Le président de la République Mohamed Ould Abdel Aziz organisé, jeudi soir, à moins d’une heure de la fin de la campagne électorale, une conférence de presse. La dernière sans doute de son magistère au cours de laquelle il était entouré de sa famille, une première. Cette conférence dont l’annonce avait surpris plus d’un observateur, laisse perplexe.
D’abord, elle n’a pas été retransmise, ni par la Télévision publique de Mauritanie, ni par Radio Mauritanie, deux organe publics de l’état, alors que ce sont ces organes qui organisaient ce genre de manifestation. Selon des rumeurs, les responsables des deux organes publics n’auraient pas été saisis. Pour quelle raison ? Mystère, en tout cas pour le moment. Seules les chaines privées ont relayé cette rencontre d’avec la presse.
Ensuite, le choix du timing. Cette rencontre avec la presse, une heure seulement avant la clôture de la campagne aura été selon un expert, une erreur des conseillers du président. Elle parasite la fin de la campagne du candidat et ne permet pas aux candidats de l’opposition de réagir aux propos du soutien de leur concurrent Ghazwani. Et pour beaucoup, la conférence de presse ne peut servir le candidat, au contraire, annoncer l’éventualité d’une candidature dans quelques années, vient accréditer les soupçons sur un deal que les deux amis auraient contracté sur le dos des mauritaniens. Un mandat pour Ghazwani et le retour d’Ould Abdel Aziz? Même si cette rencontre avec la presse a permis à Ould Abdel Aziz de réaffirmer son soutien à son ami et désormais frère, ce qu’il a martelé maintes fois, elle risque de desservir le candidat de la majorité.
Que retenir de cette rencontre avec la presse ? Les analystes sont unanimes, Ould Abdel Aziz voulait démontrer qu’il est toujours au centre du jeu et des débats politiques de la campagne. Il n’entendait pas se faire oublier si vite, se faire virer de l’arène politique par un simple porte-parole de son frère et candidat, Ould Domane. En effet, lors d’une interview accordée à RFI, dans le cadre justement de la campagne, Ould Domane a mis définitivement une croix sur l’avenir politique d’Ould Abdel Aziz. Il ne peut pas revenir parce que la Constitution le lui interdit, a dit en substance le porte-parole du candidat. Un crime de lèse majesté ? En indiquant, au cours d’une précédente conférence de presse qu’il n’allait pas quitter le pays, comme certains le prétendent, qu’il allait même continuer à faire de la politique, Ould Abdel Aziz rappelle, à ceux qui voudraient l’enterrer si vite que rien dans la constitution ne l’empêcher de briguer la magistrature dans l’avenir. Comme dirait l’autre, j’y suis, j’y reste !
Le président Aziz a également profité de cette rencontre avec la presse pour parler de son bilan. Il s’est évertué à montrer qu’il avait hésité d’un pays exsangue qu’il a réussi à moderniser, en luttant contre la gabegie, en modernisant les infrastructures et en luttant contre la pauvreté et le terrorisme. Sur ce dernier point, il a indiqué qu’on demande trop au G5 Sahel alors qu’on lui refuse les moyens pour combattre sur le terrain.
Pour le président Aziz, le futur le président qui sera élu, le 22 juin, en l’occurrence son dauphin, héritera d’un pays stable sur le plan sécuritaire et sur le plan économique. Interpellé sur l’indépendance de la CENI et sur la transparence du scrutin du samedi, Ould Abdel Aziz a affirmé que l’organe de supervision des élections est indépendant, que les services du ministère de l’intérieur se sont abstenus de toute interférence dans le processus électoral.
Enfin, Ould Abdel Aziz supporterait mal, que durant les quinze jours de campagne, ses amis (candidat, UPR et partis de la majorité), n’aient pas suffisamment parlé de son bilan. Au contraire, il n’a eu de cesse d’essuyer des critiques de l’opposition. Autre crime de lèse majesté que le Rais ne pouvait accepter. C’est donc une occasion pour répondre à ces critiques venues de gens qui avaient mis le pays à genoux et qui battent aujourd’hui campagne pour le diriger. Inacceptable pour celui qui a toujours dit qu’il n’entendait pas laisser des « aventuriers » – ce terme est du directeur national de campagne de Ghazwani – détruire ce qu’il a mis dix ans à construire. Une posture qui sème le doute sur la transparence du scrutin du 22 juin.