Mohamed Ould Maouloud, président de l’Union des forces de progrès (UFP), est l’une des voix fortes de l’opposition mauritanienne. Interview
À 61 ans, Mohamed Ould Maouloud, président de l’Union des forces de progrès (UFP), le plus à gauche des partis du Forum national pour la démocratie et l’unité (FNDU), la coalition de l’opposition, poursuit sans relâche le combat contre le régime du président Mohamed Ould Abdelaziz, dont il n’a jamais accepté le coup d’État de 2008.
Jeune Afrique : La vie politique mauritanienne semble totalement bloquée. Pourquoi ?
Mohamed Ould Maouloud : Parce que le pouvoir semble n’être intéressé que par l’enrichissement d’un petit clan, alors que la paupérisation des classes populaires s’aggrave. Un petit cercle d’amis utilise les appels d’offres en apparence ouverts pour s’approprier les marchés publics. Ces privilégiés se débrouillent pour fausser les règles du jeu : les bateaux de leurs concurrents ne sont pas déchargés à temps et les tarifs douaniers qui leur sont appliqués sont plus élevés… Comment être concurrentiel dans ces conditions ? C’est un vrai système mafieux.
Ce que vous décrivez n’est-il pas contredit par la création d’un Comité national de lutte contre la corruption et la gabegie ?
La Mauritanie possède tous les textes qu’il faut : contre l’esclavage, contre la pauvreté, contre la corruption. Le pouvoir se positionne en tête de ces combats, mais il les vide de tout sens. La lutte contre la corruption est dirigée contre les courtisans qui ne font pas suffisamment allégeance ou contre le menu fretin administratif, pour plaire à l’opinion. Mais les proches du pouvoir y échappent.
La presse dénonce pourtant les malversations et les détournements, non ?
Oui, il y a une liberté d’expression, mais la technique du chef de l’État est de laisser parler et de continuer à faire ce qu’il veut. D’abord, il a refusé de faire sa déclaration de patrimoine comme l’exige la Constitution, puis il a fini par la faire, mais il ne la publie toujours pas, alors que les textes lui en font obligation. En fait, il se comporte en monarque. Tout est faux et usage de faux dans ce régime qui falsifie les procédures, les documents comme ça lui chante, et qui nous propose un faux dialogue pour légitimer son système.
Comment la succession sera-telle assurée lors de l’élection présidentielle de 2019 ?
La Constitution ne permet pas un troisième mandat à Mohamed Ould Abdelaziz.Mais il ne manque pas d’hommes de main pour perpétuer ce régime ! Nous, l’opposition, sommes prêts à une solution politique qui assure une transition pacifique, mais à condition qu’il cesse de caresser l’espoir de se maintenir au pouvoir d’une façon ou d’une autre.
Interview rélisée par Alain Faujas