Il y a quelques semaines, le président Mohamed Ould Abdel Aziz décidait de mettre en place une commission de restructuration de « son » parti, l’Union Pour la République (UPR).
La nouvelle structure semble être très vite allée en besogne, puisque c’est en à peine quelques jours qu’elle a procédé à des changements dans les textes, formulé des recommandations et proposé des actions, dont la plus emblématique est d’entreprendre une vaste campagne d’adhésion qui sera, probablement, suivie du renouvellement de ses structures.
Hors d’œuvre, donc, avant l’organisation des élections générales (municipales, législatives et conseils régionaux). La détermination des modalités pratiques de celles-ci, dont la désignation des onze sages d’une Commission électorale nationale indépendante, serait, nous dit-on, « très avancée ». Pour « superviser » les opérations de sa campagne d’adhésion, l’UPR a mobilisé des ministres, des directeurs généraux et quelques hauts responsables de l’administration.
Est-il nécessaire de rappeler les nombreuses irrégularités qui entachent un tel processus ? Il devrait aller sans dire que le Président réputé, dans une démocratie normale, celui de tous les citoyens, y compris de ses opposants, est censé rester au-dessus de la mêlée, en sa fonction de régulateur et d’arbitre que tous les protagonistes de la scène politique nationale pourraient solliciter, en cas de malentendu. Cela ira-t-il mieux en le disant ?
Il est aussi évident que la mobilisation des ministres, des conseillers à la Présidence et à la Primature, des directeurs généraux d’établissements publics dont certains, fraîchement nommés, n’ont même pas encore eu le temps de regagner leur nouvelle administration, constitue une enfreinte flagrante des principes de l’incompatibilité de diverses hautes fonctions avec l’activisme au sein d’un parti.
L’engagement zélé proscrit par ces principes n’a rien à voir avec l’adhésion légitime à une formation politique.
Il est aussi établi que la logistique utilisée, dans cette campagne : voitures en nombre, argent à flot et autres équipements ; ne provient, certainement pas, de la « poche » de ces « campagnards » pour qui tous les moyens sont bons, pour engranger le maximum d’unités de base, au profit d’un parti qui comptait, déjà en 2009, plus de sept cent mille adhérents. Vous avez dit corruption, messieurs les juges ?
À Nouakchott et à l’intérieur, la collecte des cartes d’identité nationale bat son plein. Comme l’argent, ces précieux documents n’ont pas plus d’odeur que de couleur. Tous (opposition et majorité) sont les bienvenus.
L’essentiel est d’en faire le plein. Puisque, nous informent diverses sources, chaque haut fonctionnaire doit former un maximum d’unités de base. Aux dernières nouvelles, le prix d’une carte d’identité, variable selon les personnes, tournerait entre dix et quinze mille (anciennes) ouguiyas. Des groupes mandatés courent les rues et tapent aux portes des maisons, pour négocier un prix aux éventuels candidats à la vente de leur carte.
Dans certaines régions, comme le Hodh Chargui, le règlement peut se faire en nature. Une carte d’identité nationale contre un sac de blé. C’est vraiment du « Gare à ta mère, ô dernier ! ». Les partis vont, les pratiques restent.
C’est quoi la différence, entre un PPM, un PRDS, un ADIL ou un UPR ? On annonçait les temps de la fraude et du mensonge politique en déliquescence. Mais voilà que les énergumènes de la félonie caméléonienne adaptent leurs usages et leurs forfaitures, en attendant des retournements imminents de vestes, boubous et autres pantalonnades.
Ould Abdel Aziz ne proclamait-il pas, pourtant, voici à peine trois ans, à qui voulait l’écouter des gens de son parti, qu’il préférait quelques centaines d’adhérents résolus à des millions sans conviction. Qu’a-t-il bien pu se passer depuis ? C’est vrai que les temps vont vite, nous ne sommes plus qu’à quelque quinze mois de la présidentielle de 2019.
Une confusion totale règne sur la scène politique, tant du côté de la majorité qu’en celui des diverses oppositions. La refondation de l’UPR serait-elle une diversion de plus, afin de fixer l’opinion nationale, jusqu’au parachèvement d’un processus longtemps enclenché dont les auteurs en seraient aux derniers détails de finition ? « Celui qui se dissimule avec les jours est nu », dit un dicton bien de chez nous…
El Kory Sneïba
– Le Calame –