Le Calame: Le principal parti de la majorité présidentielle vient de tenir son 2e congrès national. Ce conclave avait pour principal objectif de trancher le différend entre l’ancien et le nouveau président sur la « référence » du parti UPR. A l’arrivée, l’ancien président du parti a été lâché au profit de son ancien ami et successeur. Avez-vous le sentiment que le président élu Ghazwani a fini de reprendre la main et que le tombeur de Sidi Ould Cheikh Abdallahi est définitivement hors jeu de l’arène politique ?
-Saleh Hanana : Je pense que le Président de la République Son Excellence Mohamed Ould Cheikh El Ghazwani a repris en main les rênes du pouvoir doucement et sereinement et que l’ancien président a laissé un héritage fatal qui ne lui permet plus, s’il se respecte, de revenir sur la scène politique nationale.
-Il y a quelques semaines, votre parti HATEM a choisi d’apporter son soutien au nouveau président élu en rejoignant la majorité présidentielle. Qu’est-ce qui vous a séduit chez Ghazwani? Est-ce que les mauritaniens doivent comprendre aujourd’hui, à travers votre geste et celui d’autres acteurs politiques de l’opposition que celle-ci ne peut pas prospérer en Mauritanie, qu’elle ne mène nulle part?
– Les instances dirigeantes du Parti HATEM ont décidé de soutenir le Président de la République dans son programme de réformes qu’il vient d’engager dans les différents domaines de la vie nationale. Nous pensons qu’il est du devoir de tous les patriotes de venir en aide au régime en place pour lui permettre de se débarrasser des pions de l’ancien régime et des symboles de la corruption et de la malversation généralisée qui a détruit l’économie nationale lors de la dernière décennie.
Comme vous le savez, l’opposition n’est pas une fin en soi et nous pensons que vous verrez d’autres acteurs passer à la majorité.
-En tant que soutien du président, vous avez certainement examiné avec intérêt la composition des instances de son parti mais aussi de ses résolutions. Avez-vous le sentiment que cet UPR peut changer et s’adapter au nouveau contexte politique? Et quelle place votre parti pourrait occuper dans l’attelage du président Ghazwani ? Pourquoi HATEM n’a pas intégré l’UPR, comme ADIL, par exemple?
-Les instances dirigeantes du Parti HATEM ont décidé de soutenir le Président de la République et donc de faire partie de la mouvance présidentielle mais de ne point intégrer l’UPR. Le Parti HATEM préfère conserver son identité particulière (ses principes et ses objectifs) loin des lobbies à caractère tribal, régional, ethnique ou autres.
-Voilà 5 mois que le président Ghazwani est aux commandes du pays. Quelle évaluation vous en faites? N’avez-vous pas le sentiment, comme de nombreux mauritaniens pressés de voir la gouvernance changer et leurs conditions de vie s’améliorer, que ce président marabout est assez lent et qu’il ne voudrait mécontenter personne ?
-Le pays vivait au bord de la catastrophe et pour y remédier cela nécessite beaucoup de prudence et de clairvoyance. Nous pensons que l’actuel régime viendra doucement et avec les moyens de bord remédier à cette situation. Qui vivra verra.
-En discutant avec les mauritaniens, ils vous disent que jusqu’à présent le cap pris par le nouveau président les déroute, que le changement attendu risque de prendre du temps. Vous n’avez pas ce sentiment, vous qui avez choisi d’accompagner le nouveau président ?
– Je vous renvoie à la question précédente.
-Que pensez-vous des rapports entre le nouveau pouvoir et ce qui reste de l’opposition qui donne l’impression d’être tombée sous le charme du président Ghazwani ? Pensez-vous que l’opposition pourrait survivre au nouveau président ?
– L’opposition n’a pas l’apanage de tel ou tel parti, elle est plus tôt une opposition à une politique donnée. Il y aura une nouvelle opposition à ce régime et elle sera dotée de moyens financiers.
Depuis son retour au pays et sa tentative avortée de reprendre l’UPR, Ould Abdel Aziz est accusé d’avoir pillé et bradé les deniers publics et de s’être par conséquent trop enrichi. Etes-vous de ceux qui réclament l’audit de ses dix ans de gestion ?
-Bien sûr que oui. Les biens du peuple mauritanien ont été l’objet de gestion malsaine durant la dernière décennie. Les personnages concernés, et en premier lieu le premier responsable, doivent répondre de leurs actes devant la justice.
Face à ces accusations, l’intéressé a clamé son innocence en affirmant, au cours d’une conférence de presse tenue à son domicile, il y a quelques semaines que ses biens sont acquis de façon licite. Que vous inspire cette réponse à ses détracteurs?
– Tout accusé a droit à plaider son innocence. Les audits et les enquêtes nous diront qui a tort et qui a raison.
Le nouveau président est attendu sur le front social et sur la question de l’unité nationale et du passif humanitaire et de l’esclavage. Quels gestes attendez-vous ou espérez-vous du nouveau président pour soulager et rassurer les nombreux mauritaniens qui peinent à bouillir la marmite, à se soigner et à envoyer leur enfants à l’école ?
– Ce qu’on peut dire sur ce sujet c’est que l’éducation, le sens de bonne foi et le caractère personnel du Président de la République lui permettront de trouver les solutions adéquates à tous ces problèmes qui sont chères pour tous les mauritaniens épris de paix et de justice.
Propos recueillis par Dalay Lam
Source : Le Calame (Mauritanie)