La finalité

La finalité de l’homme est de se développer, de s’épanouir le plus possible. Celle de la nation est de permettre à la totalité de ses hommes de se développer et de prospérer.

Pour cela, elle doit produire le maximum de richesses pour être la plus prospère possible.

Dans la mesure où l’on admet ces points de vue, on est conduit à conclure que pour un pays comme la Mauritanie, le choix le plus positif est la lutte contre la pauvreté par la valorisation des ressources humaines et notamment par une politique active de l’emploi, donc plus de richesse.

Parmi tous les défis à relever, il en est un majeur que je tiens à souligner dès le début, car nos dirigeants devraient en faire leur priorité absolue. Il s’agit de la lutte contre le chômage, cause principale des problèmes de société, tels que l’intolérance, l’extrémisme et la haine raciale qui représentent une véritable bombe à retardement, à désamorcer, pour garantir   l’unité nationale et la paix sociale.

Après cette conclusion vient naturellement la question : comment y parvenir ?

Mais avant d’aborder la question et d’y proposer une réponse, je voudrais d’abord faire quelques précisions :

-La présente analyse qui est développée ici, porte sur l’emploi et la corruption au sein de certains de nos organismes publics.

Elle n’est adressée contre personne.

Il ne s’agit pas d’attaques personnelles, mais tout simplement de la critique constructive pour nourrir et enrichir la recherche dans l’intérêt général.

-Cette approche ne prétend pas avoir exploré tous les aspects, heureusement d’ailleurs, car mon vœu est simplement d’apporter une contribution, au débat intellectuel sur le besoin de réfléchir en commun au mode de fonctionnement de nos organismes publics et à leurs relations avec la société.

-Et c’est normal. Il existe un peu partout des intellectuels qui se posent des questions sur le devenir de l’homme et la finalité de l’existence.

Si aussi, certains pays ont mieux réussi que d’autres, c’est justement grâce à la recherche et au débat.

-Enfin ayant vécu de près, le secteur public, je ne voudrai pas manquer à la courtoisie en exposant publiquement des remarques sur certains de nos responsables publics. Je me contenterai d’un propos général en parlant d’organismes publics pour ne pas les nommer.

Ceci dit, revenons maintenant à la question : comment y parvenir ?

 

Le travail productif :

L’emploi offre à l’économie une occasion unique de croitre plus rapidement et d’atteindre des niveaux de prospérité plus satisfaisants.

Le manque d’une politique active de l’emploi ou tout simplement du recrutement est contraire au renforcement de la puissance publique et a un impact défavorable sur la qualité de vie des citoyens due à l’inefficacité de l’administration.

Le travail productif généralisé permet à la population de prospérer et à chacun de vivre mieux.

La promotion de l’emploi ne doit pas concerner seulement les jeunes diplômés, mais également l’insertion dans le marché du travail des jeunes sans diplômes et sans formation en appelant dans ce sens les entreprises à prendre le relais de la formation.

La création d’entreprises peut maximiser les offres et les opportunités de l’emploi sur le marché du travail. Le travail est au cœur du développement de l’être humain. Il est la clé du progrès économique et social.

L’emploi est donc un bien précieux. Il constitue pour la société un rempart contre le creusement des inégalités sociales et les différentes formes de précarité.

Malheureusement, parmi nos décideurs publics, certains ne sont pas engagés dans l’emploi et la lutte contre le chômage. Ils ne comprennent pas l’utilité économique du recrutement et des initiatives pourvoyeuses d’emplois et du travail productif. Ils préfèrent recourir, figurez-vous, à des consultants étrangers, en costumes, cravates et cols blancs, sous le fallacieux prétexte de « projets », dont on ne voit jamais sur le plan concret, l’utilité pratique.

Alors que ce ne sont même pas des projets, à la limite des programmes ou tout simplement des services.

Ces soi disant experts qui se relaient sans cesse chez nous, voient leurs comptes prendre des dimensions en dehors de tout contrôle, aux dépens des jeunes diplômés mauritaniens qui n’arrivent pas à voir le bout du tunnel par manque de travail et continuent de survivre à peine aux affres de la vie.

D’autres jeunes diplômés aussi par dizaines, voir par centaines, vivotent en qualité de temporaires et de contractuels depuis des dizaines d’années sans qu’ils ne soient régularisés.

C’est ce qu’on peut appeler l’irresponsabilité des responsables.

D’autre part, des cadres partent à la retraite sans que la relève ne soit préparée. Ensuite on recourt à des contrats de complaisance, pourtant interdits par la circulaire du 1er Ministre N° 0006 en date du 12/11/2014.

Et ce n’est pas fini. Pour mieux masquer leurs desseins, par une étrange et cinglante ironie du sort, ces dirigeants puissants, aux pouvoirs étendus, se glorifient de leurs succès supposés par des slogans dans les médias selon lesquels, ils doivent être admirés et considérés comme des modèles à suivre.

Ils se targuent de faire des restrictions budgétaires au sens de réduction et de diminution du budget. Alors que ce n’est pas une fin en soi. Surtout quand c’est au détriment du développement et de la croissance, puisque cela prive l’emploi et le travail productif.

On se demande comment peut-on accepter, toute honte bue, de telles pratiques contraires à l’intégrité et au bien-être des Mauritaniens.

Les compétences ne manquent pourtant pas chez nous. Ce qui manque c’est plutôt la volonté de considérer les Mauritaniens en adultes responsables.

Dans certains pays, l’octroi aux responsables publics d’une plus grande marge de manœuvre ne peut qu’encourager l’arbitraire et la corruption.

Les définitions de la corruption sont nombreuses. La plus commune est l’utilisation des pouvoirs que confère une charge publique pour en retirer des avantages personnels.

En général, quant on parle de corruption, chez nous, on pense aux policiers chargés de la circulation ou à des agents chargés de contrôler nos papiers ou encore à des fonctionnaires coupables de malversations. Alors que la corruption existe aussi au plus haut niveau, comme celle liée à l’administration des contrats ou à l’attribution des marchés.

La corruption ne date pourtant pas d’hier. Elle est devenue une norme dans nombre de pays africains. C’est un mal qui a profondément bouleversé la vie et provoqué la colère et l’indignation populaire.

La corruption prospère là où la faiblesse  des contres pouvoirs lui laisse le champ libre.

La corruption viole la confiance du public et peut si elle n’est pas combattue saper lentement la légitimité du pouvoir politique jusqu’au moment où même les fonctionnaires et les citoyens ne voient plus l’utilité de respecter les règles.

Maintenant, les populations exigent une probité plus grande.

L’Etat doit par conséquent s’attacher à mettre en place des mécanismes de contrôle qui feront barrière à l’arbitraire et à la corruption dans leurs rapports avec les citoyens et l’extérieur.

 

Le changement :

Stimulée par l’approche des élections présidentielles qui portent en soi des promesses de changement, des raisons d’espérer et des perspectives d’une alternance démocratique favorable, le pays va mieux.

Rémission ou guérison ?

Ce climat s’est encore éclairci par l’exploitation dans un proche avenir des énormes gisements de gaz et autres minerais, ainsi que par la nouvelle coopération régionale fructueuse fondée sur le respect mutuel de tous nos voisins.

Il était temps, mais rien n’est joué.

Il était temps, d’abord parce que la Mauritanie est parmi les pays en développement, celui où la question vitale de l’emploi des jeunes reste le plus grand défi à relever.

Ensuite, parce qu’une bonne administration publique qui nous fait défaut, n’est pas un luxe, mais une nécessité vitale, à travers son pouvoir de faire prévaloir la primauté du droit, si l’on veut contribuer de façon efficace au développement.

Il était temps enfin, parce que pour la grande majorité des Mauritaniens le clignotant d’alerte sur le chômage, la précarité, le dénuement et la pauvreté restait allumé depuis plusieurs décennies.

Rien n’est joué cependant. Une embellie dans un climat longtemps perturbé est une chose, mais la restauration durable de ce climat en est une autre.

Tant qu’on n’a pas compris que les décisions ne doivent pas être imposées seulement d’en haut, le risque restera grand qu’elles soient vouées à l’échec.

Elles doivent être prises de préférence dans un consensus national qui ne requiert   pas forcement l’unanimité, mais qui regrouperait le plus grand nombre de l’opinion. Car, même le Président le mieux intentionné ne pourra répondre efficacement aux besoins collectifs, si la plupart d’entre eux lui sont inconnus.

 

Qu’attendent les Mauritaniens ?

Ils attendent qu’on leurs dise que chaque année 20.000 ou 30.000 emplois seront créés. Et qu’avec tous ces gisements et richesses dans 3 ou 4 ans, 80.000 à 100.000 emplois seront disponibles sur le marché du travail.

Ne connaissant pas l’ordre des priorités, des attentes de leurs compatriotes, aucun dirigeant mauritanien n’a jamais fait une déclaration dans ce sens.

Pourtant, chaque année des milliers de jeunes diplômés sortent et ne trouvent rien d’autre à faire que de grossir le rang des dizaines de milliers des diplômés chômeurs.

Au moment où les dernières lignes de cette communication sont écrites, Monsieur le Ministre de la Fonction Publique annonçait des mesures concernant l’emploi. Mais elles sont tellement insuffisantes, qu’elles ne prévoient même pas l’intégration des contractuels hors cadre.

Cette annonce m’a fait penser à l’histoire de ce crapaud, tellement déconnecté de la réalité, qu’en coassant au fond d’un puits, disait que le ciel était aussi grand que le puits (mémoire de Mao Tsé Tung).

Ailleurs, chez nos voisins, Macky Sall, en arrivant au pouvoir en 2012, avait promis de créer 500.000 emplois durant son mandat. Esquissant le bilan de ses promesses électorales le 1er mai 2018 à l’occasion de la fête du travail, il avait annoncé la création de 411.000 emplois.

Quant à nous, on est bien loin du compte. Nous n’avions même pas eu droit à la promesse de 1/10 de cela.

Que faut-il retenir de tout cela ?

L’histoire et le passé récent nous ont pourtant  appris que les temps ont démenti tout le monde. On n’est jamais à l’abri de surprises.

La beauté des discours, la mobilisation des foules et leurs rassemblements grandioses ne doivent pas nous faire oublier que le développement ne se limite pas seulement à un certains nombre d’apports sur le plan économique.

Les populations ont surtout besoin  d’une hausse conséquente de leur niveau de vie. Il est important de retenir que la lute contre la pauvreté se joue sur des fronts multiples.

 

Lehbib Ould Berdid

Diplômé d’Etudes Supérieures de l’ITB du Conservatoire National des Arts et Métiers Français