Cette situation est d’autant plus incompréhensible que le pays a bénéficié ces dernières années d’importantes ressources financières qui s’élèvent, pour la période 2010-2014, à un montant global de 17,24 milliards USD (12,049 Milliards USD d’exportations, des investissements directs étrangers pour un montant cumulé de 3,729 Milliards USD, des financements extérieurs à hauteur de 1,462 Milliards USD).
Durant la même période, les ressources budgétaires de l’Etat ont atteint des sommets jamais égalés : un cumul de 1897,6 Milliards d’ouguiyas. Au vu de la situation désastreuse que vit le pays, nous sommes en droit de nous poser les questions suivantes : Où sont passés ces faramineuses ressources ?
Peut-on imaginer que les « réalisations » avancées, avec grands tambours, par le régime et qui restent – par ailleurs – à désirer justifient, à elles seules, l’usage de tout cet argent ? Pourquoi le pouvoir s’acharne-t-il à éliminer des milieux d’affaires dont certains ont pris part à l’œuvre de construction du pays depuis l’indépendance, accumulant ainsi un savoir-faire et une expérience d’une inestimable richesse ? Pourquoi d’importantes opportunités d’investissement dans des secteurs clés ont-elles été bloquées ?
Ces questions et bien d’autres, liées à la gestion catastrophique de ce régime, préoccupent aussi bien l’opinion nationale que les observateurs étrangers. Nous essayerons d’y répondre, au moins en ce qui concerne la partie visible de l’iceberg.
Des choix hautement discutables
Prenant pour pérennes des ressources qui ne sont que conjoncturelles, le régime a adopté, durant la période faste de 2010-2014, des politiques budgétaires expansives et imprudentes.
Cette option présente le double inconvénient de hisser le budget de l’Etat à un niveau qui ne correspond pas aux fondamentaux durables de l’économie du pays et de se priver de toute marge de manœuvre face aux aléas des marchés. Pour illustrer les choix ainsi opérés, en dehors de toute prise en compte des intérêts réels du pays, citons quelques exemples :
L’Etat s’est lancé dans une politique d’investissements anarchiques qui ne s’intègre dans aucune stratégie cohérente de développement. Les besoins du pays sont ignorés, les priorités sont définies selon l’humeur du chef de l’Etat et les projets sont engagés soit sans étude préalable, soit avec des études insuffisantes.
Les critères de rentabilité sont bafoués, les travaux sont confiés aux « nouveaux venus », issus presque exclusivement de l’entourage familial du chef de l’Etat, sans aucune expertise ni expérience dont le souci primordial est de s’enrichir, le plus rapidement possible, sur le dos de l’Etat, quitte à bâcler les travaux ou à en allonger la durée avec, en prime, des surcoûts à engranger.
Il s’agit, en somme, de projets nettement surdimensionnés ou techniquement mal conçus qui, une fois achevés, constitueront des fardeaux supplémentaires pour le budget de l’Etat, en raison des coûts élevés d’entretien et de maintenance qu’ils engendreront au cours des prochaines années, au lieu d’être des sources de revenus et de richesses. A ce sujet, les exemples ne manquent pas :
Nouvelle centrale de Nouakchott d’une production de 400 MW pour des besoins estimés à 150 MW. Cette centrale est aujourd’hui incapable de fournir de manière régulière l’électricité aux usagers nationaux ou en assurer le transport, comme prévu, au Sénégal, à cause de la non-conformité technique du câble fourni, dans des conditions obscures, pour la bagatelle de 30 millions Euro… Au lieu d’exiger de la société concernée de fournir un câble aux normes, il est question actuellement de rechercher le financement pour l’acquisition d’un nouveau !
Nouvel aéroport de Nouakchott d’une capacité de 2 Millions de voyageurs par an alors que les besoins du pays se limitent à 300 000 p/an, sans parler de l’impact nocif de ce projet sur divers secteurs économiques (foncier de Nouakchott, SNIM, secteur bancaire, etc.) ;
Aménagements agricoles réalisés sans études préalables, de manière quasi-artisanale et à des prix très élevés (projet de creusement d’un canal de 55 Km qui s’enlise actuellement dans des difficultés techniques inextricables) ;
Réseaux urbains et interurbains réalisés sans aucun professionnalisme, en l’absence de projets routiers structurants (la route de l’espoir se dégrade de jour en jour, la route de Rosso piétine, le pont sur le fleuve n’est toujours pas programmé) ;
Durant cette même période, le pouvoir s’est engagé, à grands frais, dans une politique d’étatisation de l’économie. Les échecs retentissants de cette intervention ont lourdement touché des secteurs clés tels que les transports terrestre et aérien, les grands travaux, l’agro-alimentaire (lait, sucre)… ;
De nombreux établissement et institutions publics ont vu le jour entre 2010 et 2014, grevant substantiellement le budget l’Etat. Ces structures, dont certaines ont bénéficié de crédits avant même leur mise en place (Zone franche de Nouadhibou, Ecole des Mines, usine de sucre,…), sont, souvent, créées pour justifier des dépenses et «caser», au passage, quelqu’un…
Au cours de l’intervalle 2010-2014, les budgets alloués aux transferts courants ont connu une très forte progression (environ 70 milliards UM/an).
Détérioration du climat des affaires
L’une des préoccupations centrales des pays dépendants d’une ou de plusieurs matières premières est d’engager une stratégie de diversification de l’économie. On devient moins exposé quand la croissance est générée par diverses sources de production. On sait, par ailleurs, que l’acteur principal d’une telle stratégie ne pourrait être que le secteur privé.
Or, concomitamment avec la mise en œuvre de leur politique hasardeuse d’étatisation de l’économie qui réduit, substantiellement, le champ d’intervention de ce dernier, les pouvoirs publics se sont évertués à détruire le climat des affaires dans le pays. Cela se manifeste à travers :
la chasse aux sorcières engagée contre les hommes d’affaires affiliés à l’opposition ou jugés non « dociles » ;
la volonté affichée de créer une nouvelle classe d’hommes d’affaires, issue presqu’exclusivement de l’entourage immédiat du Chef de l’Etat ;
le matraquage fiscal ciblé, rendant l’exercice de toute activité privée nationale ou étrangère périlleuse et engendrant la délocalisation des activités des entreprises et la fuite des capitaux ;
le blocage systématique d’importantes opportunités économiques (investissements, réalisation de projets à des conditions favorables, etc…) sous de fallacieux prétextes : soit parce que leurs promoteurs n’étaient pas très coopératifs ou pas assez généreux, soit parce qu’ils n’avaient pas le « bon partenaire » mauritanien… et qu’ils refusaient de le changer, selon le bon vouloir des décideurs;
Les violations continues des lois et règlements relatifs à la gouvernance économique par les plus hautes autorités de l’Etat afin de détourner toute l’activité économique au profit d’un clan donné. C’est ainsi que la quasi-totalité des projets financés sur les ressources nationales sont octroyés, dans des conditions opaques, à des proches du pouvoir ; s’agissant des financements extérieurs, les autorités tentent, le plus souvent, d’interférer dans les procédures en vue d’orienter l’exécution des projets vers des intérêts particuliers, allant même jusqu’à demander, ouvertement, à certains bailleurs de fonds d’annuler, carrément, des marchés déjà octroyés à des sociétés nationales ou étrangères qui ne leur conviennent pas …
Ces pratiques engendrent des résultats catastrophiques dont voici quelques exemples :
La SNIM a engrangé de 2010 à 2014 un montant global de 7 Milliards USD. Malgré cette conjoncture plus que favorable, elle n’a procédé à aucune modernisation de ses outils de production et s’est abstenu de mettre en place un mécanisme efficace (matelas) contre les chutes de prix.
Au lieu de cela, la société a dilapidé ces revenus fabuleux en projets inutiles ou largement surfacturés. Les difficultés qu’elle connait depuis lors, notamment la dernière grève de ses travailleurs et son récent recours, sans suites, à la BAD et à la BID pour résorber des problèmes de trésorerie, contribuent à la mise à nu de la gestion désastreuse de cette société ;
La multinationale GLENCORE voulait exploiter les sites El Aouj et Lemteniya, à hauteur de 50 millions de tonnes de fer par an et concentrer ainsi son activité au niveau de l’Afrique en Mauritanie. Elle était encouragée en cela par les infrastructures de la SNIM (port minéralier et train).
Ayant une capacité de transport de 94 millions t/an, le train minéralier n’en fait actuellement que 12 millions par an. En plus de la réalisation, à ses frais, des bretelles nécessaires pour l’exploitation de ses sites, GLENCORE proposait à la SNIM 16 USD/t pour le transport de son minerai. Pour des raisons inavouées, la SNIM avançait des prix exorbitants et tergiversait jusqu’au jour où le promoteur plia bagage, alors que les cours mondiaux du fer commençaient à chuter ;
La société chinoise Hong Dong est installée en Mauritanie depuis 2010. Elle jouit de nombreux avantages accordés, dans des conditions très obscures, par l’Etat mauritanien, tels que droit d’accès à la ressource soumis au régime normal ou l’exonération de l’ensemble des droits et taxes, à l’exception de la taxe d’exportation (payée à hauteur de 1%, au moment où les nationaux paient 7%)…
Hong Dong fut présentée comme un promoteur devant révolutionner la pêche, notamment la filière pélagique, en tant que modèle de l’intégration du secteur dans l’économie nationale devant consacrer la transformation du petit pélagique à terre en créant, dans la foulée, des milliers d’emplois.
Seulement, cette société s’est complètement détournée de ses engagements pour s’adonner, dans l’impunité totale, à la pêche de céphalopodes, pourtant exclus de l’accord avec l’Union Européenne du fait de leur surexploitation, et de demersaux qu’elle écoule sur le marché international, à des prix très avantageux, en concurrence ouverte avec les produits mauritaniens.
Elle s’abstient, par ailleurs, de rapatrier les devises ainsi engrangées, ce à quoi sont astreints les producteurs nationaux, sous peine d’être sévèrement amendés ou interdits d’exportation. Elle procède, tout aussi impunément, à l’achat de poisson sur le marché artisanal, en concurrence déloyale avec les opérateurs nationaux.
Au lieu d’obliger Hong Dong à respecter les lois et règlements du secteur ainsi que ses propres engagements, le gouvernement s’est ingénié à modifier, en 2014, le code de pêche pour permettre aux bateaux côtiers de cette société d’accéder à la zone réservée aux artisanaux ! Il faut rappeler que cette même loi avait été modifiée en 2010 pour délivrer à cette même société un véritable permis de piller les ressources halieutiques du pays avec l’utilisation du fameux chalut à bœuf, interdit à l’échelle internationale.
L’entreprise sénégalaise CSE était retenue, sur appel d’offres, pour réaliser la route Nouakchott–Rosso. Le projet a été retardé pour cause d’un soi-disant « différend » avec cette société, jamais explicité par les autorités concernées. Relancé deux ans plus tard, au grand dam de l’entreprise adjudicataire, le projet sera réalisé à un coût plus cher que l’offre initiale de CSE… ;
La société marocaine STAM a réalisé des aménagements agricoles entre Rosso et R’Kiz dans le cadre d’un marché de gré à gré d’un montant de 10 milliards UM, à des prix hors normes (entre 3 à 4 Millions UM l’hectare alors que les coûts retenus par la Banque Mondiale se situent entre 900 000 à 1 100 000 UM/ha). Après réalisation, les périmètres ne sont toujours pas irrigables ! Il est actuellement question de reprendre les travaux pour amener l’eau… ;
La ligne haute tension pour le transport de 180 MW vers le Sénégal ne voit toujours pas le jour à cause du retrait de l’Agence Française du projet, pour tentative d’immixtion des autorités mauritaniennes dans ses procédures internes liées à l’attribution du marché… Une délégation sénégalaise était récemment en Mauritanie pour discuter du projet, elle est repartie bredouille ;
La société finlandaise WARTSILA a été retenue, dans des conditions opaques, pour la construction de la centrale électrique duale (fuel et gaz) de Nouakchott. Epinglée dans le cadre du rapport intitulé « export de la corruption » publié par Transparency International en 2012, condamnée pour corruption au Kenya par la justice finlandaise en 2013, cette société fait actuellement l’objet d’une enquête d’INTERPOLE qui a adressé, dans ce sens, une lettre aux autorités mauritaniennes impliquant un haut responsable mauritanien toujours en poste. La requête d’INTERPOLE n’a toujours pas reçu de réponse à ce jour …
La société chinoise qui a réalisé l’éclairage solaire à Nouakchott a été, tout simplement, exemptée du dépôt de la caution d’avance de démarrage ! Tout le monde sait que le partenaire de ladite société n’est autre qu’un membre de la famille du chef de l’Etat ;
Sous prétexte que le secteur privé national n’est pas performant, de nombreux marchés publics sont octroyés de gré à gré au Génie Militaire, à ATTM, à l’ENER et à la SNAT qui, aussitôt, les sous-traitent à des milieux proches du pouvoir, sur instruction des plus hautes autorités de l’Etat ;
Dans le cadre du dernier accord de pêche, l’Union Européenne a octroyé à notre pays un don de 20 millions Euro, destiné au développement du secteur privé. Faute de pouvoir « utiliser », à sa guise, ce montant, le pouvoir a fait comprendre, par la voix du premier ministre, à l’UE que la Mauritanie n’a pas besoin dudit financement…
C’est le lieu de rappeler que le pouvoir mène actuellement une guerre ouverte contre l’Union Nationale du Patronat Mauritanien en vue de destituer son président. Cette immixtion dans le fonctionnement d’une organisation syndicale transgresse les lois nationales et les conventions internationales auxquelles la Mauritanie a souscrit. Elle constitue, par ailleurs, une véritable menace pour le climat des affaires dans le pays.
Une évaluation internationale peu glorieuse
L’évaluation des politiques dites « publiques » engagées par le régime durant la période 2010-2014 sera appréciée à la lumière de l’évolution des principaux indices de gouvernance internationalement retenus. On constatera, dans ce qui suit, que tous ces indices reflètent un net recul du pays en dépit des immenses ressources et opportunités dont il a bénéficié :
La Mauritanie figure aujourd’hui dans la queue de peloton pour la qualité du climat des affaires. Du 157ème rang qu’elle occupait en 2008 elle est classée à la 176ème, selon le dernier rapport de Doing Business, publié en 2015 ;
Dans ce même registre, un rapport conjoint élaboré en 2015 sur «la compétitivité en Afrique» par la BAD, la Banque Mondiale, l’OCDE et le Forum Economique Mondial situe la Mauritanie à la 141ème place sur 148 pays ;
La qualité de vie des populations, dans leur ensemble, n’a pas bénéficié des fruits de la croissance soutenue enregistrée durant la période faste 2010-2014. Le taux de chômage de la population active reste, à 31,5%, parmi les plus élevés au monde, selon un rapport de la Banque Mondiale publié en février dernier.
L’Ouguiya s’est dépréciée de 46,52% par rapport au dollar américain, passant de 241 UM pour 1 $ en 2008 à 353,12 UM pour 1 $ aujourd’hui. La moitié de la population mauritanienne n’a pas accès à l’eau potable, selon un rapport du Programme Alimentaire Mondial (PAM).
L’Indice de Développement Humain (IDH), qui permet de suivre les évolutions dans les secteurs sociaux (santé, éducation, inégalité, pauvreté, genre…), traduit le recul enregistré par la Mauritanie dans ces différents domaines entre 2008 et 2015. Dans le classement IDH, la Mauritanie est, en effet, passée du 154ème en 2008 au 156ème rang sur 188 pays, en 2015 ;
L’indice «qualité de la gouvernance», qui intègre tous les critères objectifs d’appréciation dans ce domaine en Afrique, édite chaque année un rapport exhaustif. Selon la dernière édition de ce rapport parue en 2015, la Mauritanie a reculé de 13 points entre 2008 et 2015. Alors qu’elle occupait la 28ème place, elle se retrouve, aujourd’hui, reléguée à la 41ème place sur les 54 pays objet de l’évaluation.
Des conséquences désastreuses
De graves erreurs ont été commises en matière de gouvernance durant la période faste de 2010 à 2014. Elles résident essentiellement dans les options économiques prises à l’époque : une politique budgétaire expansive qui s’appuie sur une conjoncture passagère, une politique d’investissement anarchique, une étatisation poussée et anachronique de l’économie, une dégradation du climat des affaires, .
A partir de la mi-2014, l’économie nationale est entrée dans une périlleuse zone de turbulences. Le taux de croissance du PIB réel a accusé un net recul passant de 6,6% en 2014 à 2% en 2015, les exportations du pays ont fortement diminué pour atteindre un volume de 1510 millions USD environ en 2015 contre 2651,5 millions USD en 2013.
Les conséquences de ce choc auraient été fatales si on n’avait pas assisté, concomitamment, à une très forte baisse des prix mondiaux des hydrocarbures avec son double impact sur les importations et les recettes budgétaires. Les principales raisons de cette détérioration résident dans la chute des cours des matières premières sur le marché international.
Les blocages et autres tracasseries administratives, érigés en véritables barrières contre d’importantes opportunités économiques pour le pays (investissements, implication bénéfique d’entreprise performantes dans l’exécution des projets, etc.), conjugués au retournement de la conjoncture économique mondiale ont négativement impacté le flux des investissements directs étrangers en Mauritanie. Ce flux a enregistré une baisse de 80% en moins de 2 ans. En 2013 il était de 1126 millions USD, en 2015 il n’est plus que de 246,9 millions USD.
Les effets de cette conjoncture sur le budget de l’Etat sont transcrits dans les lois de finances pour les exercices 2015 et 2016 :
En 2015, la Loi de finances rectificative constate que «les recettes fiscales connaissent un manque à gagner relativement important reflétant le ralentissement de l’activité du secteur exportateur. qui se traduit par des baisses sur les revenus tirés de l’impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux, l’impôt sur les bénéfices non commerciaux et l’impôt minimum forfaitaire (BIC/BNC/IMF) de 8,60%, de l’impôt sur les traitements et salaires (ITS) à hauteur de 9,61%), de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) intérieure de 8% et de la taxe unique de la SNIM (43,50%)».
Elle constate, en outre, que « les recettes non fiscales seront amputées de 36 milliards d’Ouguiya, initialement prévus en provenance des dividendes de la SNIM et de 3,7 milliards d’Ouguiya sur les recettes pétrolières» ;
Pour 2016, la Loi de finances initiale fait état des baisses de recettes suivantes :
une baisse de la contribution de la SNIM aux recettes fiscales évaluée à 25,44 milliards d’UM sur les trois premiers trimestres de 2015 ; une baisse de 10 milliards d’UM sur la redevance unique de la SNIM pour la même période ;
une baisse de 8,35 milliards d’UM de la TVA sur les importations de la SNIM pour les mêmes trimestres ;
une prévision nulle sur les dividendes de la SNIM qui ont contribué aux recettes de l’Etat pour respectivement 37,25 et 37,77 milliards d’Ouguiya en 2013 et 2014.
Aujourd’hui, les principaux indicateurs économiques reviennent à des niveaux moins exubérants. Il est, dans ces circonstances, peu réaliste et même extrêmement risqué de greffer une politique budgétaire expansive sur une situation économique en grave crise.
Malgré cela, et en dépit de la grogne sociale montante qui se manifeste au niveau de l’ensemble des segments de la population du fait de l’appauvrissement généralisé, le pouvoir s’obstine à :
continuer à user de la pression fiscale en vue de compenser les recettes issues d’activités économiques productives par l’augmentation des prélèvements sur la consommation et le harcèlement fiscal des entreprises privées, dépassant ainsi le niveau de prélèvement soutenable par les citoyens et par l’économie.
En 2015, l’augmentation des impôts et des prélèvements s’est traduite par une augmentation générale de la TVA de 2% suivie d’une augmentation des impôts sur les produits pétroliers et sur le riz importé. En parallèle, l’Etat s’est obstiné à maintenir les prix à la pompe des produits pétroliers au même niveau, en dépit de la forte diminution de leurs cours sur le marché international. Il a réussi, par ce biais, à engranger, sur les six premiers mois de l’année, un montant de 25,3 Milliards d’Ouguiya.
Il y a lieu de noter que les recettes non fiscales sont en nette régression. La prévision sur ce chapitre est estimée à 89,4 Milliards d’UM en 2016 contre une réalisation de 147,34 milliards d’Ouguiya en 2015. Le ratio recettes non fiscales/recettes fiscales a évolué respectivement en 2013, 2014, 2015 et 2016 comme suit : 45%, 41%, 55% et 28% seulement.
continuer à dévaluer de façon inavouée l’ouguiya ;
recourir à des mesures d’austérité à des fins purement populistes, touchant essentiellement les revenus des employés de l’Etat et des entreprises qui lui sont affiliées.
Aussi, sommes-nous actuellement en face d’une situation explosive pouvant mener au chaos, suivant deux scénarii possibles :
soit les prévisions ne sont pas réalistes, débouchant sur des taux de réalisation insuffisants. Ce qui se traduirait par des crises de trésorerie et des blocages de la machine étatique avec toutes les conséquences paralysantes sur le reste de l’économie nationale.
L’activité économique serait alors plombée et l’Etat commencerait à accumuler d’importants arriérés vis-à-vis du secteur privé ; ce qui conduirait à la fragilisation du système bancaire et à des faillites en cascades d’entreprises dont les ressources financières auront été happées par une commande publique incapable de régler ses factures. Une telle situation se traduirait,
inéluctablement, par une pénurie d’intrants au niveau des secteurs sociaux, avec son lot de conséquences néfastes sur la qualité de l’Education et de la Santé, déjà fort mal en point.
Soit l’Etat s’obstinerait à faire rentrer les prélèvements, quel qu’en soit le prix, et il s’ensuivrait alors un appauvrissement généralisé pouvant générer, à la fois, une baisse de la consommation et – donc – une baisse des recettes fiscales et/ou des perturbations sociales pouvant menacer la sérénité et la stabilité du pays. La grève de l’impôt, qui est à redouter dans de telles circonstances, serait fatale à la pérennité de l’Etat et à son acceptation par la population.
L’accentuation de la situation de pauvreté touchant toutes les couches de la population conduirait, inévitablement, à la fragilisation du système traditionnel de solidarité qui maintenait jusque‐là la stabilité de la société et empêchait les dérives extrémistes.
La responsabilité de cette situation catastrophique incombe entièrement au pouvoir en place. Ce dernier semble ignorer les conséquences néfastes qui en découleraient, ce qui ne l’absout nullement de l’obligation d’y répondre, un jour, devant le peuple mauritanien.
« Bientôt les agresseurs connaîtront leur funeste destin », Saint Coran (Les Poètes, 227).
Nouakchott, le 16 Dhou Al Hija 1437 – 19 Septembre 2016
Le Rassemblement des Forces Démocratiques
Source : RFD