Monsieur
M. Pier Antonio Panzeri, président de la Sous-commission des droits de l’homme du Parlement européen, messieurs les élus, honorables. Je vous remercie de m’avoir invité et accueilli parmi en me permettant de m’exprimer sur un sujet d’une actualité réelle et brûlante dans mon pays, la république islamique de Mauritanie.
Chez moi, mesdames et messieurs, parler de l’esclavage est une hérésie ouverte contre l’islam, la religion d’État; la version locale de l’islam codifiant les pratiques esclavagistes, perçues comme licites, légitimes et même parfois un droit sacré; dénoncer l’esclavage, chez moi, est assimilable au crime de racisme et d’incitation à la haine raciale contre une partie de la population, les groupes dominants qui continuent à maintenir un mode de vie esclavagiste et un code d’honneur basé sur l’esclavage.
Ceux qui dénoncent l’esclavage dans mon pays, avec détermination et sans triche, sont déclarés valets des juifs ennemis de Allah, agents de l’Occident chrétien et croisé. Ceux résiste en refusant le silence et la compromission sur l’esclavage, sont interdits s’associer dans une ONG ou un parti politique ; ceux qui osent soulever les questions d’esclavage, soutenir ses nombreuses victimes en manifestant ou en recourant aux polices et/ou aux tribunaux, sont réprimés, torturés, jugés et condamnés à de lourdes peines de prison. L’un des plus grands motifs de cet état de fait est que mon pays contient à peu près 20% de la population qui sont des esclaves.
Ces esclaves sont issus du groupe ethnique (hratin) majoritaire, autochtone, et quasi-totalement, marginalisé, paupérisé, discriminé et exclu. Les hratin sont possédés comme esclaves, bien sur lesquels s’exercent tous les attributs de la propriété privé; ils sont possédés par leurs suzerains Arabie berbères, héritiers de l’État du colonisateur français; et bien qu’ils sont minoritaires, ils détiennent tous les leviers de commande politique, économique et judiciaire, cultuel.
Le pouvoir des groupes esclavagistes en Mauritanie instrumentalise la religion et le fanatisme jihadiste pour bâillonner et terroriser les anti-esclavagiste. Le pouvoir mauritanien instrumentalise aussi sa diplomatie pour cacher l’esclavage à la communauté internationale.
Pour cause la Mauritanie ratifie les conventions contre l’esclavage, édicte des lois contre l’esclavage mais viole systématiquement ses engagements. Il refuse de faire appliquer les lois sur l’esclavage aux contrevenants mais réprime durement et continuellement les défenseurs, militants, hommes politiques et élus, sincèrement anti-esclavagistes.
Notre ONG Initiative pour la Résurgence du mouvement Abolitionniste, créé en 2008, à été interdite; nous avons subi des dizaines d’arrestations, des cas de torture de manière massive et récurrente ainsi que 17 procès dont le motif est toujours notre engagement sans complaisance contre l’esclavage.
Nous sommes en grande majorité issus des populations servile et descendons d’esclaves et parfois nos membres l’ont directement subi. Moi même j’ai été deux fois arrêté, emprisonné, torturé, jugé et condamné à cause de mon militantisme contre l’esclavage et notre président Biram Dah Abeid, purge présentement son quatrième en emprisonnement à cause de son engagement contre l’esclavage et sa tentative de se faire élire au parlement mauritanien et faire élire une femme libérée de l’esclavage, comme député.
Il à été arrêté dès la validation de sa candidature pour l’empêcher de battre campagne pour les élections législatives de septembre 2018 et pour le priver d’une candidature déjà déclarée, pour les élections présidentielle de 2019. Élu député en prison, Biram Dah Abeid a été privé arbitrairement de son droit à l’immunité parlementaire et maintenu en prison à cause de ses positions anti-esclavagistes.
Ceux qui sont protégés par le pouvoir mauritanien, ce sont les groupes dominants esclavagistes. Les activistes anti-esclavagistes sont persécutés et les esclaves eux mêmes ne sont transmis comme propriétés dès leur naissance, et par la ligne de la mère. Dans les codes d’esclavage mauritanien, toujours en vigueur et enseigné dans les différentes écoles, l’esclave étant propriété de son maître, ce dernier peut le vendre, le louer, le céder.
Les femmes, filles et fillettes esclaves sont utilisées sexuellement à leur guise par leurs patrons. En Mauritanie, plus de 90% des populations esclaves, sont des femmes et des enfants ; les premières subissent le viol dès leur tendre enfance, les enfants quand à eux, sont astreints aux travaux dures et forcées dès l’âge de quatre à cinq ans. Ils sont bien sûr privés d’école et de pièces d’État civile.
Je vous remercie.
Source : IRA-Mauritanie