Marche du 9 janvier : Criez, marchez, c’est la volonté politique qui manque !

Marche du 9 janvier : Criez, marchez, c’est la volonté politique qui manque ! L’Union pour la République (UPR), principal parti de la majorité présidentielle organise, le 9 janvier prochain, une marche pour, dit-elle, « barrer la route aux auteurs des discours haineux et incitatifs à la discorde, indépendamment de leurs origines, et dans le but de manifester avec force et détermination une position nationale unifiée contre tout ce qui est de nature à compromettre la cohésion et la solidarité entre les composantes de notre peuple et de réitérer notre attachement à la cohésion nationale et à la défense des valeurs de tolérance et de cohabitation pacifique dans un climat de paix et de concorde, valeurs qui étaient des caractéristiques de notre peuple pendant des siècles…»

La question que l’on est en droit de se demander est d’où viennent ces discours haineux et pourquoi l’unité nationale est aujourd’hui menacée et qui en est responsable?

Comme se souviennent certains, les Mauritaniens ont vécu, ensemble, dans les internats, les Mahadras et même dans les casernes, commissariats et brigades de gendarmerie et les groupements de la Garde Nationale, en tout cas jusqu’aux années 86 -91, dans la fraternité et le respect de l’autre.
L’islam a été et demeure certes le ciment de notre unité mais s’est-on soucié de ce qu’il recommande entre des frères de la Umma ? Si les communautés mauritaniennes se méfient aujourd’hui les unes des autres c’est en grande partie parce qu’on n’a pas respecté les préceptes de l’Islam, c’est parce que certains en ont fait un fond de commerce.

Nous ne devons pas, par hypocrisie et haine de l’autre, passer à côté de l’essentiel. A quoi va servir une marche pour un ancien esclave qui peine à garder sa dignité ? A quoi servira une marche pour un citoyen qui se considère comme marginalisé dans son propre pays ? A quoi servira cette marche si des mesures ne sont pas prises pour rapprocher les mauritaniens qui ne fréquentent pas les mêmes écoles, ne se soignent pas dans les mêmes structures de santé, n’ont pas les mêmes chances de trouver du travail et de promotion, de créer des entreprises, de bénéficier des prêts auprès des banques, des mêmes droits devant la justice et mêmes de loger dans les mêmes quartiers. En somme, ils ne se frottent et ne liment pas leurs cervelles ensemble…

Les extrémistes de tous les bords, apparus dans les années 80, ont réussi à creuser un énorme fossé entre les communautés mauritaniennes. La preuve: certains quartiers ne sont habités que par une seule communauté. Celui du 5earrondissement est considéré par certains mauritaniens comme un quartier de « sénégalais ou d’ouest africains tout cours ». Nous devons nous regarder dans la glace, accepter de poser les problèmes de la cohabitation entre nos communautés. Il n’est un secret pour personne que certains citoyens n’acceptent pas de voter pour des gens différents de leur communauté. Le candidat Messaoud Ould Boulkheir du FNDD, en 2009 en a fait l’amère expérience.

Pour certains, il ne pouvait pas être leur candidat. C’est dire que notre UNITE NATIONALE, voire notre la cohésion sociale dont on vante les mérites depuis quelques années, continuera à pâtir de nos errements si un pan de la communauté nationale se sent marginalisé dans tous les secteurs.

Cette marche du 9 aurait plus d’incidence si elle n’intervenait pas dans le contexte actuel. Des citoyens dont des intellectuels, des érudits et autres organisent des initiatives pour appeler à violer la loi fondamentale du pays. Comment peut-on comprendre cela? Voilà des comportements qui, en mettant en péril notre démocratie, sont à dénoncer. De grâce, osons dire la vérité. Rappelez-vous la réaction d’hostilité que le discours du président du parti ARC-EN-CIEL, M. Balas avait reçu lors de l’ouverture du dialogue 2016, au palais des congrès. Il a été sifflé quand il a décrit les atrocités contre les négro-africains entre 86 et 91, les expropriations des terres de la vallée etc.

Comment peut-on trouver des solutions à un problème quand on ne veut pas en entendre parler? Il faut commencer par là. Les journées de concertations de la transition 2005 – 2007 avaient pourtant posé un jalon important. Ils avaient ébauché des solutions à l’ensemble des problèmes politiques, économiques et sociaux du pays. Nombre de leurs recommandations, comme d’ailleurs celles du dernier dialogue de 2016 continuent à dormir dans les tiroirs. Criez, marchez, c’est la volonté politique qui manque !

 

Source : Le Calame (Mauritanie)