Ces deux dernières années, 500 jeunes femmes au moins ont réussi à être rapatriées en Mauritanie, mais des centaines auraient encore été envoyées dans le royaume par des bureaux de placement installés en Mauritanie, sans existence légale selon plusieurs ONG et syndicat de travailleurs.
Le scénario est à chaque fois le même. Des jeunes femmes, haratines, issues de la communauté des descendants d’esclaves sont envoyées en Arabie saoudite en pensant partir travailler comme domestique. Sur place, elles sont exploitées, mal nourries, battues, envoyées comme bergère pour garder des troupeaux ou enfermées.
Ce fut le sort connu par Lalla Mint Mohamed Vall, 34 ans, dont le cauchemar s’est terminé il y a quelques jours à peine. Son histoire est emblématique de nombreuses autres jeunes femmes envoyées dans le royaume saoudien, et dont l’épilogue se joue désormais au tribunal.
Aminetou Mint el Moctar, présidente de l’AFCF, l’association qui s’est occupée d’elle, raconte. « Elle est restée six mois en Arabie saoudite où elle est restée séquestrée dans une chambre. Elle ne buvait que l’eau des toilettes et mangeait un morceau de pain par jour, pas plus. Elle est tombée malade, et quand elle est revenue, elle avait perdu plus de la moitié de son poids. Elle a subi toutes les formes de maltraitance physiques. L’AFCF a fait une déclaration que nous avons traduite en arabe et postée sur des sites saoudiens. Un matin, le monsieur l’a jetée. Il lui a pris son passeport, il ne lui a rien donné et a pris la batterie de son téléphone pour qu’elle ne contacte personne. C’était dans le but qu’elle soit ramassée par la police et jetée en prison car elle circulait sans papier. »
L’homme qui avait recruté Lalla Mint Mohamed Vall, Nema Ould Monak, a été arrêté début mars à la suite d’une plainte. Mais il a été relâché quelques jours plus tard grâce à ses réseaux.
A ce jour, 35 plaignants l’attaquent en justice qui se penche sur son cas ce lundi 1er avril. L’homme rappelle à qui veut l’entendre qu’il a des relais hauts placés et qu’il ne sera jamais condamné. Un comportement inacceptable pour les ONG qui suivent ce dossier, et qui révèle l’impunité qui règne.
Malgré plusieurs scandales de ce genre, la Mauritanie a signé une convention l’année dernière avec l’Arabie saoudite pour le recrutement de 15 000 travailleurs domestiques mauritaniens. Un texte dénoncé encore cette semaine par l’association des femmes cheffes de famille, SOS esclaves et la CLTM, un syndicat de travailleurs. Ce texte couvre, disent-ils, les agissements de bureaux de placement peu scrupuleux.
Depuis 2015, plusieurs plaintes ont été déposées mais la justice n’a jamais poursuivi aucun recruteur.
Par RFI
Source : RFI