Trois questions à M. Samory Bèye, SG de la Confédération Libre des Travailleurs Mauritaniens (CLTM)

Trois questions à M. Samory Bèye, SG de la Confédération Libre des Travailleurs Mauritaniens (CLTM) « Cela fait des années que le dialogue entre les partenaires sociaux n’existe pas, malgré le besoin qu’exige la situation ». Entretien…

Le Calame : Vous venez de clore le 4èmecongrès de la CLTM. Quels en furent les grands actes ?

Samory Bèye : Regroupant les délégués accourus de toutes nos régions, le congrès s’est déroulé dans de très bonnes conditions. Les congressistes ont eu à adopter deux documents importants pour le futur de notre politique et de nos valeurs.

Dit « Orientation générale », le premier formule le programme de l’organisation pour les quatre ans à venir ; le second – « Rapport moral du SG » – retrace le bilan et recadre la ligne de l’organisation, toujours une ligne radicale de lutte contre les injustices et pour les droits. La CLTM en est sortie renforcée et consolidée par le renouvellement de ses instances et de ses structures de base, incluant du sang neuf.

– Que pouvez-vous nous dire du dialogue entre les partenaires sociaux en Mauritanie?

– Cela fait des années que le dialogue entre les partenaires sociaux n’existe malheureusement pas, malgré le besoin qu’exige la situation, si critique au plan économique et social : chômage, stagnation des salaires depuis des années, faible niveau du SMIG, détérioration du pouvoir d’achat, pratiques arbitraires et abusives dont sont victimes les travailleurs… dans un climat général de mauvaise gouvernance et politiques d’exclusion, d’injustice et de discrimination à outrance qui pèsent lourdement sur l’échiquier social. Tout cela demande un dialogue social réel en vue de trouver un consensus entre les partenaires sociaux à même d’endiguer ces problèmes épineux.

– Que pensez-vous de l’accord signé entre le ministère de l’Intérieur et les partis politiques pour la préparation des prochaines élections municipales, législatives et régionales ? Quelle place la Société civile dont vous êtes un des acteurs a-t-elle occupé dans ces pourparlers ?

-L’accord signé récemment entre les partis politiques et le ministère de l’Intérieur est le prélude à une mascarade électorale. C’est aussi une preuve de plus que le régime tergiverse et tâtonne, poussant à des élections anticipées en vue de tourner le dos aux vrais problèmes prioritaires de ce pays et qui le gangrènent depuis toujours.

Aux questions nationales et autres crises multiformes ; notamment l’esclavage ou la problématique harratine, le passif humanitaire, le problème communautaire que quiconque ne peut ou ne doit occulter pour quelque raison que ce soit ; s’ajoutent la mauvaise gouvernance et l’impunité qui agenouillent le pays.

Ces questions devraient être discutées dans le cadre d’un dialogue national inclusif en vue de leur trouver de justes solutions. Mais, par manque de volonté à les affronter sans détours, le pouvoir laisse derrière lui ces grandes questions, en dépit de leur acuité et de leur pertinence, pour s’embrouiller dans une mascarade électorale qui n’apportera aux Mauritaniens que l’appauvrissement, permettant aux rapaces et aux gabegistes de vider encore et encore les caisses de l’État et de faire avaler au final l’aigre pilule aux pauvres mauritaniens toujours maniables et corvéables à merci.

Dans cette farce auxquels ils n’ont été ni directement ni indirectement associés, je ne vois pas, moi, de place pour les acteurs de la Société civile. Mais en tant qu’avant-garde des intérêts supérieurs du peuple, ces acteurs doivent s’unir et s’organiser pour faire face à ce système archaïque et gabegiste qui conduit à coup sûr le pays vers le chaos.

La Société civile et toutes les forces vives de la Nation doivent former un front large pour instaurer un État de Droit, respectueux des droits fondamentaux de chacun. Un État de citoyenneté de justice et d’égalité à même de conduire au renforcement de l’unité nationale, de la cohésion sociale et du vivre ensemble en harmonie et quiétude, au sein d’une Mauritanie forte, unie et unique où chacun jouit pleinement de tous ses droits, loin de l’exclusion et de la discrimination.

Propos recueillis par Dalay Lam
Le Calame