l’encontre de ces deux pays. Nous demandons que l’article 50 de la Charte olympique, imposant la neutralité religieuse et politique, soit appliqué partout dans le monde. La condamnation de la ségrégation sexuelle par les instances chargées du sport, et le refus dorénavant de toute dérogation, doit être la règle commune, conformément à la charte internationale de l’UNESCO sur l’éducation physique et sportive. Nous appelons tous ceux qui croient aux valeurs universelles du sport et à l’égalité hommes-femmes à nous rejoindre dans ce combat.

 

Jacqueline Eustache-Brinio, sénatrice LR du Val-d’Oise

Annie Sugier, présidente de la Ligue du Droit international des Femmes (fondée avec Simone de Beauvoir)

Laurence Taillade, essayiste, éditorialiste,

Me Linda Weil, avocate internationale, première à avoir poursuivi les excisions en France.

 

Source : l’Obs