La Campagne « Ana Hartani Mani Barani » (littéralement : je suis harratine et non un étranger) a été lancée samedi 31 mars 2018 dans les locaux de SOS Esclaves.
C’était en présence du président de l’ONG, Boubacar Messaoud, de certains de ses anciens camarades de lutte comme Oumar Ould Yali, de l’ancien maire de Nouakchott et figure politique du RFD, Ahmed Ould Hamza ainsi que Nana Mint Cheikhna membre du même parti, de Ladji Traoré, activiste antiescalavagiste Soninké, de Bâ Alassane Soma dit Balas, président du parti Arc-en-ciel, de l’ancienne député et icône du parti UFP, Khadijetou Malick Diallo, de Samory Ould Bèye, président du mouvement El Hor et Secrétaire général du Syndicat libre des travailleurs de Mauritanie (CLTM), d’un large public représentant toutes les ethnies du peuple, dont une partie importante de jeunes et de femmes.
Au cours de son intervention, Maïmouna Mint Saleck dite Mimi, journaliste et activiste, l’une des leaders de la campagne « Ana Hartani Mani Barani » a expliqué que cette initiative est venue donner un contenu au Manifeste pour les droits politiques, économiques et sociaux des Haratines, un mouvement créé en 2013 et qui organisait le 29 avril de chaque année une marche populaire à Nouakchott.
Selon elle, des équipes ont travaillé sur ce projet à travers des focus groupes qui ont été créés pour la circonstance. L’idée centrale de la campagne est de faire connaître à l’opinion nationale et internationale que les Haratines réclament désormais une identité qui leur est propre dans un environnement social où ils sont exploités, discriminés et marginalisés depuis des siècles. « Ce n’est qu’une fois que le gap qui sépare les Haratines des autres communautés nationales sera comblé qu’on pourra ancrer la citoyenneté qui effacera toutes les particularités » a-t-elle affirmé.
« Ana Hartani Mani Barani » devient ainsi le nouveau slogan de la jeunesse haratine qui exige aujourd’hui la reconnaissance pleine et entière de leurs droits. Il en va non seulement de l’intérêt de cette frange qui est la plus pauvre et la moins servie en termes d’opportunités, mais de l’ensemble des Mauritaniens. Cette profession de foi, la totalité des intervenants y ont convenu. Selon eux, nul développement ne pourra avoir lieu si le tiers de la population reste analphabète, exploitée et ignorante.
Pour Aminetou Mint Mokhtar, présidente de l’ONG « Association des femmes chefs de famille AFCF », la campagne tombe à point nommé, à l’heure où des centaines de femmes Hartaniya sont vendues en Arabie Saoudite par des agences crapuleuses et non reconnues qui ont pignon sur rue, devant l’indifférence des autorités et la complicité des pouvoirs judiciaires.
A l’heure des revendications identitaires qui secouent la Mauritanie, Maïmouna Mint Saleck affirme que les Haratines sont les seuls à revendiquer leur identité Hassaniya tandis que les Bidhanes tendent vers une revendication de leur identité arabe. « En tout cas, personne ne peut imposer à qui que ce soit une identité donnée, car chacun doit respecter le choix culturel des autres » a encore souligné Maîmouna Mint Saleck.
Pour Nana Mint Mohamed Laghdaf, « la gabegie qui sévit dans le pays, et qui est devenue un moyen légalisé d’enrichissement illicite, n’a profité qu’aux Bidhanes, les Haratines et les africains de Mauritanie en ont été exclus ». Pour dire que même dans l’illégalité institutionnelle, les Haratines sont marginalisés. Enfin, tout le monde a conclu que le combat pour l’émancipation des Haratines et le recouvrement entier de leurs droits, est un combat qui doit fédérer tous les Mauritaniens, quelle que soit leur appartenance ethnique.
Boubacar Ould Messaoud est intervenue pour déclarer que le Manifeste des Haratines reste actif et fidèle à l’esprit de sa constitution, et qu’un nouveau bureau sera bientôt élu pour pallier aux défaillances structurelles qu’il traverse suite à la disparition de son ancien président, Mohamed Saîd Homody. Au vu des personnes présentes au cours de la cérémonie, la campagne « Ana Hartani Mani Barani » semble avoir fédérer les principales forces d’émancipation des Haratines, SOS Esclaves, le mouvement IRA et El Hor.
Cheikh Aïdara
Source : L’Authentique (Mauritanie)