Abécédaire de l’année 2016 en Mauritanie : 2016, mouvementée

Abécédaire de l’année 2016 en Mauritanie : 2016, mouvementéeL’année qui vient de s’écouler a fait des heureux et des malheureux, suscité joies et peines. Elle a fait rire et fait pleurer. Elle a concrétisé bien des espoirs et en a tué autant. Nous vous proposons un abécédaire résumé des principaux événements qui ont émaillé 2016.

A Comme Aziz.

A chacune de ses sorties publiques, le président de la République a fait le buzz. En prenant tout le monde de court quand il annonçait qu’il ne se représenterait pas pour un troisième mandat en 2019, alors qu’il affichait un silence complice quand ses partisans l’appelaient à se maintenir encore au pouvoir, en annonçant récemment qu’il continuerait à faire de la politique au terme de son second mandat.

En lançant le dialogue national dit inclusif auquel n’a pas participé l’opposition démocratique. En annonçant l’organisation d’un referendum constitutionnel portant entre autres, sur la suppression du Sénat, le changement du drapeau et de l’hymne national…

Le chef de l’Etat a aussi marqué l’année écoulée quand il a maintenu en prison des défenseurs des droits de l’homme, malgré les appels de libération lancés par les partenaires au développement et par les ONGs des droits de l’homme , ou quand il a engagé une opération « Mains propres » qui a conduit en prison près d’une vingtaine de hauts fonctionnaires des finances publiques.

B Comme Bolloré.

L’affaire Bolloré s’est invitée tard dans le pays, elle n’en reste pas pour le moins importante. Il s’agirait d’une tentative de corruption que cet homme d’affaire français –Bolloré– aurait menée auprès du président de la République, à qui, il aurait proposé 10 millions d’Euros contre l’octroi d’une licence portant sur la gestion exclusive du Port Autonome de Nouakchott.

L’affaire a été révélée par le chef de l’Etat en personne qui s’est confié à des sénateurs en décembre dernier. Depuis, l’opposition comme les acteurs de la société civile se sont saisis de cette affaire réclamant plus d’informations à propos, et surtout l’ouverture d’une enquête.

C Comme Culture.

Ce sont d’abord les frasques et les bourdes du ministre de la Culture Mohamed Lemine Ould Cheikh qui ont marqué l’actualité. Ministre chargé des Relations avec le Parlement, l’homme qui s’est retrouvé par la suite au ministère de la Culture, s’est d’emblée illustré quand il « a forcé » pour emporter avec lui la charge de Porte parole du gouvernement… sous prétexte que sa remplaçante ne s’exprimait pas en arabe.

Tonitruant et imprévisible, il embarquera à maintes reprises le gouvernement, notamment quand il défendait l’idée d’un troisième mandat au profit du président de la République, soutenant au passage que le texte de la constitution ne devait pas peser devant cette perspective, ou quand il mentait en annonçant le licenciement par la TV publique du Burkina, d’une journaliste burkinabé qui avait accordé une interview à Biram Ould Abeid

Certes, comme tous ses cinq derniers prédécesseurs, le ministre a organisé « son » festival. C’était celui de Ouadane qu’il a réussi à transformer en festival de la « communauté maure ». En matière d’expression culturelle, ce fut l’impasse dans le pays : mise à l’écart d’artistes negro-mauritaniens, refus systématique d’accompagner les jeunes artistes, blocage des activités de l’Association des artistes mauritaniens…

D Comme Daddah.

Le RFD, le parti d’Ahmed Ould Daddah a quitté le Forum de l’opposition pour mener son propre combat contre le régime en place, un combat qu’il a voulu d’une agressivité poussée, notamment contre la personne du président Ould Abdel Aziz. N’étant pas représenté à l’Assemblée nationale pour avoir boycotté la dernière consultation électorale, ce parti, reste visiblement l’un des plus grands partis de masse du pays. En témoigne le meeting qu’il a organisé en juin dernier et qui a enregistré le record d’affluence de l’année écoulée.

Mais si le parti a tant fait parler de lui cette année, c’est bien du fait du document inédit qu’il a publié, portant sur la critique chiffrée de la gestion économique du pays par le Régime en place.

E Comme Education.

La réforme de l’éducation engagée il y a quatre ans, a procuré des résultats pires que toutes les années précédentes, avec 12% d’admis au baccalauréat, 7% au brevet et 16% au concours d’entrée en première année secondaire. Dans les universités, le niveau des étudiants est des plus bas, et les rares d’entre eux qui terminent leur cursus, sont venus grossir les gigantesques rangs des chômeurs qui traînent dans le pays.

Alors que les langues arabe et française continuent d’être mal enseignées – peu maitrisées par le corps professoral- les langes nationales n’ont pas été intégrées à l’enseignement.

43% des garçons en âge de scolarisation ont été à l’école alors que dans la même catégorie, seules 18% des filles se sont retrouvées en classe.

F Comme FNDU.

En rejetant la proposition du dialogue inclusif proposé par le régime, le Forum national pour la démocratie et l’unité (FNDU) a porté un coup fatal au processus de pacification de la scène politique. Jamais les relations entre ce pôle de l’opposition dite radicale et le pouvoir en place, n’ont été si tendues et jamais l’avenir de ces relations n’a été aussi incertain.

Le regroupement dans lequel se retrouvent des formations politiques et des formations de la société civiles, a marqué par la cohésion dans ses rangs, sa stabilité et la cohérence de son discours, malgré les tentatives de déstabilisation concoctées par le Régime en place ou par des partis satellites.

Tirant les leçons des péripéties vécues par les regroupements politiques qui l’ont précédé, le FNDU, s’est imposé aujourd’hui comme un incontournable interlocuteur sur la scène politique.

G comme Gambie.

La situation de crise qui secoue la Gambie depuis que le président sortant a rejeté les résultats de la dernière présidentielle, a déjà de lourdes conséquences sur la Mauritanie. Lesquelles pourraient être plus importantes si une solution n’est pas trouvée de sitôt.

Représentant la communauté étrangère la plus importante dans ce pays avec près de 600.000 personnes, les Mauritaniens qui y contrôlent le commerce et l’industrie, ont peur pour leur vie et pour leurs biens. Ils sont déjà quelques 200. 000 qui auraient quitté la Gambie pour revenir au bercail s’ils n’ont pas élu domicile dans un pays de la sous région, le temps de voir l’orage passer.

La Gambie étant le pays étranger qui abrite le plus de ressortissants mauritaniens, intéresse la Mauritanie dans tout ce qu’il vit. C’est ce qui explique la présence il y a quelques jours à Banjul du ministre secrétaire général de la Présidence de la République. C’est aussi ce qui explique le déplacement effectué dans ce pays par le président de la République depuis ce lundi.

H Comme Haratines.

Lors de sa dernière sortie à Néma, le président de la République avait soulevé la question de la procréation haratine, invitant, par des expressions peu voilées, les membres de cette communauté à réguler les naissances, pour sortir leurs enfants de la pauvreté.

En fait, les Haratines forment la communauté la plus nombreuse dans le pays avec plus de 50% de la population. C’est chez eux qu’il y a plus de chômeurs, de misérables et de laissés pour compte. Pauvres bien avant 2016, ils l’ont été davantage au terme de cette année.

Les batailles menées par les défenseurs des droits de l’homme, pour leur meilleur être n’ont pas servi puisque ponctuelles et sans impact. Le dernier né de ses défenseurs, le Manifeste pour leurs droits politiques, économiques et sociaux, créé en 2013, bat de l’aile, surtout, depuis le décès de son président Ould Hamody. Circonscrivant ses activités à quelques communiqués « lapidaires » et quelques marches, l’Organisation ne compte à son actif, aucun acte concret qui participe dans l’émancipation haratine.

I Comme Istiqlal.

La sortie de fin décembre dernier du secrétaire général de cette formation politique marocaine qui a revendiqué la marocanité de la Mauritanie, ne cesse encore aujourd’hui de faire des vagues.

Les relations entre les deux pays, « assez froides » ont été secouées à telle enseigne que les deux chefs d’Etat ont échangé au téléphone, dissipant tous les malentendus. Finalement les propos du député marocain n’engageaient que sa personne.

Depuis, les relations entre les deux pays ont été relancées qui devraient être consacrées, à terme, par la désignation d’un ambassadeur mauritanien au Maroc ( poste vacant depuis trois ans), la tenue de la grande commission mixte entre les deux pays, et éventuellement, la visite du Roi Mohamed VI en Mauritanie.

J Comme Jihadisme.

Avec l’affaire Ould M’Khaïttir (du nom du jeune forgeron qui a pris la défense des siens en commettant un blasphème contre le Prophète Muhammed PSL), l’intégrisme religieux a fait montre de toute sa puissance dans le pays. De toutes les villes du pays, Imams de mosquées, érudits, professeurs, hauts fonctionnaires, étudiants, simples citoyens, tous se réclamant du djihad, ont levé très haut le poing pour réclamer la mise à mort du jeune.

Dernier acte à propos, la sortie publique de As hab Rassoul (Les Amis du Prophète. PSL) qui exigent l’exécution de Ould M’Kaïttir, mettant en garde les Autorités d’agir autrement. Dans ce cas, ont-ils menacé en substance, le Régime n’a qu’à se préparer au pire.

La suite dans notre prochaine édition

A.S
Source : L’Authentique (Mauritanie)