Les militaires doivent être tenus à l’écart des querelles politiques, selon le ministre mauritanien de la Défense, Diallo Mamadou Bathia. Une injonction totalement déconnectée de la réalité, puisque depuis 1978 c’est l’armée qui monopolise le pouvoir en Mauritanie.
Les militaires doivent être tenus hors de la mêlée et des querelles politiques. Ce vieux principe républicain, appliqué aux acteurs de la Grande muette, a été rappelé dimanche soir par le ministre mauritanien de la Défense, Diallo Mamadou Bathia, qui s’exprimait à l’occasion d’une conférence de presse de l’Union pour la République (UPR), formation politique au pouvoir.
«Les forces armées travaillent à la protection des frontières nationales, des personnes et de leurs biens, à la sécurisation du pays et de ses institutions. Un rôle qui est à saluer. Cependant, les généraux de l’armée nationale sont des citoyens qui ont des proches qu’ils peuvent influencer dans leur choix. Mais ils ne s’engagent dans aucun parti politique», a expliqué Diallo.
En fait, ce discours est prononcé par un acteur ayant une double casquette, puisque le ministre de la Défense, le patron civil de l’armée, est également chargé de la redoutable tâche de coordonner l’action de la commission de réforme de l’Union pour la République (UPR).
Le principal parti de la majorité vient en effet de boucler une opération de vente des cartes et revendique officieusement, plus d’un million d’adhérents, sur une population d’environ 3,5 millions d’habitants.
Cette formation s’engage désormais dans une perspective de l’organisation d’assises pour désigner les délégués au prochain congrès, appelé à élire toutes les instances.
Pendant les opérations d’implantation, une partie de la presse nationale a évoqué «des querelles de positionnement entre quelques hauts gradés» par hommes de paille, larbins et autres faire-valoir politiques interposés.
Ce qui montre que les précisions du ministre de la Défense collent parfaitement au contexte d’une effervescence politique d’avant la présidentielle de 2019, sur fond de multiples interrogations et d’incertitude par rapport à un éventuel successeur du président Mohamed Ould Abdel Aziz.
Cependant, en revisitant l’histoire politique de la Mauritanie, le discours du ministre sur le rôle des militaires est totalement déconnecté de la réalité.
Car l’armée est au cœur du jeu politique national et exerce le pouvoir d’Etat depuis le 10 juillet 1978, soit par un régime militaire d’exception, ou à travers un officier «recyclé» et ayant troqué la vareuse contre un costume, à l’exception des 15 mois du régime du président Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi, présenté par les militaires, qui l’ont fait élire avant de le renverser. Il se dit même que le dauphin de Mohamed Ould Abdelaziz sera choisi entre l’un de ses deux amis et compagnons d’armes: l’actuel chef d’état-major, le général Ghazouani, ou un colonel à la retraite, Ould Baya, actuel maire de Zouérate.
Par notre correspondant à Nouakchott
Cheikh Sidya
Source : Le360 (Maroc)