Dans cette interview exclusive que l’ancien gouverneur et membre du Bureau Exécutif du Manifeste pour les droits politiques, économiques et sociaux des Harratines a accordé à CRIDEM, M.Ahmedou Vall Ould Messaoud, évoque le décès tragique de l’ancien président du Manifeste, tout en déplorant la précipitation dont font preuve certains membres du Manifeste pour remplacer le défunt président.
Par ailleurs, il revient sur la question de l’esclavage et de la contribution des chancelleries occidentales installées à Nouakchott. «Le choix du futur président du Manifeste des Harratines doit obéir aux dispositions statutaires et réglementaires et tenir compte de la période de deuil de notre défunt président », explique M. Ahmedou Vall Ould Messaoud.
Cridem : La Mauritanie dans son ensemble vient de perdre une icône de la lutte pour les droits des haritines en la personne, de feu Hamody, vous qui l’avez connu et côtoyé que vous inspire cette perte ?
Ahmedou Vall Ould Messaoud : Le décès de feu Mohamed Saïd Hamody est une immense perte pour la Mauritanie en général et pour le mouvement d’émancipation des harratines en particulier. Au demeurant, j’ai eu l’honneur et le privilège de le côtoyer durant plusieurs années. L’homme était modeste, humble, il fuyait les honneurs et autres privilèges, il faisait partie de la « race des seigneurs », ces hommes intègres qui n’ont pour sacerdoce que l’amour du prochain. Il était loin de l’univers du paraitre, peu intéressé par les choses de ce bas-monde. Un signe de grandeur que seules les grandes âmes possèdent. Que le Très Haut l’enveloppe de sa miséricorde divine et l’accueil en son saint paradis Amen.
Cridem : Une semaine à peine après son décès, des proches de votre mouvement ont fait des sorties médiatiques parlant de son éventuelle succession, quel est votre point de vue ?
Ahmedou Vall Ould Messaoud : Nous regrettons profondément autant de précipitations qui viendraient comme un cheveu dans la soupe, dire que nous sommes en plein deuil. Pourquoi tant de précipitations ? Malheureusement certaines ambitions démesurées ont du mal à se contenir, à l’image de certaines sorties médiatiques, auxquelles, dubitatifs nous avons été les témoins. Nous devons savoir raison gardée et attendre le moment opportun, car les statuts et le règlement intérieur sont bien clairs…C’est l’assemblée générale qui désigne le futur président ; quant à l’évocation d’un premier et deuxième vice-président, elle ne figure nulle part dans les textes et règlements intérieurs du Manifeste. Et, nous nous opposerons ferment à toute volonté voulant passer outre la charte du Manifeste.
Cridem : Que vous inspire la démarche de certaines chancelleries du pays par rapport à la question de l’esclavage en Mauritanie, visiblement plus d’un haratine est resté sur sa faim ?
Ahmedou Vall Ould Messaoud : Vous avez parfaitement raison. Après l’immense espoir suscité par les rencontres et autres tournées, nous restons en effet sur notre faim. Nous n’avons pas vu un seul esclave alphabétisé par ces ambassades et encore moins libéré, d’autant plus que l’on dit qu’ «un esclave alphabétisé est un esclave libéré », pour paraphraser Abraham Lincoln.
Les ambassades n’ignorent pas qu’à Nouakchott, 80% de nos enfants n’ont pas accès à l’état-civil. Si les autorités, à commencer par la première d’entre elles, nient l’existence de l’esclavage, et répriment les défenseurs des droits de l’homme comme les cas des détenus d’Aleg condamnés arbitrairement en appel par le Tribunal d’Aleg (Biram Dah Abeid, Brahim Ould Ramdhane et Djiby Sow) est édifiant à plus d’un titre. Les esclavagistes de leur côté continuent à se frotter les mains, conservant sans problème leurs privilèges indus du fait du silence complice des chancelleries accréditées à Nouakchott.
Propos recueillies par Amadou D. NIANG
© Cridem/ 28 Août 2015
Source : Rédaction Cridem