Entretien avec M. Ebbabe Begnouk, député de l’Alliance Nationale Démocratique (AND) de Kaédi

Entretien avec M. Ebbabe Begnouk, député de l’Alliance Nationale Démocratique (AND) de Kaédi

Le Calame – « La mise en quarantaine de la ville procédait d’une nécessité absolue »
Le Calame : Etant un des députes de Kaédi, vous avez été le premier à demander aux autorités de procéder à la mise en quarantaine de la ville quand le premier cas de COVID 19 y a été déclaré. La réponse ne s’est pas fait attendre. Le quartier de Touldé, où vivait l’intéressé, a été bouclé. Pensez-vous cette décision a été salutaire pour les habitants de la ville?

M. Ebbabe Begnouk : La décision du gouvernement de mettre la ville en quarantaine est salutaire, importante et nécessaire. Bien que ce n’était pas du tout évident, les habitants ont commencé à y répondre positivement et comprendre son importance pour leur santé et celles de leurs familles.

Bien évidemment, les campagnes de sensibilisation ont efficacement contribué à clarifier le risque de ce virus et la vitesse de sa propagation. On peut dire qu’aujourd’hui, les habitants de Kaédi apprécient cette décision et la considèrent comme une décision sans précédent.

-Le confinement d’une ville, conjuguée à un couvre-feu engendre de grosses difficultés pour les citoyens vivant au jour le jour, contraints de rester chez eux. Comment les habitants de Kaédi ont vécu cette période de confinement?

– En tant que ville active, caractérisée par sa vitalité et son ambiance, son isolement n’était pas facile, mais l’apparition du cinquième cas dans la ville et sa situation frontalière ont rendu la question de l’isolement plus que nécessaire.

Sans le moindre doute, les habitants ont eu des difficultés de l’accepter, d’autant plus qu’elle était associée à la fermeture des marchés qui a redoublé la souffrance de la population. Notez que la majorité des habitants de la ville se basent dans leur vie quotidienne sur de simples activités journalières, au jour le jour (secteur informel). Résultat, plusieurs familles ont perdu leur gagne-pain quotidien, je veux dire leurs moyens de subsistance. Elles en ont beaucoup souffert. Cette situation était alarmante, nous espérons qu’elle disparaîtra rapidement et que la ville retrouvera son atmosphère d’antan.

-Vous avez ensuite demandé au gouvernement une intervention d’urgence pour aider les populations. Quelles sont les mesures qui ont été prises pour les soulager?

Il est vrai que nous avons demandé que l’isolement de la ville soit accompagné par des mesures touchant la vie des citoyens, comme la distribution de paniers alimentaires aux familles, la multiplication des magasins vendant du poisson et l’augmentation du nombre des Boutiques Emel.

Dans ce contexte et conformément à l’appel du président de la République, M. Mohamed Ould Cheikh El-Ghazwani, pour soutenir la population la plus démunie, le présidant du parti le Dr Yacoub Ould Moine a pris l’initiative de distribuer des vivres à plus d’une centaine de familles de la ville.

En outre, le gouvernement a rapidement répondu à notre appel, le ministère de la Pêche et de l’Économie maritime, grâce aux efforts considérables déployés par la société de distribution de poisson au niveau national, a redoublé les magasins de poisson en ville, ce qui a permis la fourniture de poisson dans tous les quartiers de la ville avec des prix symboliques, en plus de 6 nouveaux magasins EMEL qui ont été ouverts.

J’espère bien que la ville continuera à profiter des compagnes ultérieures du programme de distribution de paniers alimentaires et de certaines allocations financières substantielles.

-Quelle appréciation l’AND, votre parti fait-elle de la gestion par le gouvernement de la pandémie du COVID 19 ? Etes-vous d’avis que la situation est désormais sous contrôle, comme l’affirment les autorités ?

-Comme vous le savez, cette crise est survenue soudainement et a fortement dépassé les systèmes de santé les plus performants et les plus efficaces au monde.

La fermeture des frontières et l’interdiction des déplacements de la population, et donc l’encerclement de la maladie ont été véritablement les seuls moyens qui ont prouvé leur efficacité pour lutter contre la propagation de ce virus.

Ces mesures ont sans doute permis, Dieu soit loué, de maitriser la prorogation de ce virus dans notre pays, Néanmoins, il est important de souligner la nécessité d’une rigueur constante dans l’application de ces mesures, avec un accent très particulier sur le contrôle des frontières.

Je pense également qu’on doit impliquer davantage la population dans cette guerre afin d’aider et participer au contrôle des frontières et à combattre les infiltrations.

– Que pensez-vous de la mise en œuvre du fonds spécial COVID 19 ? Pensez-vous qu’il va profiter aux véritables nécessiteux ? N’avez-vous pas déjà perçu des voix des citoyens réclamant de la transparence dans le recensement et la distribution de l’aide?

-Il y a une concertation continue entre les partis politiques représentés au Parlement, y compris le nôtre. En ce qui concerne la gestion de ce fonds, je pense qu’il est encore assez tôt pour en juger.

Quant au recensement et à la distribution de nourriture, je pense qu’ils se déroulent comme il faut et les habitants en ont profité surtout que la majorité en a besoin.

Nous espérons que le processus s’étendra pour inclure le plus grand nombre possible de résidents des Wilaya intérieurs qui sont vraiment dans des situations très difficiles, accentuées qu’elles sont par le manque des pluies et la sécheresse enregistrée, ces deux dernières années.

-Le groupe parlementaire de l’UPR s’apprête à déposer un amendement demandant l’élargissement des compétences de la commission d’enquête parlementaire. Qu’est-ce qui, à votre avis justifie ce « réaménagement » quelques trois après la création de cette commission?

-Les commissions d’enquête font partie du travail du parlement qui reflète son niveau de sérieux et de responsabilité. Contrôler l’activité du gouvernement est au cœur du travail de la chambre législative et sa création n’a pas besoin d’être justifiée.

-La convocation justement de l’ancien président par cette commission d’enquête a suscité quelques réactions. Certains juristes avancent que la commission n’est pas habilitée à convoquer l’ancien président parce que celui-ci ne peut être poursuivi que pour « haute trahison », pour d’autres, Ould Abdel Aziz est redevenu un citoyen comme tout le monde, depuis son départ du palais, le 1er août 2019, et que par conséquent, il peut bien répondre à cette convocation. Vous penchez de quel côté, vous ?

-Il est bien connu que le travail des commissions d’enquête parlementaire doit être confidentiel, cependant, on entend, ici et là des rumeurs relatives aux convocations et auditions des responsables que la commission a bien souhaité entendre pour l’aider dans son enquête. Ce qui nous préoccupe, nous, en tant qu’élus, c’est surtout le rapport final qu’elle soumettra, à la fin de ses travaux.

Propos recueillis par Dalay Lam