Selon des déclarations faites sous couvert de l’anonymat par des cadres haratines membres de la mouvance présidentielle, et ressortissants de la Wilaya du Hodh Gharbi, la visite récente que vient d’effectuer le présidentMohamed Abdel Azizdans leur région, a été marquée par leur mise à l’écart et leur marginalisation.
Ils déclarent avoir mobilisé les foules et que les Haratines sont venus nombreux accueillir le président mais qu’il n’a été donné à aucun de leurs cadres d’avoir accès au Chef de l’Etat pour lui transmettre leurs problèmes.
Aucun des intervenants qui se sont exprimés devant le président de la République lors de la réunion des cadres ne représente, selon eux, les Haratines dont les cadres ont été empêchés de prise de parole car non inscrits dans la liste concoctée par les tribus dominantes.
«Ce qui nous a jusqu’ici pénalisé, reconnaît l’un d’entre eux, c’est que nous ne nous sommes jamais rapprochés de la presse pour l’informer de nos souffrances réelles, loin de l’hypocrisie auquel nous confine la peur de représailles ; nous sommes en général des fonctionnaires et nous savons qu’on vit dans une situation politique telle que n’importe qui peut s’exposer à des représailles, s’il tente de critiquer ce qui se passe».
Pour ces frustrés de la visite, la tournée de Mohamed Abdel Aziz au Hodh Gharbi, a été totalement récupéré par les notabilités et les cadres tribaux qui font la pluie et le beau temps, se partageant les richesses et les privilèges sans leurs autres composantes noires. A ce titre, les Haratines déclarent avoir ressenti encore plus profondément qu’ils n’ont pas de tribus.
Ils reconnaissent certes être rattachés à des ensembles tribaux, mais que ces derniers ne les considèrent que comme troupeaux électoraux et main d’œuvre serviable. Ils dénoncent ainsi cette hypocrisie de la solidarité intercommunautaire de l’ensemble Maure, qui se reconnaît en théorie dans sa composante blanche, les Maures blancs et dans sa composante noire, les Maures noirs ou Haratine. Cette confraternité qui sert dans les débats d’intellectuels, surtout pour illustrer les contours de l’unité nationale, s’arrêterait ainsi là. Lorsqu’il s’agit de partager les postes de nomination ou l’accès aux ressources, les Haratines sont oubliés.
Aussi, les Haratines du Hodh Gharbi déclarent qu’ils ne comptent aucun haut responsable dans l’appareil de l’Etat, ni dans les postes de directeurs ou directeurs généraux, ni ministre, ni secrétaire général, ni ambassadeur, ni président de conseil d’administration…Ils soulignent qu’il existe par contre des dizaines de Maures blancs ressortissants du Hodh Gharbi dans ces différents postes.
Aujourd’hui, les cadres haratines de la région, militants dans la mouvance présidentielle déclarent qu’ils ne peuvent plus supporter une si inégale répartition des opportunités et souhaitent que les autorités publiques prennent en considération l’intérêt de tous les citoyens sur des bases équitables. La règle d’or qui veut que les nominations et l’accès aux ressources passent par les ensembles tribaux doit selon les cadres haratines, être repensée, sinon les injustices sociales sources de marginalisation risquent de renflouer le camp radical.
A la longue, soutiennent-ils, les revendications Haratines, freinées par le souci de préserver l’ensemble Maure du spectre de la division, malgré leur soif de justice sociale, reposait sur leur conviction que leurs autres frères de la fratrie allaient rétablir le déséquilibre et leur faire partager les intérêts de l’ensemble tribal dans lequel ils sont intégrés.
Avec le temps cependant, ils constatent qu’ils resteront pour toujours des laissés pour compte, tant qu’une nouvelle volonté politique ne viendrait rétablir les équilibres de la balance sociale. Selon eux, cette logique de la «Assabiya»circonscrite aux seules familles nobles au détriment de leurs anciens esclaves, risque d’alimenter le camp de l’extrémisme. Les Haratines du pouvoir, comme on les appelle, et notamment ceux du Hodh Gharbi déclarent qu’ils ont toujours été qualifiés de traître de la cause haratine par leurs autres frères des courants radicaux.
Ces derniers les ont toujours accusés de faire la propagande des Maures blancs et de porter leurs discours, sur l’unité nationale, sur la cohabitation, sur l’esclavage, alors qu’ils ne font que maintenir encore davantage l’ordre féodal établi au détriment de leurs propres idées et de leurs propres intérêts.
C’est pourquoi, les Haratines du Hodh Gharbi, ont tenu à adresser cet appel au président Mohamed Abdel Aziz et au gouvernement, afin qu’une autre forme de rapport soit établie entre l’appareil de l’Etat mauritanien et ses administrés, lesquels doivent être traités dans l’égalité, la justice et l’équité, loin de l’hégémonie des groupes dominants.
MOMS
Source : L’Authentique (Mauritanie)