Il en est – ou, du moins, s’en déclare… – persuadé. Cela dit, l’heure est à l’officialisation de son dauphin. Et le temps presse car, même si le pouvoir actuel dispose d’une majorité à la soviétique, au Parlement, aux conseils régionaux et dans les mairies, une élection présidentielle n’est jamais gagnée d’avance, pour peu, bien évidemment, qu’elle réunisse toutes les conditions de transparence et d’équité.
En attendant, l’annonce du Président a sorti de leurs gongs plusieurs leaders de l’opposition. En affirmant que rien ne s’oppose à sa candidature, dans cinq ou dix ans – une allégation battue en brèche par le constitutionnaliste Lô Gourmo, vice-président de l’UFP –Ould Abdel Aziz avance l’idée de son comeback, à la Kérekou du Bénin ou, plus proche de nous, à la Buhari du Nigéria qui vient d’ailleurs de rempiler pour un second mandat.
Une seule similitude : tous trois sont des militaires. Mais le Nigéria et le Bénin sont fort différents de la Mauritanie, tout comme leurs pratiques démocratiques respectives.
Scenario en cours d’écriture ?
Pourquoi cette sortie présidentielle, en ce moment précis ? Alors que les rumeurs remettent, sur le tapis, l’option du troisième mandat et, surtout, annoncent l’officialisation imminente de la candidature d’Ould Ghazwani, pour succéder à son alter ego, Ould Abdel Aziz. Les deux hommes partagent beaucoup de choses et semblent se vouer mutuel respect. Auraient-ils fini de concocter leur deal sur la gestion du pays, pour les dix prochaines années ? Sous leur coupe réglée depuis 1978, les kakis ont taillé la démocratie de ce pays à la mesure de leurs vareuses, « pleines de poches », observait Mohamed Mahmoud ould Mah, ancien IGE et maire de Nouakchott.
Ould Ghazwani, que plusieurs sources estiment très peu friand du pouvoir, aurait-il accepté de jouer son Medvedev ? Selon les mêmes sources, il aura fallu plusieurs rencontres, entre les hauts gradés, pour convaincre le tout nouveau ministre de la Défense. Une nomination suivie, dans la foulée, de nombreuses autres, au sein de l’armée et de l’Inspection générale des armées et de sécurité. Des manœuvres que les observateurs inscrivent dans la préparation et le verrouillage du processus de succession d’Ould Abdel Aziz, par notre désormais très grande bavarde, l’armée. On évoque aussi d’autres rencontres, entre le président, certains chefs de corps et le potentiel dauphin, aux environs de Néma.
Eventuel ballon d’essai, la déclaration d’Ould Abdel Aziz peut être également interprétée comme un message à l’endroit de la majorité présidentielle dont certains pourraient s’inquiéter du départ du chef et être tentée par l’aventure de l’opposition. Comme on le sait, nombre de ministres, députés et anonymes sortis du bois n’ont pas hésité à exiger, du président de la République, sa candidature à un troisième mandat. Des invites transmises lors de visites présidentielles, campagnes électorales ou affichages, sur les panneaux publicitaires et autres poteaux électriques à Nouakchott.
Sans céder à cette pression, l’actuel Président a choisi d’entretenir longtemps le flou sur ses véritables intentions. Entre « je ne modifierait pas la Constitution, je ne briguerai pas un troisième mandat » et ses clins d’œil à ceux qui le prêchent, devant la présidence, les observateurs peinaient à trouver les bonnes grilles de lecture de ce discours bifide. Certains continuent d’ailleurs à se demander si Ould Abdel Aziz a fini d’écrire son scénario.
Un scénario que l’opposition démocratique, même si elle demeure, jusque-là, murée dans son silence, n’acceptera certainement pas d’observer en simple spectateur…
DL
Source : Le Calame (Mauritanie)