30 November, 2018 – Le Calame
Très bonne nouvelle! La ministre de l’Equipement et des Transports, Mme Amal Maouloud, a annoncé, jeudi 15 novembre 2018, que la flottille de la compagnie nationale Mauritania Airlines sera renforcée par l’acquisition de deux nouveaux appareils aux mois de Mars et Avril 2019. Bonne nouvelle s’il en est pour cette jeune compagnie dont les liaisons ont connu des perturbations ces derniers jours suite, d’une part à une panne sur l’un de ses appareils, resté cloué au sol à Bamako et à l’immobilisation d’un autre pour une semaine, le temps nécessaire pour sa révision et son entretien, d’autre part.
Dans ces conditions, de nouvelles acquisitions sont donc et a priori nécessairement une bonne chose pour une petite compagnie qui essaye tant bien que mal de conquérir sa place dans un environnement d’une impitoyable concurrence livrée par des compagnies beaucoup mieux outillées et beaucoup plus expérimentées.
Mais, voyons : normalement si Mauritania Airlines arrive en un laps de temps assez court à payer de nouveaux aéronefs, après celui, flambant neuf, acquis l’an dernier, c’est que la compagnie se porte, disons, plutôt bien. Ici, on n’achète pas si facilement d’habitude et, lorsqu’il s’agit d’un avion de ligne, j’imagine que l’affaire doit être autrement plus délicate! Les règles de la bonne gouvernance exigent, n’est-ce pas, tout un circuit comprenant Commission des Marchés, Appel d’Offres (international, ici), Dépouillement, Adjudication, Transfert, etc.. Tout un circuit ! Avec ses innombrables formalités et contraintes en principe, incontournables. Mais, shut, ne parlons pas très fort, ici! Parce que, jusqu’ici, les prix des avions achetés par la MAI sont demeurés largement méconnus. Personne, en dehors de quelques rares initiés, ne sait à combien ces avions nous ont été facturés. Personne ne sait, parce que, ici, chez nous, on ne dit rien à propos de ce chiffre qui demeure entouré de mystère et d’opacité et ne saurait être décliné pour qui que ce soit. Egalement, même du côté des avionneurs, il ne faut pas chercher ces prix: ceux-ci, en raison, dit-on de la concurrence, ne déclinent jamais leurs tarifs réels et ne les affichent guère! Pis, en interrogeant le web, on ne pourra, non plus savoir: sur la toile, les prix, les vrais, ne sont jamais affichés, les tarifs, là aussi, sont top secret pour être diffusés de la sorte. «D’après les calculs exclusifs du site web Challenges, les réductions consenties aux compagnies aériennes et aux loueurs s’échelonnent de 47 à 62 % ». C’est ce que j’ai lu au terme d’une petite recherche sur la toile à ce sujet. Voyez donc comment et, peut-être pourquoi les prix des avions chez nous restent un secret bien gardé ! Cette opacité, savamment entretenue au niveau de l’avionneur et de l’acquéreur, est naturellement bien loin de favoriser la transparence dont le régime du président Ould Abdelaziz fait, pourtant, un slogan majeur de sa politique ! Certes, mais il faudra bien faire avec, en attendant…
Résultat, nos avions, nous ne savons pas combien ça coûte au contribuable : nous savons “bien” les acheter, les exploiter tant bien que mal, sans trop veiller au respect des horaires ni à la régularité des vols mais, pas plus.
Dans ces conditions, comment peut-on juger valablement si c’est une bonne chose ou une mauvaise chose pour le pays ou pour Mauritania Airlines d’acquérir un avion ?
Acquérir un ou des avions, Madame la ministre, doit certes être une très bonne chose mais c’est encore mieux de savoir combien ils nous ont coûté et comment on va les payer !
Si, pour une raison ou une autre, ces prix ne peuvent être connus, nous aurons réellement intérêt à attendre que l’usine d’assemblage d’avions de Nouakchott, qui dispose d’un terrain attribué depuis plus de 2 ans par le gouvernement, lance ses produits sur le marché ! Au fait et à propos, qui sait ce qui est advenu de ce gigantesque projet industriel dont plus personne ne parle aujourd’hui? Moi, en tout cas, je n’en sais pas grand-chose. En revanche, ce qui est sûr, c’est que, pour juger de la viabilité d’un commerce quel qu’il soit et de ses performances, il faut connaître les prix d’achat. Même le boutiquier du coin, c’est par là qu’il commence.
Sans connaître ces prix là, on ne peut juger valablement de l’état d’une entreprise commerciale et, encore moins savoir si on achète réellement des équipements dans l’intérêt de l’entreprise et du pays ou si, par contre, on achète à d’autres fins, bien connues ici.
Mais pour tout ça, attendons voir et un jour, on saura… tout se saura.
Ely Abdelah