La question de l’esclavage est une affaire qui divise les Mauritaniens. Le débat n’est plus maintenant de savoir si ce phénomène particulièrement abject se manifeste en pratiques ou en séquelles.
Aujourd’hui, il est surtout question de savoir jusqu’à où les autorités nationales et la communauté internationale sont elles prêtes à aller jusqu’à l’éradication totale d’une problématique qui a été tellement instrumentalisée au point qu’elle constitue une véritable menace à la cohésion sociale.
De 1981 avec la promulgation par le CMSN de l’ordonnance 034/81 abolissant l’esclavage à 2017 avec de nombreuses dispositions dont des lois le criminalisant dont la plus emblématique est la loi 031/2015 qui l’érige en crime contre l’humanité et des tribunaux spéciaux chargés du traitement de ses dossiers entre autres, la problématique ne semble pas totalement maîtrisée à cause d’un manque manifeste d’une véritable volonté politique qui puisse faire face courageusement aux lobbies de féodaux et d’obscurantistes encore nostalgiques d’un système social dont les fondements ne souffrent d’aucune entreprise de délégitimation ni de déconstruction.
Pourtant, la feuille de route composée de 29 points que la Mauritanie a paraphée avec la rapporteuse spéciale Gulnara Chahinian en 2015 en son point 22 confère à l’institution religieuse la mission de cette délégitimation et déconstruction. Pour cela, les Oulémas (Association) et les institutions religieuses officielles (Haut Conseil de la Fatwa, Imamat Central de Nouakchott…) devraient entreprendre de vastes campagnes de sensibilisation à travers tout le territoire national pour expliquer clairement aux citoyens les tenants et aboutissants de cette question en plus de la prononciation de Fatwas sans équivoque délégitimant l’esclavage.
Comme ils l’ont très bien fait pendant les campagnes de sensibilisation sur le VIH ou contre les pratiques néfastes comme les mutilations génitales féminines (MGF) notamment l’excision et autres. Depuis que la question est à l’ordre du jour, certaines organisations de la société civile comme SOS Esclaves ou IRA en font la principale thématique de leur combat des droits humains.
Elle s’est imposée pendant tout ce temps aux différents régimes qui l’ont traitée selon les contextes de leur passage au pouvoir. Les partis politiques en font un thème incontournable. La presse en use et en abuse selon les circonstances. Mais les Oulémas ne jouent pas leur partition.
Très rarement quelques très timides sorties ajoutent à la confusion générale, alors que dans un pays entièrement islamique, le point de vue on ne peut plus clair de l’institution religieuse sur la question aurait certainement permis de dissiper tous les doutes et booster les efforts des militants antiesclavagistes de tout bord pour aider à éradiquer enfin les restes même épisodiques d’un phénomène aussi abject que l’esclavage .
Source : Le Calame (Mauritanie)