Il est arrêté, ainsi que son adjoint, Brahim Bilal Ramadan et plusieurs autres militants d’IRA, en plus du président de l’ONG Kawtal, Djiby Sow. Aux termes d’une détention préventive de plus de deux mois, ils seront jugés. Les trois leaders seront condamnés le 15 janvier 2015, à 2 ans de prison, puis transférés à la prison d’Aleg.
Il est environ 10 heures, ce mercredi 11 novembre 2015. Des dizaines de militants du mouvement IRA (Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste) arrivent par groupes épars à l’intersection de la route du marchéNDiourbel et du Palais de justice de Rosso.
Certains sont venus de l’intérieur du pays pour commémorer le premier anniversaire de la détention de leurs leaders, à l’image de Kharchi, coordinateur d’IRA au niveau de l’Assaba. Toute la section d’IRA Sebkha a également fait le déplacement depuis Nouakchott, sans compter quelques leaders et plusieurs autres militants venus de plusieurs horizons.
Tôt le matin cependant, la ville de Rosso est soumise à un imposant quadrillage. D’importantes forces de l’ordre, en alerte maximum, sont déployées partout. Des Toyotas de la Police et de la garde nationale, remplis d’agents lourdement harnachés, sont stationnés sur tous les points névralgiques de la ville. Mais aucune tentative pour empêcher la manifestation n’est entreprise.
Le Wali aurait donné des ordres dans ce sens la veille, selon plusieurs correspondants de presse, C’est à 10 h 30 que les militants d’IRA s’ébranlent en rangs compacts, les mains lestées de banderoles claquant au vent et la bouche vociférant des slogans qui déchirent l’air.
« Non à l’esclavage foncier ! » « A bas le régime raciste ! » « Liberté pour les leaders détenus ! » « Notre sang, notre âme, nous te l’offrons Oh Birame ! »
Tout au long du parcours qu’ils ont complètement fermé à la circulation, le convoi draina une centaine de curieux. Les coiffeurs, les vendeurs de poisson, les commerçants et les artisans sont debout, chacun devant la porte de son lieu de travail. Des visages fermés, d’autres souriants. De la sympathie se lient sur certains d’entre eux.
La prison de Rosso est gardée comme For Knox par des unités de la garde, mitraillettes au poing. Ce qui fit ironiser Cheikh Ould Vall, un militant chevronné d’IRA. « C’est ridicule, nous n’avons aucun prisonnier là-bas et il n’y a même pas plus de 15 détenus dans cette bâtisse qui a plus l’air d’une porcherie que d’un lieu où sont détenus des être humains » persifla-t-il.
Sur la route menant vers le grand marché, une petite colonne de policiers à pied se place sur les côtés pour encadrer les manifestants. Au carrefour, plusieurs véhicules de la police et de la garde bloquent la circulation, alors que les manifestants continuent à avancer, masse de plus en plus compacte et colérique, soulevant une clameur qui domina tous les autres bruits.
D’énormes banderoles en bâche portent l’effigie de Birame et de Brahim, plus des slogans variés, tels « Non à l’esclavage foncier » « Des soins médicaux pour nos leaders » etc.
Un policier précède la masse noire bruyante jusqu’aux portes de la Wilaya, là où un cordon policier en tenues de combat ainsi que des gardes pareillement harnachés, attendent les manifestants.
Mais pas le moindre clash. Debout devant le Gouvernorat de Rosso, les manifestants s’étalent en une longue colonne le long du trottoir bordant la grande bâtisse jaune. Pendant près d’une heure, les militants d’IRA déversent leur bile sur le gouverneur, taxé de raciste puisqu’il avait refusé de rejoindre les manifestants. Le système en place ne fut pas non plus épargné, ni le présidentMohamed Abdel Aziz taxé « d’esclavagiste ».
Un quinquagénaire fendit la foule, pour fustiger l’attitude des autorités. « Le Wali avait demandé il y a deux jours aux populations victimes de problèmes fonciers de venir ce matin pour présenter leurs problèmes ; maintenant, je comprends que c’était juste pour faire diversion » Un autre, négro-africain originaire de Ganki se livra à un journaliste de radio.
« Nous vivons de véritables spoliations au niveau du Trarza ; à Ganki, des femmes ont été emprisonnées pour avoir refusé la rétrocession de leurs plantations de manguier à une femme qui avait fait main basse sur ces plantations avec la complicité des autorités. A Donaye, c’est le drame ; les populations ne peuvent même plus enterrer leur mort et pour rejoindre leur zone de culture, ils font des détours de plusieurs kilomètres.
Tout leur terre a été attribué à l’agro-business ». Plusieurs habitants de Rossosont solidaires de l’action menée par IRA, même si beaucoup affirment ne pas partager leur mode d’action.
JOB
Envoyé spécial
Source : L’Authentique (Mauritanie)