Excepté peut être le milieu Olof, dans notre pays, les problématiques liées à l’esclavage et ses séquelles concernent toutes les communautés, même si, il faut le reconnaitre, avec des degrés d’intensité différents.
La communauté soninkée fortement stratifiée connait en son sein une composante assignée «d’ascendance esclave». Cette dernière dépréciée, dévalorisée et ségréguée subit différentes formes de discriminations liées au système d’organisation primitif que certains esprits féodaux considèrent intouchable et immuable pour toujours.
L’engagement abolitionniste, d’éveil humaniste et citoyen(Ganbanaaxu)qui s’est amorcé depuis quelques années au sein de la communauté,a suscité chez les réactionnaires soninkés, ces extrémistes obscurantistes avec leur mentalité féodalité-esclavagiste, une contre-offensive des plus hostiles.
Ainsi à travers les supports virtuels, réseau social Whatsapp notamment, dans des groupes aux dénominations farfelues comme « Democratia islamic », « Tounka Lenmou Kofo » et « Fan Club Donald Trump », des personnes autoproclamées comme défenseur de l’ancien ordre organisationnel qui avait été fondé sur la féodalité, se sont lâchées dans l’apologie décomplexée de l’esclavage statutaire ou par ascendance. Ces individus se croyaient inatteignables et intouchables.
En dépit de la législation adoptée par les pouvoirs publics pour lutter contre l’esclavage et ses séquelles, ils n’en ont cure et continuent d’injurier, d’insulter et d’humilier les militants de la dignité humaine, de l’égalité citoyenne et d’une fraternité,qui refusent l’ordre qui discrimine, le système qui sécrète la ségrégation, les coutumes rétrogrades qui avilissent une catégorie de citoyens dans les villages et au delà.
La situation devenant intenable et se dégradant de jour en jour, des plaintes avaient été introduites à partir de fin 2019 à Nouakchott contre certains éléments provocateurs qui appellent sans scrupule au maintien des discriminations sur la base du seul patronyme et n’hésitent pas à crier haut et fort que la propriété des villages leur revient de droit.
Et si les anti-esclavagistes ne sont pas d’accord avec cela, un choix s’offre à eux: s’exiler. Hallucinant, tout de même! Au mois de novembre 2020, les affaires qui ont été portées devant les tribunaux de la république ont été jugées,et ont donc connu leur dénouement. Le jeudi 3 décembre 2020, les juges ont délibéré et décidé sur la base des articles 19 et 23 de la loi 031-2015 contre l’esclavage et ses séquelles et sous réserve d’appel, que : Messieurs Sidi Seydi Dioumassy et Bouye Dembelé sont condamnés à un an de prison ferme et 25.000 ouguiyas d’amende, soit 250.000 de l’ancienne monnaie, Monsieur Boubakar Camara, président du groupuscule extrémiste «Démocratia Islamic», lui écope d’un an de prison avec sursis et 25.000 ouguiyas d’amende soit 250.000 ancienne monnaie, Monsieur Mamed Taleb Camara écope de la même peine que son président, soit un an de prison avec sursis et 25 000 ouguiyas d’amende, Monsieur Fousseni Camara a, quant à lui, été condamné à 6 mois de prison ferme et 20 000 ouguiyas d’amende soit, 200.000 ouguiyas ancienne monnaie. Des peines, vous l’aurez constaté, relativement légères eu égard des crimes.
Toutefois, nous venons globalement de briser symboliquement le verre de glace. Il s’agit en effet, d’une étape décisive pour ce qui concerne cette problématique de l’esclavage par ascendance et l’apologie décomplexée qui en est faite dans la communauté soninkée.
Partout dans la région du Guidimagha et au sein des communautés soninkées, chaque cérémonie est une occasion et une opportunité pour s’adonner et ou encourager, les discours apologistes de l’esclavage par ascendance dans l’objectif de provoquer et narguer ceux qui appellent à l’abolition des coutumes féodalo-esclavagistes.
En Mauritanie, faut-il le rappeler, l’arsenal juridique autour de l’esclavage et de ses survivances, est complet. Il suffit juste d’une réelle volonté politique pour une application effective des dispositions de la loi 031-2015 et contenir voir éradiquer les comportements malveillants et irresponsables ainsi que les discours et autres propos qui n’ont d’autres visées que celle d’agresser arbitrairement son frère ou de l’humilier.
Ce qui ne favorise en rien la cohésion nécessaire à notre chère patrie. Nous saluons ces verdicts de notre appareil judiciaire et appelons nos pouvoirs publics à prendre les décisions nécessaires et idoines afin d’enrayer définitivement cette spirale de l’apologie, en mettant à contribution les tribunaux spéciaux mis en place pour connaitre des crimes d’esclavage.
Nous réclamons l’application dans toute sa rigueur de l’ordre régalien,prévu par la constitution de notre pays, lequel garantit l’égalité citoyenne sur l’ensemble du territoire national.
Pour la communication GANBANAAXUN FEDDE et partenaires
Nouakchott 4 décembre 2020