Le 28 ème Sommet Afrique-France, le premier à se tenir en France sous la présidence d’Emmanuel Macron, aura lieu à Bordeaux, du 4 au 6 juin 2020. Une occasion pour le président Macron de définir les relations franco-africaines.
Pour le président français, ce sommet revêt une importance toute particulière, à un moment où les déboires s’accumulent tant au niveau national qu’international. Ce Sommet a choisi un thème un peu décalé par rapport aux préoccupations du continent africain: » La ville et les territoires durables pour changer la vie ».
La concession faite à Richard Attias
Le groupe international mondialisé, Richard Attias & Associates, bien connu pour ses compétences en matière de d’organisation d’événements d’influence mais aussi épinglé par les « Panama papers », a reçu la concession pour l’organisation matérielle. Le professionnalisme de ce groupe mondialisé, créé par le Marocain Richard Attias, établi principalement à New York avec résidence fiscale à Dubaï et néanmoins proche de l’ancien président Sarkozy et de la mairie de Bordeaux alors dirigée par Alain Juppe, est un gage de réussite de l’organisation.
Néanmoins, outre les prestations facturées, qui sont à la hauteur de la réputation de Richard Attias & Associates, cette concession fait débat non seulement dans certains milieux diplomatiques africains et des sociétés civiles de plusieurs pays africains mais aussi en France dans les rangs de l’opposition politique. Le Sommet de Bordeaux pourrait bien avoir des répercussions en politique intérieure française.
Le choix de Bordeaux
La Ville et la Métropole de Bordeaux offrent également des garanties pour le bon déroulement de ce sommet, avec un programme cultuel et sportif additionnel intitulé « Bordeaux à l’unisson ». Le Quai d’Orsay et la Secrétaire générale du Sommet de Bordeaux, l’ambassadrice Stephanie Rivoal, peuvent compter sur le réseau africain de Jean de Gaëtan Njikam Mouliom, 3ème adjoint au maire de Bordeaux, chargé des partenariats avec l’Afrique et Coprésident du comité national d’organisation du Sommet.
A l’instar de Jules-Bertrand Aniambossou, désormais ambassadeur en Ouganda, de Lionel Zinsou ou des députés franco-africains de la macronie, Jean de Gaetan Njikam Mouliom est désormais incontournable dans les relations franco-africaines. Cet ancien poisson-pilote d’Alain Juppe pour l’Afrique a une belle carte personnelle à jouer avec ce Sommet Afrique-France qui lui doit beaucoup d’être organisé à Bordeaux.
C’est par l’entremise d’Alain Juppé, alors maire de Bordeaux, que le président Macron avait porté son choix sur la ville de Bordeaux. En juin 2020, Alain Juppe sera au conseil constitutionnel, à Paris. Le 22 mars 2020, les élections municipales désigneront la nouvelle municipalité bordelaise. Si le successeur d’Alain Juppe à la mairie est actuellement en tête des sondages, son avance est très faible par rapport à son challenger écologiste. Qu’adviendrait-il en cas de succès du candidat écologiste ? Quel serait alors le rôle de Jean de Gaëtan Njikam Mouliom ?
Le thème choisi pas très porteur
Beaucoup de responsables africains s’attendaient à un thème plus en phase avec les réalités actuelles de la plupart de leur pays. Les flux migratoires, le terrorisme transnational, les questions sécuritaires, la décentralisation de l’aide internationale, la jeunesse et l’emploi, la dévitalisation de l’État sont également des préoccupations largement partagées. Certes l’écosystème urbain, l’urbanisme novateur, les transports urbains, les connexions au » nouveau monde », la mondialisation, l’environnement durable, sont souvent au centre des débats parisiens, mais le sont-ils aussi à plus de 100km des mégalopoles africaines qui ne sont souvent que des agglomérations de bidonvilles ?
Si le thème retenu est pertinent pour l’avenir des villes et territoires africains, il n’est pas sûr qu’il soit très mobilisateur pour résoudre les actuels problèmes qui se posent avec acuité aux pays africains avec leurs conséquences internationales et notamment pour la France.
La concurrence du Forum de Saint-Petersbourg
Très curieusement, le Sommet de Bordeaux se déroulera aux mêmes dates que le désormais célèbre Forum économique international de Saint Petersbourg (SPIEF). Chaque année, le SPIEF se déroule du 3 au 6 juin et accueille des chefs d’État, des ministres, des hommes d’affaires, des universitaires, des responsables des sociétés civiles et des dirigeants des organisations non gouvernementales du monde entier.
Cette année, du 3 au 6 juin 2020, le Forum présidé par Vladimir Poutine attend 20 000 participants, plus d’un millier de conférenciers et intervenants et 150 événements. Les investisseurs du monde entier sont invités pour le développement de la Russie mais aussi pour l’aide au développement de l’Afrique. Le » Davos russe » se veut être un forum pour mobiliser les échanges russo-africains. De nombreux dirigeants et chefs d’entreprise africains se rendront probablement à Saint-Petersbourg. Le Forum de Saint-Petersbourg portera-t-il ombrage au Sommet de Bordeaux ?
Ces aléas, prévisibles de longue date, ont été totalement acceptés par l’Élysée, aussi un Sommet Afrique-France en demi-teinte pourrait bien y trouver des causes identifiables.