Jean-Baptiste LABAT, un négrophobe tortionnaire aux Antilles

C’était au milieu des années 1690, aux Antilles où sévissait un prêtre chrétien négrophobe, particulièrement sadique. Outre les sévices corporels atroces dont il s’enorgueillissait de l’expertise, ce tortionnaire de LABAT anéantissait mentalement les captifs africains les plus compétents en matière spirituelle ; leur compétence étant vécue par ce criminel comme une concurrence déloyale aux plaisanteries chrétiennes dont Labat faisait un très riche commerce aux colonies .

Saccage des objets de culte africains

Ainsi, en échange du baptême chrétien chèrement vendu aux Nègres, LABAT
confisquait les objets de culte africains de ses nouvelles ouailles ; en leur interdisant
formellement toute autre pratique spirituelle que les bondieuseries désenchantées
de cette organisation esclavagiste, cupide, pour laquelle travaillait ce prêtre charlatan.
Au demeurant, les pratiques spirituelles africaines étaient qualifiées de « sorcellerie ». Aussi, leurs protagonistes accusés d’être des « sorciers » risquaientils la condamnation au bucher – à être brûlés vifs – par un système judiciaire esclavagiste d’une répression arbitraire implacable.

L’on perçoit ainsi la manière dont le phénomène dit de « la sorcellerie » a été inventé
de toutes pièces par les prosélytes chrétiens, afin de disqualifier et réprimer
sauvagement les institutions ou pratiques spirituelles non-européennes, tout en
assurant l’hégémonie planétaire – ou plus exactement le monopole commercial –
des innombrables fétiches chrétiens : croix, chapelet, icônes, bible, statue, eau
« bénie », vin baptisé « sang du christ », morceau de pain tenu pour « chair du
christ », « lieux saints », etc.

Un jour de 1694 au Macouba, en Martinique, un Africain, propriété du « sieur
Philippe Mignac », vint réclamer à Jean-Baptiste LABAT le sac contenant ses objets
de culte africains que ce dernier avait confisqués trois mois auparavant. Grâce à
d’éminentes compétences acquises en Afrique, certainement via de longues années
d’apprentissage et initiation, ce Nègre (p.113) « faisait retrouver les choses perdues ;
il devinait, il prédisait l’arrivée des vaisseaux et autres choses à venir […] ».

L’incroyable savoir spirituel de cet Africain produisait d’impressionnants effets,
régulièrement renouvelés et concrètement vérifiables ; ce que LABAT lui-même ne
pouvait nier. D’ailleurs, ce cas n’était pas si exceptionnel, puisque d’autres de ses
collègues prêtre-charlatans avaient expérimenté de semblables aptitudes chez un
captif africain âgé seulement de neuf (9) ans, et qui était la propriété d’un certain P.
Fraisse « religieux de Toulouse ».

L’enfant, originaire de Ouida, qu’on avait baptisé plus tard « Amable », avait réussi
à faire tomber la pluie pendant une heure sur l’habitation de son propriétaire, en
pleine période de grande sécheresse, devant des prêtres-charlatans médusés. Et
lorsqu’on lui demanda d’où il tenait un tel pouvoir : (p.116) « il dit que c’étaient des
nègres de son pays qui le lui avaient enseigné dans la traversée, c’est-à-dire pendant
le voyage qu’ils avaient fait ensemble, de Guinée jusqu’à la Martinique. »

En d’autres termes, un petit Africain de neuf (9) ans pouvait apprendre, en quelques
mois de traversée, des techniques ancestrales particulièrement efficaces, qu’une vie
entière de bondieuseries échouait à enseigner à des professionnels du christianisme
n’excellant que dans la cupidité, la perversion sexuelle et la barbarie esclavagiste.

Ainsi, des décennies d’études bibliques approfondies n’étaient pas parvenues à
conférer au charlatan LABAT la moindre des compétences d’un nganga que par
jalousie il menaça de faire rôtir (pp.114-115) : « […] je le menaçai de le faire mettre
entre les mains de la justice, qui ne manquerait pas de le faire brûler, et pour lui faire
voir qu’il n’aurait jamais son sac, je dis à mon nègre de l’aller chercher et de le faire
brûler sur le champ. […] Je fis tout jeter au feu devant lui et le renvoyai chez son
maître […] il le vendit bientôt dans une autre île et me débarrassa ainsi de la peine
qu’il m’aurait donnée. »
Trois cents coups de fouet à un nganga !

C’était en 1698 au fonds Saint-Jacques, Martinique. Une captive africaine malade de
longue date, qu’avaient échoué à guérir tant de chirurgiens européens, obtint en
secret de se faire traiter nuitamment par un nganga, c’est-à-dire un prêtre du culte
des Ancêtres. Ces spécialistes africains des arts spirituels sont généralement versés
dans les sciences thérapeutiques, divinatoires, onirologiques, etc. ; tous savoirs et
techniques qu’ignorent les prêtres-charlatans chrétiens, et que depuis des
millénaires, les sama, hugan, et autres initiés africains apprennent au fil des étapes
de leur long parcours initiatique.

Fort malheureusement pour le nganga, Jean-Baptiste LABAT fut averti de sa
présence clandestine dans l’habitation des fous de Dieu (pp.116-118) :
« […] je fis saisir le sorcier et quelques uns des spectateurs qui n’étaient pas de notre
habitation. Je pris le marmousset, l’encensoir, le sac et tout l’attirail […] je fis attacher
le sorcier et je lui fis distribuer environ trois cents coups de fouet, qui l’écorchèrent
depuis les épaules jusqu’aux genoux. Il criait comme un désespéré et nos nègres me
demandaient grâce pour lui, mais je leur disais que les sorciers ne sentaient point de
mal et que ces cris étaient pour se moquer de moi. Je fis apporter un siège, j’y mis le
marmousset devant lui et lui dis de prier le diable de le délivrer de mes mains ou
d’emporter la figure : et comme il ne faisait ni l’un ni l’autre, je le faisais toujours
fouetter à bon compte.

[…] Je brisai l’encensoir et tout le reste de l’équipage, et, ayant fait apporter du feu,
je fis brûler toutes les guenilles du sorcier ; je fis piler les morceaux de la statue et
jeter les cendres et la poussière dans la rivière. […] Je fis mettre le sorcier aux fers
après l’avoir fait laver avec une pimentade, c’est-à-dire avec de la saumure dans
laquelle on a écrasé du piment et des petits citrons. Cela cause une douleur terrible
à ceux que le fouet a écorchés, mais c’est un remède assuré contre la gangrène, qui
ne manquerait pas de venir aux plaies. Je fis aussi étriller tous ceux qui étaient dans
l’assemblée pour leur apprendre à n’être pas si curieux une autre fois, et quand il fut
jour, je fis conduire le nègre à son maître […] »

 

Ce qui précède comporte plusieurs enseignements, dont voici quelques uns :

D’une part, on ne dira jamais assez que le christianisme est l’un des rouages
essentiels de la pérennisation du Yovodah. Sa fonction systémique consiste à
désarmer spirituellement les victimes potentielles de l’impérialisme esclavagiste,
afin de faciliter leur assujettissement politique et leur exploitation économique dont
l’institution chrétienne profite largement depuis des siècles ; la Banque du Vatican
étant, par exemple, l’un des coffres-forts séculaires du système impérialiste. Ainsi,
pendant que l’Eglise lui promet le ciel en détruisant ses cultes ancestraux, le Peuple
Noir se fait voler ses ressources terrestres, naturelles, par des multinationales ayant
souvent parti lié financièrement et idéologiquement avec le Vatican.

D’autre part, la destruction tous azimuts du culte des Ancêtres par les fous de Dieu,
tels que Jean-Baptiste LABAT, a progressivement disqualifié parmi les Africains de
précieuses compétences et savoirs que nos Ancêtres avaient patiemment
accumulés ; et dont le manque actuel est une cause fondamentale de notre errance
spirituelle, de notre déchéance technologique, de notre impasse civilisationnelle. De
fait, le « bois d’ébène » n’était pas qu’une simple force de travail spoliée à l’Afrique,
ce pouvait être un sage, nganga, paysan, forgeron, artisan, djely, musicien, etc.
D’innombrables ressources humaines de compétences, qualifications et talents
volés à l’Afrique pendant des siècles ! Avec la complicité du Pape. Les actes de
barbarie du charlatan LABAT, et de ses consorts qui sévissent encore de nos jours,
sont une atteinte radicale à l’identité culturelle négro-africaine dans ce qu’elle a de
plus vitale, énergétique. De sorte que la réhabilitation en Afrique même de notre
tradition spirituelle multimillénaire est un impératif catégorique, dans la perspective
de notre Régénération civilisationnelle en tant que Peuple Noir. Et fier de l’être !

Enfin, la persistance d’institutions et pratiques spirituelles ancestrales au sein des
sociétés de la diaspora africaine (Vodùn, Candomble, Senterià, etc.), notamment aux
Caraïbes et en Amérique, marque indéniablement à quel point l’être-africain des
Afrodescendants est demeuré vivace, malgré tant de siècles d’agressions,
disqualifications, tortures, aliénation. Aussi, prendre collectivement conscience de
ce que les Africains d’Autre-Rive n’ont jamais cessé d’être africains, malgré l’enfer
de l’univers concentrationnaire des Amériques ; cela revient-il à retisser tous les
liens familiaux de fraternité, solidarité, unité, entre le Continent-Mère et la Diaspora
nègre. Le cadre paradigmatique de cette urgente reconnexion à soi-même des
Panafricains, de ce Back-to-Africa, consiste indiscutablement dans le panafricanisme
afrocentrique.
Ni Dieu, ni Maître.
Nos Ancêtres sont la seule Voix !

KLAH Popo
afrocentricte.com