Alakhbar – Le dernier accord d’association avec la CEDEAO est très prometteur, selon l’Ambassadeur de France en Mauritanie. Joêl Meyer indique dans ce contexte : « la Mauritanie possède un fantastique potentiel économique – et je ne parle pas seulement des perspectives en matière d’hydrocarbures ou des ressources minières, mais également des domaines de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche ». Le diplomate ajoute : « Au-delà des secteurs primaires, l’industrie devrait également se développer bénéficiant notamment d’une capacité renforcée de production d’énergie et d’électricité -renouvelable pour l’essentiel il faut le relever-, et d’un réseau d’infrastructures routières qui est appelé à être rénové et étendu.
Le secteur privé, national et étranger, devra avoir encore davantage sa place dans cette démarche de diversification de l’activité économique».
ALAKHBAR Info_ L’idée d’une force africaine du G5 Sahel est-elle synonyme d’échec de Barkhane ou une volonté de la France de sortir du bourbier sahélien ?
Joël Meyer: Je voudrais saisir l’occasion pour m’attarder sur l’objectif global du G5 Sahel et de l’action de ses partenaires, qui vont au-delà du seul aspect sécuritaire du problème. Mais je réponds déjà clairement à votre question en un mot: aucunement. En précisant aussi que la Force conjointe du G5 Sahel et la force française Barkhane n’ont pas le même mandat ni la même légitimité.
Comme vous le savez, le G5 et, plus récemment la Force conjointe, sont nés de la volonté collective de cinq Etats sahéliens de répondre aux menaces que font peser les groupes terroristes sur leur sécurité et sur leur développement, c’est-à-dire sur la stabilité de la région toute entière. Nous venons d’ailleurs de célébrer, le 19 décembre, le troisième anniversaire de la convention qui a juridiquement établi le G5 Sahel.
Cet évènement a donné l’occasion, au Secrétaire permanent du G5 Sahel et à ses experts sectoriels dont il faut saluer le travail, de nous faire mesurer le chemin accompli en trois ans pour mettre en place une véritable stratégie et répondre, de manière pérenne, à ce double défi de la sécurité et du développement, car il n’y a pas l’un sans l’autre, c’est une évidence.
Je fais à cet égard une incise pour souligner que la Mauritanie, dont le Président Monsieur M. O. A. Aziz est à l’origine du G5 Sahel, constitue un exemple, par les efforts qu’elle déploie et les résultats qu’elle obtient, dans la sécurisation de son propre territoire, mais aussi dans la mise en œuvre de l’approche globale qu’elle défend.
Une approche multiforme qui comprend plusieurs aspects : non seulement la lutte contre le terrorisme mais aussi la lutte contre le trafic de drogue et la criminalité transfrontalière en général -deux fléaux qui contribuent au financement du terrorisme-, la définition de politiques de prévention de la radicalisation, la mise en place d’actions de développement devant répondre aux besoins fondamentaux des populations, et,enfin,une volonté de présence réaffirmée de l’Etat et de ses services sur l’ensemble du territoire.
Depuis son lancement en août 2014, la force Barkhane vise quant à elle à accompagner les Etats de la région dans leur propre politique de sécurisation de l’ensemble de la bande sahélo-saharienne. L’opération Barkhane repose sur une démarche de partenariat et de coopération et non de substitution. A aucun moment il n’a été imaginé que la France puisse remplacer ces pays dans leurs propres responsabilités, souveraines, de sécurité et défense de leurs territoires.
J’ajouterai que la France veut elle aussi promouvoir au Sahel une stratégie d’ensemble, avec sa dimension non seulement sécuritaire mais aussi avec sa dimension de développement. S’agissant du Mali en particulier, il y a aussi une dimension politique, pour conforter la mise en œuvre de l’accord de paix et de réconciliation d’Alger.
Il s’agit également de favoriser l’implication de chaque acteur au service de l’intérêt général : l’Etat bien sûr, mais aussi les collectivités locales, le secteur économique privé, la société civile et les partenaires internationaux.
C’est ainsi le sens de l’initiative que la France, avec d’autres grands partenaires comme l’Allemagne, l’Union européenne et la Banque mondiale, a lancée, d’une « Alliance pour le Sahel ». Cette démarche, réalisée en pleine concertation avec les pays du G5 Sahel, cible des secteurs prioritaires et vise à rendre l’action des partenaires au développement à la fois plus rapide et plus efficace sur le terrain.
ALAKHBAR Info_ Quelle date peut-on préciser pour le déploiement du premier soldat de la force du G5 Sahel ?
Joël Meyer: Cette Force conjointe est déjà une réalité concrète sur le terrain. Votre question résume bien cependant tout l’enjeu des actions qui ont été intensément menées ces dernières semaines, tant sur le plan politique, diplomatique que militaire, par les pays du G5 bien sûr, et par leurs partenaires. Il s’agit d’accélérer l’opérationnalisation de cette Force conjointe.
Ce processus a été bien enclenché. Il y a eu, le 8 décembre,la deuxième résolution du Conseil de sécurité des Nations unies qui entérine le principe d’un soutien des Nations unies entre ces dernières et la Force conjointe, via une coopération concrète entre la MINSUMA et la Force;
il y a eu aussi la première intervention commune des forces armées de trois pays au titre effectif de la force conjointe du G5 – c’était l’opération Haw Bi en novembre 2017, aux frontières du Burkina-Faso, du Niger et du Mali; il y a eu, enfin, cette réunion à haut niveau de Paris, le 13 décembre dernier, regroupant les bailleurs intéressés à soutenir financièrement et matériellement la Force conjointe.
Pour bien marquer leur engagement solidaire et durable, ceux-ci ont d’ailleurs créé une « coalition pour le Sahel », une coalition internationale très élargie, et qui, il faut le souligner, associe de grands partenaires du monde musulman et arabe, comme l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis.
C’est un processus continu mais le premier semestre 2018 sera décisif.
ALAKHBAR Info_ Le Tchad et la Mauritanie traînent le pied quant au déploiement de la force du G5. L’Algérie est réticente, même si elle n’est pas membre du G5. Comment la France pourrait convaincre ces pays à changer d’avis ?
Joël Meyer: Nous ne percevons pas les choses de cette manière. La Force conjointe a été unanimement voulue par les pays du G5. Il n’y a pas de divergence, et nous partageons, nous aussi Français qui avons eu récemment l’honneur de porter le débat au Conseil de sécurité de l’ONU,le souci de Nouakchott que cette initiative soit accompagnée d’un soutien fort des Nations unies et dotée de moyens disponibles dans la durée.
Le président Emmanuel Macron l’a bien souligné lors de la réunion du 13 décembre à Paris. Et les premières étapes que j’ai citées plus haut, saluées par tous, vont dans ce sens. De même, plusieurs membres du G5 entretiennent un dialogue avec les pays de leur voisinage et c’est une excellente chose.
Le président de la République française a lui-même récemment eu l’occasion d’évoquer avec son homologue algérien la coopération sur la sécurité et la lutte contre le terrorisme dans la bande sahélo-saharienne. C’est l’intérêt de tous les pays de la région. Lire: Sahel – la force du G5 et les symptômes d’un échec
ALAKHBAR Info_ Quelle est votre réponse à ceux qui pensent que la France voudrait forcer l’entrée du Sénégal dans le G5 Sahel ?
Joël Meyer: Le Sénégal est un acteur essentiel dans la contribution qu’apporte l’Afrique de l’ouest, qui a pu être frappée par ce fléau au-delà même du Sahel,à la lutte contre le terrorisme. Et ce pays fait partie de la stratégie Sahel de plusieurs partenaires au développement, dont la France. Il ya donc sûrement des synergies possibles mais il revient évidemment aux membres du G5 de décider le périmètre de leur organisation, pas à d’autres.
ALAKHBAR Info_ Est-ce que la France soutient la tendance contre le 3e mandat en Afrique ? Avez-vous reçu des garanties personnelles du Président Mohamed Ould Abdel Aziz de ne pas se présenter aux prochaines élections présidentielles ?
Joêl Meyer: Je crois que le Président de la République islamique de Mauritanie a répondu publiquement à votre question l’année dernière. Je ne me permettrai pas de commenter ses déclarations qui ont été claires à ce sujet.
ALAKHBAR Info_ Est-ce que la France considère comme transparent le référendum constitutionnel du 5 août 2017 en Mauritanie ?
Joêl Meyer: Je me réfère aux décisions d’une des plus hautes institutions du pays, le Conseil constitutionnel qui a validé les résultats du référendum. Et je me base sur les faits. Il y avait possibilité de recours, il y en a eu, ils ont été étudiés par le Conseil qui les a rejetés. Lire : Mauritanie: « Les élections sont par définition inclusives » (Ambassadeur de France – interview)
ALAKHBAR Info_ Comment la France imagine déjà la Mauritanie de 2019 ?
Joêl Meyer: Je répondrai plus largement sur les perspectives qui s’offrent à la Mauritanie.
Le pays ne peut que faire fructifier les nombreux atouts qu’il détient. Le premier d’entre eux est la richesse des talents de sa population. Il faut faire confiance à tous ceux qui veulent s’investir dans l’avenir de leur nation –je pense aussi aux plus jeunes dont j’ai pu vérifier cette volonté de jouer pleinement leur rôle de citoyen, et ce qu’elle que soit leur appartenance sociale-.
Ce dynamisme est une chance car il est fédérateur pour renforcer la cohésion nationale. Je pense aussi que le pays va saisir toujours plus avant l’avantage que lui offre sa position géographique. Creuset de cultures, il est amené à constituer un hub économique pour desservir les Etats voisins.
Un rôle essentiel pour l’intégration économique régionale, un catalyseur de richesse et de croissance de toute la zone, et dont la Mauritanie sera la première bénéficiaire. Le dernier accord d’association avec la CEDEAO est d’ailleurs très prometteur.
Enfin, la Mauritanie possède un fantastique potentiel économique – et je ne parle pas seulement des perspectives en matière d’hydrocarbures ou des ressources minières, mais également des domaines de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche.
Au-delà des secteurs primaires, l’industrie devrait également se développer bénéficiant notamment d’une capacité renforcée de production d’énergie et d’électricité -renouvelable pour l’essentiel il faut le relever-, et d’un réseau d’infrastructures routières qui est appelé à être rénové et étendu.
Le secteur privé, national et étranger, devra avoir encore davantage sa place dans cette démarche de diversification de l’activité économique. Les initiatives se sont multipliées pour renforcer l’attractivité du pays, et il faut les saluer- je pense en particulier à la loi qui encadre les domaines et les conditions de création des partenariats publics privés, ou encore aux mesures engagées pour la transparence des activités du secteur extractif (ITIE)-.
Ce sont autant de signaux positifs adressés aux opérateurs économiques. Bien sûr, comme dans tout pays, il faut chercher en permanence à consolider un climat de confiance qui permette de sécuriser pleinement les échanges commerciaux et les investissements privés.
Voilà, en résumé, autant de facteurs qui doivent permettre une économie nationale forte et une croissance partagée au profit de tous les Mauritaniens. Le changement de monnaie, pour lequel je félicite la Mauritanie, devra être aussi un élément stimulant pour le pays.
Maintenant, si vous votre question porte sur les échéances politiques ces prochains mois et en 2019, je dirai qu’il appartient aux peuple mauritanien de décider de son avenir et les élections doivent en être l’occasion.
ALAKHBAR Info_ Vous avez rencontré plusieurs opposants mauritaniens. Qu’est ce que la France attend de l’opposition mauritanienne ?
Joêl Meyer: Là aussi, je me permettrai de répondre plus globalement. Compte tenu de nos liens séculaires et amicaux, il est normal que la France ne se désintéresse pas de la vie publique mauritanienne et de son évolution, que ce soit au niveau social, économique ou politique.
Et l’inverse est certainement vrai pour la Mauritanie envers la France. En plus de trois années de présence ici, j’ai rencontré de très nombreuses personnalités publiques, de l’opposition comme de la majorité.
Mais également des acteurs de ce qu’on appelle la société civile, des syndicalistes, des journalistes, des responsables d’associations et du monde culturel, des opérateurs économiques etc…Je me suis entretenu avec des interlocuteurs remarquables et dévoués à leur pays.
Des personnalités engagées depuis longtemps dans l’action politique, sociale ou économique, mais aussi de jeunes citoyens comme ceux que je mentionnais précédemment. J’espère vivement que ces forces vives du pays et qui viennent de toutes les composantes de sa société, puissent conjuguer leurs compétences pour préparer leur avenir ensemble au sein de la grande Nation mauritanienne, dans un esprit de respect mutuel.
ALAKHBAR Info_ Quelle est la position de la France sur la situation des Droits de l’homme en Mauritanie ? Précisément, quels sont les dossiers qui vous préoccupent dans ce domaine ?
Joël Meyer: Même dans les démocraties qui se veulent les plus abouties, on doit demeurer vigilants et rester dans une démarche de renforcement des droits humains – prenant aussi davantage en compte les droits économiques et sociaux.
C’est ainsi qu’en Europe, il nous revient de poursuivre la lutte contre la précarité sociale et les discriminations ou préjugés de toutes sortes qui peuvent encore exister, malgré les mesures prises par les gouvernements.
En Mauritanie, il faut reconnaître le parcours accompli ces dernières années pour faire prévaloir l’Etat de droit, la gouvernance, les libertés publiques. De même faut-il souligner les efforts pour parvenir à un développement inclusif qui réponde aux besoins vitaux -lesquels sont autant de droits fondamentaux- de l’ensemble des populations, comme accéder à une santé et à une éducation de qualité.
Tous ces sujets sont abordés dans le cadre du dialogue bilatéral que nous avons, dans la franchise et dans le respect de la souveraineté mauritanienne. Comme je le disais, dans tout pays il convient de chercher à consolider les acquis qui sont toujours perfectibles.
En appui aux autorités mauritaniennes et en concertation avec elles, nous avons mis en place des programmes et des actions d’accompagnement. Nous travaillons avec chaque acteur, les ministères et les différentes institutions de l’Etat en premier lieu bien sûr, mais aussi la société civile, et ce en toute transparence.
Je crois aussi que, comme en Europe d’ailleurs, ce qui est important et relève de la responsabilité collective, c’est le « vivre ensemble ». C’est l’intérêt de tous. Dia Alassane: « On refuse l’identité mauritanienne aux Noirs de Mauritanie »
Comme observateurs, nous sommes naturellement attentifs aux cas individuels dont certains sont actuellement pendants devant la Justice mais c’est à cette dernière institution qu’il incombe, selon l’expression consacrée, de dire le droit.
ALAKHBAR Info_ Quels sont les domaines de coopération entre la France et la Mauritanie ? Comment vous évaluez le niveau de cette coopération ?
Joël Meyer: Pour la France, la Mauritanie est un partenaire stratégique. Notre dialogue est excellent et j’ajouterai qu’il est empreint d’un climat de confiance et d’amitié.
C’est vrai pour la qualité des échanges que nous avons sur les efforts qui doivent être collectivement menés afin de stabiliser la région du Sahel – il est régulier entre les deux chefs d’Etat mauritanien et français ces derniers mois vous le savez-, ainsi que sur les grands enjeux de paix en Afrique ou sur les défis internationaux majeurs.
La contribution personnelle du Président Aziz à la résolution pacifique de la crise gambienne ou encore la participation de la Mauritanie à la mission des Nation unies en Centrafrique– malheureusement endeuillée il y a peu par le décès d’un gendarme mauritanien dans l’accomplissement de sa haute mission- méritent la reconnaissance de la communauté internationale.
De même notre concertation a-t-elle été étroite sur la COP21 de fin 2015, qui s’est concrétisée à Paris avec la présidence commune, par les chefs d’Etat mauritanien et français, de la réunion du 1er décembre consacrée à l’Afrique.
Cette réunion aura permis que des décisions historiques soient prises en faveur du continent africain, et de la planète en général, pour combattre le changement climatique et neutraliser le processus du réchauffement.La participation du Président mauritanien au sommet « OnePlanet » à Paris en décembre dernier aura confirmé cette même volonté solidaire de préserver notre planète.
Les dossiers « chauds » de l’actualité internationale sont également l’objet de concertations régulières. Par exemple, nos positions sur la situation au Proche-Orient se rejoignent et nous sommes attentifs à ce que Nouakchott nous dit, car nous savons son influence au sein de la Ligue arabe dont d’ailleurs elle a accueilli avec succès le sommet en juillet 2016.
Sur le terrain, notre partenariat bilatéral est riche, qui couvre de nombreuses politiques publiques : santé, éducation, énergie, eau et assainissement, infrastructures, gouvernance économique, Justice et Etat de droit…. Il s’exprime aussi par un appui à la gouvernance locale (communes) ainsi qu’à la société civile, notamment les associations de jeunes et de femmes, grâce en particulier à l’initiative « FAJR » pour renforcer l’expression de la citoyenneté.
Ce partenariat se manifeste au travers d’acteurs comme le Service de Coopération et d’Action Culturelle de l’ambassade et l’Agence française de développement, sans oublier les initiatives des collectivités territoriales ou des ONG françaises avec leurs homologues mauritaniennes.
Si l’objectif est d’abord de répondre aux besoins fondamentaux de toutes les composantes de la population nationale, notre coopération oeuvre également dans des secteurs où la Mauritanie est en pointe et peut servir de référent, comme le secteur des énergies renouvelables.
Ce qui est cohérent avec notre engagement commun pour contrer le changement climatique. L’enseignement supérieur est également un domaine d’excellence privilégié alors que nous soutenons la Mauritanie dans sa démarche de mise en place de filières préparatoires aux grandes écoles d’ingénieur francophones de France et du Maghreb et dans le développement des cycles de formation d’ingénieur.
Nous mettons également en œuvre un projet pour l’employabilité des étudiants grâce à la maîtrise des langues arabe et française, et ce avec l’Université de Nouakchott Al Aasriya en partenariat avec l’Université de Clermont Auvergne et l’Université Mohamed V de Rabat.
Et vous savez, comme le Président Macron l’a annoncé lors de son déplacement à Ouagadougou en novembre, que la jeunesse et l’éducation sont des domaines d’action prioritaires pour nous car ils constituent les gages de la réussite de l’Afrique de demain.
ALAKHBAR_ Info La Chine poursuit sa conquête de l’Afrique. Est-ce que la France se sent menacée dans ses zones d’influence sur le continent par la Chine ? Pourquoi la Chine devance la France en termes d’échanges commerciaux avec la Mauritanie ?
Joêl Meyer: D’abord, et je voudrais me référer à nouveau aux déclarations du président de la République française à Ouagadougou, nous ne raisonnons plus en « zone d’influence ». Il y a des relations historiques et le plus souvent amicales entre la France et de nombreux pays d’Afrique mais le monde d’aujourd’hui est ouvert. Il n’y a pas d’exclusivité.Fort heureusement.
Et d’ailleurs, d’une certaine manière, le président Emmanuel Macronl’a démontré en se rendant lui-même récemment dans un pays anglophone, au Ghana … C’est la « mondialisation ». Bien sûr, cela ne doit pas signifier que tout est permis.
C’est une concurrence qui doit être équitable, avec des règles claires, et qui doit être stimulante pour l’économie en général. Et je n’ai pas de doute que les pays africains savent défendre leurs intérêts dans cet environnement concurrentiel.
La Chine est un partenaire essentiel, et pour nous tous d’ailleurs, Africains et Européens. La France a de nombreux partenariats avec elle et je sais l’importance de son appui ici en Mauritanie. Je voudrais faire remarquer que nous ne sommes pas toujours concurrents sur ce continent et nous essayons de monter des projets communs. Un forum franco-chinois s’est d’ailleurs tenu à ce sujet à Pékin l’année dernière.
Il convient aussi de relativiser le recul de la présence économique française. Dans un monde de libre concurrence, il est normal que de nouveaux acteurs apparaissent mais nos entreprises ont su s’adapter à ce climat compétitif et leur savoir-faire plaide pour elles et reste très apprécié.
C’est le cas en Mauritanie : plus de soixantaine sociétés françaises ou filiales sont présentes dans le pays, dans des secteurs variés, de l’énergie, du BTP, de la logistique, des services bancaires etc ; ces entreprises ont créé trois mille emplois mauritaniens directs et des dizaines de milliers de familles dépendent de leurs activités.
Et je remercie les autorités mauritaniennes d’avoir fait confiance à leur expérience pour accompagner plusieurs projets récents, qui sont essentiels pour le développement du pays, en particulier dans le secteur des énergies renouvelables et de l’électricité.
ALAKHBAR Info_ Comment vous expliquez la contradiction Macron ? Le Président français donne des leçons au Venezuela. Mais refuse cela quand il s’agit de l’Egypte d’Al-Sissi ?
Joël Meyer: Il y a, quand c’est utile, la diplomatie publique (je signale d’ailleurs que la préoccupation française sur le Venezuela est partagée par une large partie de la communauté internationale et de nombreux membres de l’organisation des Etats américains eux-mêmes) et il y a les discussions franches et sincères qu’on peut avoir aussi avec des pays amis sans faire de publicité. Cela ne nuit pas nécessairement à la force du message.