Le Calame : Vous venez de remporter le prestigieux d’école polytechnique Chalmers en Suède où vous travaillez avec une équipe de chercheurs en mathématiques appliquées. Que représente ce prix pour vous ? Quel travail il est venu couronner ce prix ?
Marbe Benioug :D’abord, je vous remercie pour cette interview et pour l’intérêt que vous portez à ce sujet. Concernant votre question, ce prix est une reconnaissance de mon travail et, bien sûr, un grand honneur pour moi. Il est l’aboutissement d’un long travail minutieux avec des collègues de diverses disciplines à l’école polytechnique Chalmers en Suède. Il s’agit de développement d’un logiciel de simulation de transport de masse dans des matériaux poreux mous. Avec l’aide de ce logiciel, il est désormais possible de créer des simulations de processus de transport dans différents matériaux, ce qui permet de comprendre avec une grande précision les propriétés de différents matériaux, et contribuera ainsi, à la transition vers des écomatériaux (matériaux écologiques), plus durables. Ce qui le rend le travail le plus important en termes d’impact social en Suède pour l’année 2020. Ce logiciel a été utilisé dans l’industrie de l’hygiène et pharmaceutique.
Ma tâche dans ce travail, était une modélisation tridimensionnelle des écoulements multiphasiques par la méthode de lattice Boltzmann.
-Depuis quand travaillez-vous sur ce sujet ?
-J’ai commencé mes recherches sur la modélisation mathématique du transfert de matière en milieu poreux depuis mes études de doctorat à l’Institut National Polytechnique de Lorraine (INPL) en France et je les ai poursuivies dans le cadre d’un projet financé par « the Recruitment Program of Global expert in China », au Centre de recherche en science computationnelle de Pékin (Beijing Computational Science Research Center (CSRC)), considéré comme le plus important au monde. En 2018, j’ai été contacté par des chercheurs à l’école polytechnique Chalmers, en Suède, pour intégrer le projet de recherche « CoSiMa – concept for industrial développement for the sustainable soft materials of the future », où plusieurs partenaires industriels et universitaires sont impliqués.
–Vous êtes aussi professeur- chercheur à l’université de Nouakchott, quel impact pourrait avoir ce prix au niveau des recherches menées dans notre pays dans votre domaine et sur nos étudiants et chercheurs ?
-A mon point de vue, le développement de la recherche scientifique dans une université, surtout une jeune université comme la nôtre est étroitement lié à sa coopération avec les autres universités. Dans ce contexte, je suis en train de monter un projet européen de networking avec différents partenaires (Mauritanie, Suède, France, Angleterre, Italie, Danemark, Vietnam, Japon, Mexique, …) autour des problématiques environnementales, concernant la réserve naturelle protégée du Banc- d’Arguin menacée par l’exploitation des hydrocarbures en mer et le changement climatique.
–Quelle appréciation vous faites de l’état de la recherche en Mauritanie, notamment au niveau des mathématiques et de la physique ?
-Personne ne peut nier le progrès tangible dans l’enseignement supérieur ces dernières années dans notre pays, par rapport à ce qu’il était. Cependant, cette évolution ne s’est pas encore accompagnée d’une évolution au niveau de la recherche. J’espère que l’Agence nationale de recherche scientifique récemment créée aidera à faire progresser la recherche scientifique dans notre pays. Je tiens ici, à saluer la création de cette agence. Pour moi, sa création va dans le bon sens et une révolution contre la pensée traditionnelle des responsables qui considéraient autrefois, que la recherche scientifique relève du luxe intellectuel qui n’en profite pas.
Propos recueillis par Dalay Lam
Source: Le Calame