Chevalier dans l’Ordre des Arts et Lettres, Ordre créé, je vous le rappelle, en 1957, destiné à honorer les mérites des «personnes qui se sont distinguées par leur création dans le domaine artistique ou littéraire ou par la contribution qu’elles ont apportée au rayonnement des arts et des lettres en France et dans le monde ».
Mesdames, Messieurs,
Je vais décorer Mme Hindou Mint Mohamed Aïnina qui a fait honneur à notre République par son action et son engagement personnel.
Avant de lui remettre les insignes, conformément à la tradition, permettez-moi de dire qui est cette personnalité méritante, qui se cache derrière cette femme en retraçant rapidement son parcours qui lui vaut, aujourd’hui, de recevoir cette distinction française, même si la majorité des personnes présentes, ici, ce soir, connaissent bien mieux Mme Hindou que moi.
Après des études pour devenir enseignante, Mme Hindou Mint Aïnina se retrouve journaliste un peu par hasard, en 1989. Avec une bande d’amoureux de l’écriture et des belles-lettres (M’Barek o/ Beyrouk, Idoumou o/ Mohamed Lemine qui sont présents ici ce soir parmi nous (et qui vont aussi être décorés), elle participe au lancement de « Mauritanie demain », seul journal indépendant de l’époque, dont la périodicité est aléatoire.
Ces « contestataires » s’indignent des massacres entre Maures, Haratines, Peuls ou Wolofs à la frontière sénégalo-mauritanienne. « Il y a eu alors beaucoup de morts, déplore-t-elle, alors que tout le monde cohabitait pacifiquement jusque-là. » En 1993, vous faites partie de la rédaction de l’hebdomadaire Al-Bayane, lui aussi contestataire et lui aussi censuré.
La même année, vous devenez la rédactrice en chef du journal d’expression française Le Calame, où vous défendez auprès des lecteurs – je cite – « l’apprentissage de la liberté, de l’égalité et de la démocratie ».
Et surtout de l’égalité, car vous affirmez : «on ne naît pas égaux, il faut le devenir. Dans tout le Sahel, si on n’apprend pas l’égalité, il est impossible de sortir du statut social où l’on est enfermé ». Jusqu’en 2007, cette conviction fonde le combat de la rédaction du Calame, dont vous êtes la rédactrice en chef.
En parallèle, le 15 décembre 2005, le Premier ministre de l’époque, Sidi Mohamed Ould Boubacar, vous nomme membre de la Commission nationale consultative pour la réforme de la presse et de l’audiovisuel (CNCRPA).
Puis, vous entrez dans le monde de la politique. Hindou Mint Aïnina est nommée conseillère en communication et en relations avec la société civile du Premier ministre, Zeine Ould Zeidane, de 2007 à 2014.
En août 2014, le Président de la République, Mohamed Ould Abdelaziz, la choisit comme Ministre déléguée chargée des Affaires maghrébines, africaines et des Mauritaniens de l’étranger, puis, début 2015, comme Ministre de la Culture et de l’Artisanat. Vous occuperez ces fonctions jusqu’en avril 2016.
Tout au long de votre mandat, vous vous êtes efforcée de dynamiser votre Ministère et de soutenir, sans distinction, toutes les formes d’expression artistiques. Les artistes mauritaniens ont ainsi pu trouver une écoute bienveillante à leur égard.
Vous êtes également membre active du Centre d’Etudes et de Recherches sur l’Ouest Saharien (CEROS), association de recherche scientifique basée à Nouakchott qui s’est fixée comme objectif de contribuer au développement de la recherche en sciences humaines et sociales sur l’Ouest Saharien.
Mme Hindou Mint Aïnina, Mme la Ministre,vous êtes une femme de convictions, résolument moderne, imprégnée d’une réelle culture politique progressiste. Forte de ces convictions et de votre éducation politique familiale, vous dénoncez et luttez contre toutes les formes d’archaïsme et d’obscurantisme qui traverse la Mauritanie contemporaine.
Proche des individus, vous êtes une femme simple et humaniste, francophone et francophile, très attachée aux valeurs que la France porte et défend. Vous incarnez une Mauritanie ancrée dans le monde, ouverte sur l’extérieur, fière de ses diversités.
Cette distinction vient souligner et récompenser, d’une part, votre attachement à la liberté – de pensée et d’expression – sous toutes ses formes, et d’autre part, les efforts que vous avez pu déployer, avec de faibles moyens matériels et financiers, pour soutenir les Arts et la Culture en Mauritanie.
Mme Hindou Mint Aïnina, au nom de la ministre de la Culture, je vous fais Chevalier dans l’Ordre des Arts et Lettres.