République Islamique de Mauritanie
Front Uni pour l’Action des Haratine
Bilan:
50 ans de marginalisation et d’exclusion
systématiques des Haratine
I- Aperçu historique
1- Les Haratine ou les autochtones à travers les âges:
Ce territoire a toujours été peuplé depuis la nuit des temps. Certes, plusieurs populations s’y sont succédé. Mais on retiendra qu’au delà des multiples relectures contemporaines de l’histoire tenant à la diversion, à la manipulation et la falsification du passé et ses nombreuses péripéties, au delà des nombreuses vérités inhumées de gré, l’archéologie et les anciens objets ramassés sont en train d’exhumer du fin fond des entrailles millénaires du désert des pages entières, naguère tues, lesquelles pages sont des preuves incontestables que les premiers occupants de cette terre furent bien les noirs et que l’arrivée des blancs (bidhaan) est très récente.
D’ailleurs, tel est l’avis de tous les historiographes arabes qui se sont rendus en Mauritanie et dont les plus célèbres restent, évidemment, El Messaoudi et El Bekri. Ces derniers affirment qu’à leurs passages respectifs les habitants de cette contrée étaient des noirs. Ainsi la dénommèrent-ils Bled es Soudan (pays des Noirs). C’est un terme qui va même intégrer la langue française pour y désigner aujourd’hui tout type de climat identique à celui qui régnait dans cette partie du monde. Or, ces témoignages de taille qui ne font l’ombre d’aucun doute sont sciemment occultés par les intellectuels organiques du système Bidhaan qui leur préfèrent des récits oraux fruits de l’imagination. Le plus ancien peuple et le plus illustre fut celui des baffours décrits comme étant une population de forte corpulence et de traits négroïdes. Chasseurs, éleveurs et cultivateurs leurs dessins rupestres, encore, gravés sur les parois des montagnes escarpées de Tayarett, dans la région d’Adrar, demeureront d’éternels témoins vivants d’une ère et d’un peuple à jamais présent dans l’imaginaire de l’altérité.
Mais, au fil des temps, les baffours allaient se sédentariser. Ils se reconvertirent en agriculteurs donnant ainsi naissance à une population baptisée Haratine, étymologiquement Harathine, c’est-à-dire, cultivateurs selon les termes du marocain Allal El Fassi dans, son livre, « Menhej El Istiqlaliya » traduit par « Méthode de l’Indépendance ». Il rappelle, par ailleurs, que le « t » de Haratine et le « th » de Harathine sont, des variantes de même phonème, comme c’est la tradition de l’arabe dialectal au Maghreb. Les Haratine sont donc un peuplement noir descendant des aborigènes, autrement dit, la première population de la sous région et que trouvèrent sur place respectivement les berbères et les arabes. Ils se définissent comme une communauté nègre d’origine et arabo- berbère de langue (Hassa nia), mais qui n’est, par-dessus tout ni nègre ni Bidhaan; car ils ont leur spécificité socioculturelle propre et partant une identité qui a su résister à toutes les adversités sociales et temporelles: les tentatives de phagocytose, de dissolution et d’aliénation.
Il y a lieu de citer parmi les particularités Haratine:
– Le maintien des noms Haratine au coté des noms de familles négro-africaines et arabo- berbères;
– particularité culturelle des instruments et musique Haratine: guembra (mouz gheyba), r’bab, zega’ari (boubou), chenna, t’bel, baïlol, Neyfara, Zewzaya, abalangue etc.
– Les danses et les jeux: er retha, bondia, t’bal lekbir, tegra, knou, laab debbous, Heïba, (Hemba), Chaate, etc.
– Les chants: El medh (Gosels Haratine), ej jar, keynouni matt, Danse des cultivateurs, zakh (chant de virilité), etc.
– La littérature orale: légendes, contes, devinettes, charades, les proverbes, etc.
– Le pouvoir occulte: litanies, sorcellerie, secrets de l’eau, soins incantatoires, etc.
– La médecine traditionnelle: la pharmacopée (soins grâce aux plantes).
– L’apport au dialecte Hassanya de plusieurs lexèmes incontestables, substrat linguistiques des langues locales.
– Les us et coutumes: rites de circoncision et d’initiation, Dermise (c’est lors que la personne atteint la maturité; cela se célèbre par une cérémonie au cours de la quelle le concerné est rasé), l’importance des classes d’âge dans l’éducation (Laassar), le rôle de la sagesse et l’oralité dans cette communauté sempiternellement analphabète.
– Les localités Haratine sont appelées Debay, qui vient des langues mandingues. Et cela confirme que les Haratine sont sédentaires contrairement aux Bidhaan, nomades.
2- La Mauritanie à l’arrivée des arabes:
Chassés de l’Arabie parce qu’ils se livraient au pillage, les arabes ne changèrent pas de comportement, à leur arrivée, vers 1400, en Afrique. Ce sont d’abord les berbères et plus précisément les Zanagas, très présents au nord, qui vont en subir les pratiques de brigands et l’hégémonie. Conquis et soumis, ils seront transformés en éleveurs. Ceci donna lieu à la genèse d’une nouvelle société hybride au XVII siècle, selon le professeur Seydou Kane: » la communauté maure bidhaan (blanche) est née de la rencontre des Berbères d’Afrique du Nord et des Arabes Béni Hassan en mal de territoire et à la recherche d’un pays d’accueil et d’un apport non négligeable de négro-africains.
Après que leurs ancêtres Béni Hilal furent chassés d’Arabie par les khalifes abbassides au XIe siècle, et après une longue odyssée au Maghreb, les Béni Hassan sont eux-mêmes chassés du Maroc au XIVe siècle. Berbères et Arabes fusionnent à l’issue de longs conflits et d’alliances qui tournèrent en faveur des seconds dans le contrôle de la société maure. »
La plupart des berbères vont s’investir dans la théologie et s’adjuger le pouvoir moral et spirituel. Ils changèrent de statut et de nom pour prendre celui des Zouayas, d’où l’occupation de la deuxième place dans la hiérarchie sociale d’une société qui, en ce temps-là était en reconstruction sur le modèle négro-africain, à l’image du reste des populations de l’Afrique de l’ouest. L’autre partie restante des berbères ne connaîtra pas, quant à elle, l’émancipation. Elle vit, toujours les stigmates du passé et utilise sa langue en cachette, dans quelques zones se situant le long du fleuve Sénégal. Une autre frange, les Touaregs, quant à eux, parlent toujours le Tamashek au sud-est du pays, sur la frontière malienne.
Ensuite, les arabes vont se lancer dans les razzias contre leurs voisins négro-africains, après avoir établis des relations mitigées avec les Haratine ou « Harathine » qu’ils ont trouvés sur place et qui constituent la majorité de ceux qui, par extension, seront connus sous cette appellation. Mais contrairement à ce que l’on pense, ils n’ont jamais vécu l’esclavage, même si comme tous les tributaires, ils versèrent des dîmes ou des tributs (Leghrama), contre une hypothétique protection par les guerriers. Les preuves concrètes existent en grand nombre. On peut en citer, l’existence aujourd’hui de plusieurs tribus exclusivement Haratine comme les
Oulad Begnoug et autres; la présence aussi de très larges composantes nobles et jamais asservies. Selon les régions, celles-ci sont appelées soit EL Khathara soit Nanma.
Tous les villages Peulhs, Soninkés, Ouolofs et Bambaras furent attaqués. Leurs enfants victimes de rapts ont été asservis et vendus qui sur les marchés du Maghreb qui sur les comptoirs Hollandais, Portugais et Français dès le XV siècle, vérité que mettent en exergue les écrits occidentaux encore présents à l’Université Cheïkh Anta Diop de Dakar. Plusieurs marchés d’esclaves dont le plus célèbre était celui de la ville d’Atar avaient participé à encourager le vol des êtres humains. Les rebelles étaient châtiés à mort, une manière de dissuader tout soulèvement d’asservis. Néanmoins l’histoire retiendra plusieurs révoltes d’esclaves. La plus connue c’est celle de DIABDIOULA qui eut lieu, à la fin du XIX siècle, aux environs d’Aleg où en réaction contre l’oppression, les esclaves exterminèrent leurs maîtres, décimèrent leur bétail et se libérèrent du joug de l’asservissement.
L’intérêt accordé à l’esclavage exercé par les guerriers et justifié par les Zouayas (les législateurs et les théologiens de la féodalité) ne détourna pas les tribus Bidhaan des guerres intestines auxquelles elles avaient pris l’habitude de se livrer. En effet, les batailles se multiplièrent prenant plus d’intensité. Certes des tentatives furent entreprises par beaucoup de notables, des chefs de tribus de surcroît. Mais toutes avaient, au bout du compte, fini par échouer, laissant place à des siècles d’instabilité, d’horreur et de sang, des siècles de banditisme, de rapt et de désordre qui conduiront Cheïkh Mohamed El Mamy à dénommer la partie peuplée par les Bidhaan « Trabe Esseïba »: Terre d’anarchie.
Cependant, très vite, les conflits tribaux prirent une autre forme marquée par une grave opposition entre les guerriers et les marabouts qui entraînent la bataille de trente ans: Charr Bebba (1644 – 1674) dont les impacts politiques et socio-économiques étaient déterminants.
3- La Mauritanie pendant la colonisation:
Avec la poursuite de l’anarchie, installant le chaos, Cheïkh Sidiya El Kabîr décréta une fatwa qui plaide en faveur de l’affiliation à la colonisation laquelle, pense-t-il, pourrait assurer la sécurité et la stabilité. Si cette décision fut bien appréciée dans les milieux maraboutiques qui payèrent de lourds tributs pendant la guerre de Char Bebba, elle fut, en revanche dénoncée par les guerriers lesquels voyaient dans cette décision un alibi visant à renverser les rapports de force entre les pôles Bidhaan.
Certes, les rapports entre les guerriers et les marabouts avaient été relativement pacifiés par l’administration coloniale. Mais les Haratine (libres de naissance, affranchis ou esclaves) étaient victimes de mépris d’une société raciste. Avec la colonisation, ils vont connaître une nouvelle forme d’exploitation. En effet, toutes les corvées leur seront affectées. Et leur labeur ne sera point rétribué. Ainsi construisent-ils à leurs risques et périls des routes entières, cassant et concassant les pierres qu’ils transportèrent à l’instar du sable, de l’eau.
Mauritaniens et colons ont encore en mémoire ces longues routes dites « Menkoussa » et pour lesquelles nuls moyens technologiques ni financiers n’avaient été mobilisés. Les Haratine s’en rappellent toujours, comme ils se rappellent encore de « El Mouzabya » (mise à pied) pour laquelle les révoltés contre l’esclavage avaient été mobilisés par milliers et moururent soit d’inanition et de soif, soit de maladies comme la tuberculose et le paludisme. Cette page, inhumaine et barbare, qui mérite autant d’indignations et d’excuses solennels, ses auteurs lui voulaient l’oubli, ce qui est inadmissible; car les Haratine en réclament le droit de mémoire.
L’autre injustice sociale subie par les Haratine se rapportait aux paiements des impôts (Elbatana) et des taxes (Lighrama) très discriminatoires, du reste. Prévus pour être donnés par tout le monde, ces derniers sont versés seulement par la communauté Haratine et ce au nom de toute la tribu. Ceci n’est pas du tout surprenant lorsqu’on sait que les registres (kennache) et la tâche de recouvrement sont le privilège des chefs traditionnels qui sont soit nouveaux et imposés par l’Administration coloniale, soit anciens mais confirmés. Et ceux-ci n’hésitèrent pas d’abuser de ces atouts pour exercer leur domination et bâillonner les cris de colère et réprimer les révoltes
Il s’en ressort que la période coloniale a contribué à la cristallisation des stigmates de la discrimination vis-à-vis des Haratine, en renforçant leurs souffrances à travers la détérioration de leurs conditions de vie déjà précaires et l’instrumentalisation de leur assujettissement au profit du système Bidhaan ; tribaliste et féodal.
Par ailleurs, même les écoles n’échappèrent pas à la discrimination. En effet, celles qui furent ouvertes par la colonisation étaient aussi exclusives que les écoles coraniques. Evoquant dans son rapport qui porte sur l’enseignement du français en Mauritanie, l’administration coloniale dit dans Archives de la République Islamique de Mauritanie: « l’existence de castes nettement différenciées ne permettent pas d’envisager l’instruction à la fois aux descendants des familles des chefs, guerriers ou religieux, et aux enfants des gents du commun ». Elle ajoute: qu' »Il suffirait d’admettre à la médersa de Boutilimit un fils de serviteur ou d’artisan pour qu’elle soit immédiatement désertée par les enfants des familles libres qui la fréquentent actuellement. »
Il est donc indéniable que pour plaire à la féodalité déterminée à s’approprier le pouvoir, la colonisation avait décidé de créer l’Ecole des fils des chefs et d’en exclure les Haratine. Voilà qui justifie l’absence des Haratine dans toute la hiérarchie de l’administration de la première république taillée sur mesure.
II- La Mauritanie Postcoloniale:
Après 50 ans d’indépendance nationale au cours desquels se sont succédés des régimes civils et militaires atypiques que caractérisent l’archaïsme, le monolithisme, l’injustice sociale, l’ostracisme, la discrimination et les contrevérités, l’heure est venu de faire un bilan exhaustif sur fond d’examen minutieux de la nature d’exercice du pouvoir dans un Etat dont tous les régimes se sont absurdement acharnés sur les Haratine craints à cause de leur impressionnant poids démographique lequel en fait la composante nationale la plus importante, une force redoutable pouvant, dans le moyen ou le long terme, ébranler un système, déjà, aux prises avec la désuétude et l’usure.
Evoquant le poids démographique des Haratine, le professeur, feu Seydou Kane dit dans l’un de ses écrits consacré à la question de l’esclavage: « Haratine et Abid, forment la composante sociale démographiquement la plus importante du pays, selon tous les recensements de ces dernières années. » Ce pendant, tout est déployé par les régimes du système Bidhaan afin de continuer à divertir et cacher la vérité pour pouvoir se servir du nombre Haratine dans un rapport de force à leur détriment.
La politique d’exclusivisme menée de façon systématique et sans ménagement constitue le sacre de plusieurs décennies de recherche effectuée par les intellectuels organiques du système féodal pour la conception d’un plan d’action devant exécuter les desseins d’une idéologie Bidhaan égocentrique, qui prit corps dans les enceintes de l’Ecole des fils des chefs laquelle, comme son nom l’indique, était le réceptacles des théoriciens du chauvinisme à qui revenait la tache de perpétuer la tradition incarnée par un pouvoir bicéphale: marabouts et guerriers, de protéger la pérennisation de la hiérarchisation de la société en castes et de monopoliser les privilèges socioculturels, économiques et politiques.
Ainsi, forts du soutien incontestable et inconditionnel de l’administration coloniale française, aux lendemains de l’indépendance, les stratèges du système Bidhaan se sont fixés des objectifs dont le but efficient et ultime est de parvenir à contenir un potentiel et irrésistible raz de marée Haratine.
1- Un demi-siècle de marginalisation et d’exclusion systématiques
Vous pouvez lire, ci-dessous, l’exposé de toutes les formes d’injustices sociales, de marginalisation et d’exclusion organisées subies par les Haratine au cours des différents régimes civils et militaires qui se sont succédés du 28 novembre 1960 à nos jours. Chaque période est accompagné de tableau décrivant le niveau de représentation des Haratine dans la gestion civile et militaire des appareils de l’Etat.
28 novembre 1960 – 10 juillet 1978:
Le régime de Mokhtar Ould Daddah a hérité du système social traditionnel de l’époque dont, bien entendu, les conditions de vie misérable des Haratine (esclaves et affranchis) qui occupent, aujourd’hui, encore, le bas de l’échelle d’une classification sociale dominée par les guerriers, hiérarchiquement suivis par les Zawaya.
Durant ces 18 premières années de l’indépendance, les effets négatifs de ce système hiérarchisant béni par l’administration de la première République ne firent l’objet d’aucun combat. Pire, ils allèrent se renforçant, à travers une ferme politique hégémoniste se matérialisant dans l’ouverture des écoles au profit des seuls fils des chefs qui jouirent de toutes les formes matérielles et morales de soutiens.
En outre, la composition du gouvernement de la première République, ne regroupant que des personnalités issues de l’aristocratie, constituait un tournant dans l’histoire. C’était une preuve tangible de l’amorce d’un nouveau processus de réactualisation du pouvoir traditionnel usé de la minorité Bidhaan.
Ce gouvernement a opéré des choix sélectifs qui occultaient, sciemment et tactiquement, toutes les mesures pouvant conduire, à court ou à long terme, à trouver des solutions satisfaisantes et durables aux grandes questions de l’époque, notamment, le dilemme de l’esclavage, la marginalisation et ses corollaires dont essentiellement la pauvreté, l’inexistence de plan d’action de scolarisation dans les milieux Haratine, l’enclavement des adwaba, l’exode rurale des années 1970 et l’émergence des bidonvilles ( Kebatt : agglomérations misérables, peuplés notamment d’esclaves et d’affranchis lesquels vivent en dessous du seuil de pauvreté). A cela s’ajoute l’absence de campagnes d’information et de sensibilisation pouvant participer à changer les mentalités affectées par le démon du tribalisme et du clanisme responsable de l’ancrage de la mentalité de domination, d’exclusion et de dépendance lesquels se substituèrent, à tort, aux valeurs de liberté, de justice et d’égalité, indispensables à un pays nouvellement sorti du giron de la colonisation.
Les simulacres de solutions proposées, par le gouvernement de la première République, à la question de l’exclusion, reflétaient, de facto, sa ferme volonté de continuer à isoler et à exclure davantage les Haratine, par le biais d’une campagne, savamment orchestrée, de financement de la composante Bidhaan laquelle constitue, actuellement, à elle seule, la pierre de touche de la nouvelle bourgeoisie mauritanienne.
Les effets immédiats de cette politique discriminatoire se manifestent par l’élargissement du fossé entre les différentes composantes nationales et à la faillite de quelques banques comme BIMA et UB d’autre part.
A rappeler que l’échec du président Mokhtar Ould Daddah, quant à asseoir une politique d’intégration nationale, de promotion socio-économique et administrative a été souligné par Monsieur, Ahmadou Ould Abdallah haut fonctionnaire des Nations Unies, interrogé par Alain Foka, dans l’une des émissions de RFI.
Bref, un peu moins de 2 décennies de pouvoir sans partage de Mokhtar Ould Daddah, marquées par la fortification administrative du système sectaire et égocentrique Bidhaan, avaient pour provoquer les Haratine en suscitant leur réaction à travers la création d’un mouvement d’émancipation qui prône la libération du joug de l’esclavage et fait appel à la lutte contre l’injustice, la marginalisation et l’exclusion en vue de diffuser et d’ancrer les valeurs de liberté, de justice et d’égalité entre toutes les composantes de la société mauritanienne. Ce mouvement c’est, en l’occurrence, El Hor, fer de lance du combat d’émancipation des Haratine, né le 5 mars 1978.
Tableau N° 1:
Administration Publique | Institutions militaires et paramilitaires | ||
Ministres |
0 |
Chefs d’Etat Major National |
0 |
Conseillers et Chargés de missions à la Présidence |
0 |
Chefs d’Etat Major de la Gendarmerie |
0 |
Secrétaires Généraux |
0 |
Chef d’Etat Major de la Garde |
0 |
Ambassadeurs |
0 |
Commandants des Régions Militaires |
0 |
Walis |
0 |
Direction Générale des Douanes |
0 |
Hakems |
1 |
Direction Générale de la sûreté |
0 |
Chefs d’arrondissements |
1 |
Directions Régionales de la Sûreté |
0 |
Magistrature | |||
Présidents des tribunaux |
0 |
||
Greffiers en chef |
0 |
||
Greffiers |
0 |
||
Notaire |
1 |
||
Huissiers |
0 |
||
0 |
10 juillet 1978 – 12 décembre 1984:
A cause de la lutte de pouvoir à la quelle s’étaient livrés les officiers supérieurs des forces armées nationales, cette époque fut l’une des plus mouvementées et des plus incertaines de l’histoire politique de la Mauritanie. En conséquence, les questions nationales n’avaient point requis la priorité et furent reléguées au second plan.
En effet, les voix qui s’élevèrent exigeant l’abolition de l’esclavage, la lutte contre la marginalisation et l’Etat d’exception, avaient conduit le Comité Militaire, au pouvoir, à s’en prendre aux cadres Haratine. La résistance de l’Etat fut farouche. Mais grâce aux prouesses de ses stratèges, El Hor, issu d’un élan sincère, avait pu encadrer et mobiliser la quasi-totalité des Haratine lesquels décidèrent en 1981 de porter leur combat vers la rue. Ils sortirent dans un sursaut inédit, défiant le régime militaire au cours d’un soulèvement populaire baptisée Marche des Esclaves.
El Hor devait payer un lourd tribut allant du lâche assassinat de l’un de ses leaders, en l’occurrence, feu Sidi Ould Jaber, tué en Tunisie après avoir reçu des menaces de mort suite à son refus de céder aux pressions de la féodalité; passant par l’arrestation et la torture de ses emblématiques membres fondateurs dont, au moins, un porte aujourd’hui, les séquelles de séjour carcéral; et se terminant par leur historique procès qui eut lieu à Rosso lequel sonna le glas de la révolte, signal fort que le régime d’exception de l’époque apprécia à sa juste valeur.
La précipitation de ces événements riches d’enseignement allait contraindre le Comité Militaire, présidé par le Lieutenant Colonel Mohamed Khouna Ould Haïdalla, à promulguer, dans la foulée, une loi d’abolition de l’esclavage, suite à la consultation des oulémas lesquels décrétèrent une fatwa qui stipule l’abolition contre l’indemnisation des maîtres. Cette loi est dénommée, dans les milieux féodaux hostiles à l’émancipation, » loi ou liberté de Haïdalla.
Cependant, ledit versement d’indemnisation aux maîtres au lieu et place des esclaves, assujettis des siècles durant au grand mépris des religieux, des lois et des valeurs humaines, ôta tout intérêt à cette loi. Ce fut même une nette reconnaissance de la légitimité des pratiques esclavagistes, justifiant dans les faits pourquoi le gouvernement s’abstenait à fournir aux asservis tout soutien matériel et moral, malgré le poids de la misère, de l’ignorance, de la marginalisation sous lequel ces derniers croupissaient.
L’absence de dispositions juridiques devant interdire et incriminer l’asservissement tout comme le refus explicite, par l’Etat, de redistribuer et d’attribuer les terres aux esclaves, dans le cadre de la réforme foncière ont participé à saborder l’œuvre d’émancipation et développer toutes les formes de complexes d’infériorité et de dépendance. Pire, le gouvernement a, dans sa politique d’un poids deux mesures, multiplié les clins- d’œil à la féodalité, pour acheter leur complicité et partant leur silence, à travers l’application d’un plan de distribution ciblée des crédits agricoles, des prêts bancaires réservés aux seuls maîtres et la création d’une nouvelle forme d’esclave dite l’esclavage foncier.
Voilà autant d’arguments qui prouvent que l’objectif visé, à l’époque, par la promulgation de la loi d’abolition de l’esclavage n’était autre que le désir d’absorber la colère de la rue de manière à pouvoir bâillonner les voix de plus en plus exigeantes des Haratine dont les réclamations se résumaient dans la devise suivante: liberté- justice- égalité.
Tableau N° 2:
Administration Publique | Institutions militaires et paramilitaires | ||
Ministres |
0 |
Chefs d’Etat Major National | |
Conseillers et Chargés de missions à la Présidence |
0 |
Chefs d’Etat Major de la Gendarmerie |
0 |
Conseillers et chargés de missions à la Primature |
0 |
Chef d’Etat Major de la Garde |
0 |
Secrétaires Généraux |
0 |
Commandants des Régions Militaires |
1 |
Ambassadeurs |
0 |
Direction Générale de s Douanes |
0 |
Walis |
1 |
Direction Générale de la sûreté |
0 |
Hakems |
1 |
Directions Régionales de la Sûreté | |
Chefs d’arrondissements |
0 |
||
Magistrature | |||
Présidents des tribunaux |
0 |
||
Greffiers en chef |
1 |
||
Greffiers |
0 |
||
Notaire |
0 |
||
Huissiers |
0 |
12 décembre 1984 – 3 août 2005:
Le régime de Maaouiya Ould Sid’Ahmed Taya, dans ses deux versions militaire et civile, n’était pas différent de ses prédécesseurs, en ce sens qu’il adhérait entièrement à leurs principes de domination et de marginalisation des Haratine.
Pendant son règne militaire, de multiples voix se sont levées réclamant l’émancipation réelle et effective des esclaves, la levée de l’état de siège qui les frappait privant leurs cadres de pouvoir assumer les hauts postes de responsabilité, condition sine qua non pour participer à la prise des décisions de l’Etat.
Alors, pour briser l’élan de revendication collective et parvenir à infiltrer le rang des Haratine, Ould Taya en a, précipitamment, nommé une poignée de personnalités à quelques postes politiques et administratifs. Pendant ses 21 ans de règne celles-ci n’ont jamais dépassé le seuil de 2 à 3 ministres par gouvernement, chose ridicule pour une composante nationale estimée à plus de 50% de la population nationale.
A l’avènement dudit multipartisme, Ould Taya changea de politique. L’heure était au recul par rapport à son engagement d’associer les sempiternels exclus de naguère à la gestion des affaires publiques, voie sur laquelle il feignait s’être engagé pour parvenir à faire taire le mécontentement des Haratine bien que réellement insatisfaits. Une nouvelle stratégie fut adoptée et qui consistait à un retour planifié au tribalisme, au régionalisme et au clanisme. Ainsi une campagne de concertation et de coordination avec les chefs traditionnels fut-elle amorcée pour en renforcer le pouvoir et en asseoir la domination et l’autorité grâce aux moyens de pressions mis à leur disposition par le gouvernement dont l’abus de pouvoir, le soutien moral et matériel reçu de l’Etat ( influence auprès de l’administration, pouvoir délibéré de nominations sélectives et de limogeages arbitraires et abusifs des cadres, et ce, du reste, en remplacement desdits principes administratifs de sanction et de récompense). Ainsi Ould Taya fut-il élu au terme d’une élection orientée où les urnes connurent un bourrage sans précédant et l’opération de dépouillement de graves manœuvres de manipulation.
Le plan de réforme d’ajustement structurel dont l’application fut amorcée, aussitôt Ould Haïdalla évincé du pouvoir, et la politique de privatisation accélérée des Etablissements publics qui s’inscrivaient dans le cadre d’un processus de libéralisation désireux, du moins, en apparence, de sauver le pays du marasme n’étaient, en réalité, que des prétextes venus justifier une stratégie de contrôle et d’appropriation de l’économie du pays afin de renforcer le système Bidhaan et compromettre les chances de succès des revendications égalitaires, dorénavant, dépourvues de moyens financiers et d’appuis logistiques nécessaires. Alors en 21 ans de pouvoir, les Bidhaan ont contrôlé 90% de la richesse, en d’autres termes, presque, toutes les Entreprises leur furent concédées par l’Etat, à l’instar de l’ensemble des institutions financières nationales: BNM, GBM, BMCI, BCI, Chengitty Banque, BADH et BASIM Banque). Ceci est l’une des causes du très profond fossé sciemment creusé et qui se creuse davantage entre deux mondes, deux communautés : les blancs extrêmement riches et les noirs profondément pauvres.
Par ailleurs, le règne de Ould Taya a été marqué par un regain d’intérêt particulier accordé, par les opérateurs européens et asiatiques de pêche, aux ressources halieutiques mauritaniennes. Ould Taya a profité de cette opportunité pour distribuer les licences de pêche aux seuls Bidhaan. L’abus du pouvoir de ce régime ne s’arrêta pas uniquement à ce secteur. Les crédits agricoles, les crédits bancaires et les soutiens financiers, aux ONG, aux centrales syndicales, aux associations socioprofessionnelles, aux initiatives culturelles, aux coopératives, les distributions des offres anarchiques des marchés… étaient dirigées de manière discriminatoire et exclusive.
Toutes les voix s’étant distinguées par leur refus de l’injustice sociale se sont retrouvées objet d’écoutes, d’enquêtes, d’arrestations et d’incarcérations arbitraires. Aucune n’aura pu jouir de procès de crainte que la vérité ne soit découverte et étalée au grand jour.
Certes ce régime, jusqu’à son dernier souffle a toujours nié l’existence effective de l’esclavage qu’il banalisait en la reléguant au rang de séquelles. Il a aussi récusé avec force l’existence de discrimination dans les services de l’administration entre Haratine et Bidhaan. Mais le célèbre procès des Cavaliers du Changement qui a eu lieu à Ouad Naga va révéler à tous les mauritaniens et à l’opinion internationale le niveau abject de bassesse du système Bidhaan de, ses idéologues et les intentions de ses stratagèmes résolus, à maintenir toute une communauté dans la dépendance, la misère et l’aliénation. Les actuels députés Saleh Ould Hanana et Abderrahmane Ould Mini, principaux responsables du coup d’Etat manqué du 8 juin, affirment, l’un et l’autre, au cours de leur procès, l’existence effective d’un plan d’action commandité par l’Etat visant à exclure les Haratine du corps des officiers de l’armée, de la gendarmerie, de la garde et de la police. Ils avouent avoir pris connaissance de recommandations et d’ordres donnés pour d’une part bloquer à vie, au grade de capitaine, les militaires Haratine prétendant à l’avancement de crainte qu’ils n’assument de hautes responsabilités et d’autre part coincer la jeunesse Haratine désireuse de participer aux concours des officiers. Les aveux des Cavaliers du Changement confirment les révélations faites et diffusées sur l’Internet, un peu avant, par Colonel Baby ex intendant puis attaché militaire à l’ambassade de Mauritanie en France. Il y est question d’exclusion et de racisme systématique auxquels sont soumis les Haratine ne devant pas dépasser le grade de capitaine.
Au niveau administratif, les Haratine restent les parents pauvres des nominations. En effet, aussi bien les régimes militaire que civil de Ould Taya n’ont coopté qu’une kyrielle de cadres, presque les mêmes en deux décennies, à la suite de fortes contestations Haratine. Ils n’occupent en général que des postes secondaires et insignifiants: 2 à 3 portefeuilles ministériels, 1 Secrétaire général de ministère, 1 à 2 Directeur de société, 2 ambassadeur; c’est tout ce qu’ils auront connu, durant 21 ans.
Bref, les deux décennies de pouvoir de Ould Taya sont celles de l’ancrage socioculturel et économique du système Bidhaan, devenu grâce à la bénédiction de ce régime, un véritable hydre tentaculaire minant la cohésion nationale par des maux institutionnalisés tels que la marginalisation et l’exclusion qui se font sur fonds de racisme.
Tableau N° 3:
Administration Publique | Magistrature | ||
Ministres | 2 ou 3 par gouvernement | Présidents des tribunaux |
0 |
Conseillers et Chargés de missions à la Présidence |
2 |
Greffiers en chef |
1 |
Conseillers et chargés de missions à la Primature |
0 |
Greffiers |
2 |
Secrétaires Généraux |
3 |
Notaire |
0 |
Ambassadeurs |
2 |
Huissiers |
0 |
Walis |
1 |
Institutions militaires et paramilitaires | |
Hakems |
2 |
Chefs d’Etat Major National |
1 |
Chefs d’arrondissements |
1 |
Chefs d’Etat Major de la Gendarmerie |
0 |
Education | Chef d’Etat Major de la Garde |
0 |
|
DREN |
1 |
Commandants des Régions Militaires |
2 |
Santé | Direction Générale de s Douanes |
0 |
|
DRASS |
1 |
Direction Générale de la sûreté |
0 |
Directions Régionales de la Sûreté |
0 |
3 août 2005 – 19 avril 2007:
Certes, la corruption, le pillage des deniers publics, la détérioration des conditions économiques et sociales des citoyens auxquels s’ajoute le dialogue de sourd entre les différents partenaires politiques mauritaniens étaient autant d’arguments suffisants pouvant justifier la chute du régime de Taya. Et il fut effectivement renversé par l’un de ses plus proches collaborateurs. Il s’agit du Colonel, Ely Ould Mohamed Vall, élément clé dans son dispositif sécuritaire dont, naguère, l’implication est incontestable dans les nombreuses arrestations des figures de proue des militants des Droits de l’Hommes.
Il importe, cependant, de rappeler que tous les problèmes ayant plaidé au profit du CMJD allaient, sans surprise, rester lettres mortes durant toute la transition. La seule exception à noter, est bien entendue, le domaine électoral où, du reste, l’organisation d’élections municipales, législatives et présidentielles fut unanimement jugées transparentes par l’ensemble des observateurs et les partis politiques nationaux.
En définitive, les grandes questions nationales, naguère, sciemment, occultées par le régime de Taya, furent renvoyées au calendre grec. Le problème de l’esclavage allait même, à la surprise générale, connaître un recul inquiétant et dangereux, avec la contestation, par le Colonel Ely Ould Mohamed Vall, Président du CMJD, dans son meeting de Rosso, de l’existence, en Mauritanie, d’un quelconque signe concret de manifestation d’esclavage. Le Colonel Ely Ould Mohamed Vall alla plus loin lorsqu’il traita, sur un ton sarcastique et hautin, les esclaves et les affranchis d' »électorat de ghettos », en comparaison à l’éclatement spatial forcé des juifs, jadis, victimes de la politique de nazisme hitlérien. Cette déclaration publique, suscitant bien des remous, fut une réelle volte-face par rapport à son discours d’Akjoujt où, répondant aux slogans brandis par les militants de l’émancipation, il affirma son entière engagement à s’inscrire sur la liste des antiesclavagistes en vue de contribuer à mettre fin à ce mal de sous développement.
Les élections ouvrirent, par ailleurs, une nouvelle page d’hostilité à l’égard des Haratine qui atteignit le paroxysme par l’incitation des féodaux (chefs traditionnels et spirituels) à user de leur poids pour affaiblir les partis politiques au profit des indépendants lesquels récupéraient au pied de la lettre le discours traditionnel opposé aux revendications sociales, politiques, économiques et culturelles des Haratine. Et le complot ourdi fut tel que les hommes d’affaires, les commerçants et autres personnes de bonne volonté s’empêchèrent en vertu des pressions subies de contribuer au financement des campagnes de Haratine notamment les plus représentatifs. L’objectif, c’était de limiter leur nombre dans les centres de décision (Parlement, Sénat et Conseils Municipaux), ce qui a effectivement eu lieu.
En outre, signe de mauvaise foi, le CMJD n’a attribué que 2 portefeuilles ministériels aux Haratine, souscrivant ainsi au quota arbitrairement imposé par Taya et partant le système Bidhaan décidé à ne pas l’augmenter de peur de perdre le contrôle d’un pouvoir artificiel doublée d’une hégémonie irrationnelle dont dépend sa survie.
Ceci étant, il convient d’affirmer, sans risque de se tromper, que le régime du Colonel Ely s’inscrit dans une logique de renforcement de la domination Bidhaan dont la philosophie et le pouvoir furent sérieusement affectés par la tentative de Coup d’Etat du 8 juin 2003. En effet, en l’absence de confiance en ses congénères, Taya avait recouru aux Haratine pour contrôler aussi bien le Gouvernent que les Forces armées Nationales, ce pas n’était du goût des Beïdanes qui ne cachèrent pas leur indignation et leur réprobation. Ils craignaient une conquête du pouvoir par ces Haratine forts de « la confiance » du Président.
Tableau N° 4:
Administration Publique | Magistrature | ||
Ministres | 2 | Présidents des tribunaux |
1 |
Conseillers et Chargés de missions à la Présidence | 2 | Greffiers en chef |
5/171 |
Conseillers et chargés de missions à la Primature | 0 | Greffiers |
4/153 |
Secrétaires Généraux | 1 | Notaire |
0 |
Ambassadeurs | 1 | Huissiers |
0 |
Walis | 1 | Institutions militaires et paramilitaires | |
Hakems | 1 | Chefs d’Etat Major National |
0 |
Chefs d’arrondissements | 1 | Chefs d’Etat Major de la Gendarmerie |
0 |
Education | Chef d’Etat Major de la Garde |
0 |
|
DREN | 1 | Commandants des Régions Militaires |
0 |
Santé | Direction Générale des Douanes |
0 |
|
DRASS | 1 | Direction Générale de la sûreté |
0 |
Directions Régionales de la Sûreté |
0 |
19 avril – février 2008:
Sidi Mohamed Ould Cheïkh Abdallahi a remporté l’élection présidentielle grâce au vote, en sa faveur de 70 % de l’électorat Haratine, après avoir promis, une fois élu à la tête de la magistrature suprême, de s’engager à lutter en faveur de la promulgation d’une loi incriminant et sanctionnant les pratiques de l’esclavage et trouver des solutions à leurs préoccupations en plus du désir d’établir une réelle justice sociale.
Certes, une décision politique, à savoir le vote, par le Parlement, d’une loi relative à l’interdiction et l’incrimination de l’asservissement, largement saluée par les mauritaniens, a été prise. Mais avec le temps, la lenteur, la nature des dispositions très légères prises pour gérer le dossier, l’absence de journées de réflexion sur cette question très complexe et banalisée, l’absence de véritables mesures d’accompagnement pour atteindre les fins fixées, le refus du règlement de tous les problèmes de plus en plus récurrents depuis le vote de la loi d’incrimination et dont la féodalité soutenue par quelques forces politiques et une large partie de l’administration territoriale encore hostiles aujourd’hui comme naguère à l’acquisition par les Haratine de tous leurs droits absolus, l’insignifiance du budget alloué à la lutte contre l’esclavage, l’envoi éclair et non préparé, dans l’indifférence la plus parfaite de l’opinion nationale à cause du black-out médiatique. Vendredi 8 Février 2008, des caravanes de sensibilisation, devant chacune en moins d’une semaine sillonnée deux Wilayas à la fois sont autant d’arguments qui prouvent le manque de sérieux et de volonté réelle de Sidi Ould Cheïkh Abdallahi, de son Premier Ministre Zeïne Ould Zeidane et du Ministre de la justice.
En effet, « le lancement des journées de sensibilisation sur la loi condamnant et incriminant l’esclavage », donné le 10 décembre 2007 était une grande mascarade. La complicité de Sidi Mohamed Ould Cheïkh Abdallahi et son Ministre de la justice est responsable du transfert de la cérémonie du lancement des Journées de sensibilisation sur la loi d’incrimination, du Palais des Congrès à l’ancienne Maison des jeunes. Cette manœuvre cherchait à vider l’événement de son ampleur et de sa portée médiatique. En même temps, elle permet au Président de pouvoir éviter la colère des conservateurs et de les rassurer en banalisant le malheur des asservis.
Plusieurs constats mettent en exergue la volonté de l’Etat, décidé à saborder la sensibilisation et partant tout le projet de lutte contre l’esclavage, à l’instar de l’œuvre de sabotage menée par le régime de Haïdalla contre la loi d’abolition de 1981. Ces constats prouvent en même temps que le tandem Sidi – Zeïne est entrain de lâcher du lest au profit des forces occultes, résurgence de l’ancien régime, qui, naguère opposées à la promulgation de cette loi, tenaient à réduire les pratiques de l’esclavage encore présentes en Mauritanie en pures et simples séquelles, ce qui est, du reste, inexact.
Les fautes retenues par l’ensemble des Haratine, pendant le lancement des journées de sensibilisation sur ladite loi, et dont ils rendent le Président seul responsable se résument comme suit:
– Absence délibérée de préparation de l’opinion nationale et le refus d’information sur la date choisie pour démarrer la campagne de sensibilisation sur la loi visant à réprimer les pratiques odieuses de l’esclavage. Or, des mois durant de préparation fortement médiatisés ont été consacrés à des questions de moindres importances.
– Choix des personnes ressources et des responsables de la sensibilisation parmi les ministres, les préfets, les gouverneurs et autres hauts cadres du régime de Taya hostiles à l’émancipation et rompus à nier l’existence de ce phénomène qu’ils pratiquent, pourtant, dans leurs propres familles.
– L’histoire prouve qu’il y a parmi eux qui ont protégé des esclavagistes. Quant aux restes, ils étaient habitués, à l’instar du directeur des Droits de l’Hommes sous le régime de Taya, à contester, dans les concerts internationaux la présence indéniable d’esclaves et d’esclavagistes en Mauritanie.
– Transfert de la réunion du Palais des Congrès à l’Ancienne Maison des Jeunes, ce qui ôte à cet événement tout caractère officiel.
– Non organisation de journées de réflexion associant maîtres et esclaves dont la marginalisation dans le débat est lourde de conséquences.
– Exclusion de la presse indépendante et internationale du lancement de ces journées au moment où les invitations officielles n’ont été adressées qu’à la radio et la télévision nationales seulement, comptant sur leur caractère partisan et instrumental.
– Nature des conseillers dont le Président s’entourent aujourd’hui et qui sont ceux mêmes ayant saboté le pays, par le passé. Ils sont, aujourd’hui entrain de rééditer l’œuvre de Taya tout en répétant son très cher leitmotiv: Changement dans la stabilité. Autres similitudes: la distribution des postes en fonction de quota arbitrairement institué par le président déchu, Maaouiya et auquel le CMJD a souscrit. Cette logique est une mise en évidence du sempiternel système Bidhaan dont les hommes changent mais la philosophie demeure, par-dessus tout, la même.
En outre, un examen minutieux de toutes les mesures individuelles prises, sous le règne de Sidi Ould Cheïkh Abdallahi, démontre que l’ensemble des nominations exclut systématiquement les Haratine. Il est désormais quasi certain que ces derniers sont, en conséquence, soumis à un ostracisme systématique dont les effets laissent place à une bipolarisation claire et précise du pouvoir, de l’administration, de la chancellerie, des forces armées… Il en découle un partage aux relents de discrimination dirigée. En effet les Postes sont ainsi distribués: 90% reviennent aux Bidhaan et 10% aux Négro-africains. Et là, il importe de rappeler que les Haratine, tenus de force hors de cette équation, constituent plus de 50% de la population, ce qui ne semble point gêner le Premier Ministre, Zeïne Ould Zeidane dont les impopulaires décisions et les propositions discriminatoires sont, du reste, paternellement bénites par le Président.
Cette politique a essuyé, dès ses premiers jours, un sanglant désaveu qui se manifeste dans la réaction de l’intelligentsia Haratine toute obédience confondue. De nombreux écrits publiés dans la presse, des graffitis sur les établissements publics et d’autres formes de contestation de cadres de cette communauté sont utilisés pour cristalliser le refus de la marginalisation entreprise par le régime au nom du système Bidhaan hérité des pouvoirs antérieurs.
Le bilan économique du Gouvernement de Zeïne Ould Zeidane est si négatif que les premières victimes en sont les couches les plus vulnérables notamment les Haratine. Aucun effort n’est entrepris pour amortir ni les prix ni le poids de la misère sous lesquels croupissent les manœuvres, la main-d’œuvre (dockers, colporteurs, éboueurs, domestiques, pêcheurs, éleveurs, gardiens, vendeurs détaillants etc.) à 90% esclaves et anciens esclaves. Cela justifie, en fait, la participation massive des Haratine aux dernières marches de protestation spontanées contre la flambée vertigineuse des prix qui ont ébranlé presque tout le pays. Par cette action qui se voulait pourtant pacifique, a fini par une répression dans le sang. Les pauvres citoyens voulaient rappeler à Sidi Mohamed Ould Cheïkh Abdallahi ses engagements de campagne où il a promis sa volonté de lutter contre la précarité et l’inégalité pour enfin établir une véritable justice sociale entre toutes les composantes mauritaniennes. Or, on assiste encore au sacre de l’adage « un poids deux mesures » et son application. Ainsi, forge-t-on une dichotomie sociale dangereuse entre une majorité de noires victimes de misère et de marginalisation et une minorité de blancs, objet de favoritisme et d’opulence.
Malgré les mesures prises en faveurs de la réinsertion et la promotion féminine, en vertu de l’adoption de la proportionnelle attribuant de facto 20 % des postes politiques et administratifs aux femmes, les dames Haratine demeurent totalement exclues de ces privilèges apparemment seul fief des femmes Bidhaan et à certain niveau des Négro-africaines; et c’est là, véritablement, une autre discrimination qui vient s’ajouter à celle subie par nos sœurs de sang. Ainsi toutes les vagues de nominations (Ministres, Conseillères, Secrétaires Générales de Ministères, Ambassadrices, Walis et Hakems…) ont-elles toutes exclu les femmes Haratine.
Tableau n°5:
La part de la femme Haratine dans la représentation
Beïdanes |
Négro-africaines |
Haratine |
|
Ministres |
3 |
0 |
0 |
Conseillères à la Présidence |
0 |
1 |
0 |
Conseillères à la Primature |
1 |
0 |
0 |
Secrétaires Générales |
1 |
1 |
0 |
Ambassadrices |
2 |
0 |
0 |
Walis |
2 |
0 |
0 |
Hakems |
1 |
1 |
0 |
Tableau N° 6:
Administration Publique | Magistrature | ||
Ministres | 3 | Présidents des tribunaux |
2 |
Conseillers et Chargés de missions à la Présidence | 0 | Greffiers en chef |
5/171 |
Conseillers et chargés de missions à la Primature | 1 | Greffiers |
4/153 |
Secrétaires Généraux | 2 | Notaire |
0 |
Ambassadeurs | 1 | Huissiers |
0 |
Walis | 1 | Institutions militaires et paramilitaires | |
Hakems | 2 | Chefs d’Etat Major National |
0 |
Chefs d’arrondissements | 2 | Chefs d’Major de la Gendarmerie |
0 |
Education | Chef d’Etat Major de la Garde |
1 |
|
DREN | 0 | Commandants des Régions Militaires |
0 |
Santé | Direction Générale des Douanes |
0 |
|
DRASS | 1 | Direction Générale de la sûreté |
0 |
Directions Régionales de la Sûreté |
0 |
2- Le sacre de l’hégémonie:
Les Bidhaan ont un projet hégémoniste dont l’exécution vise le monopole et le blanchiment des appareils de l’Etat. Sa réalisation s’opère par l’exécution de trois points essentiels :
2.1. Contrôle et orientation de l’information :
Le monopole des mas médias a vivement participé à présenter la Mauritanie, aux yeux de
l’opinion internationale, comme un pays à majorité Bidhaan, c’est-à-dire blanc comme leur nom l’indique. Ce qui est inexact, car les bidhaan ne constituent, en réalité, qu’une minorité, en dépit de toutes les manipulations de chiffres qui s’opèrent à l’Office National des Statistiques et la fabrication des informations erronées, sciemment, livrées aux diplomates, aux organisations internationales, aux chercheurs, aux touristes, etc.. Les documents officiels de l’Etat, les brochures, les illustrations en images des livres et des annonces (les spots publicitaires) sont des moyens utilisés à des fins de désinformation et de propagande.
Même en vue de participer à des rencontres internationales (séminaires, forums, symposiums, réunions…), le choix des délégations est soumis, par les pouvoirs publics, à une politique arbitraire de filtrage de quota sommée de justifier l’image que les bidhaan souhaitent donner, à tort, du pays.
Il y a lieu de rappeler aussi qu’aucune des 2 chaînes de télévision et encore moins les nombreuses radios nationales n’accordent point de temps d’antenne aux Haratine afin d’évoquer leurs particularismes sociaux et culturels et poser leurs problèmes spécifiques toujours soumise à la censure et à la banalisation.
Ce processus de manipulation politique, de propagande et de désinformation exercé, grâce au contrôle systématique des organes de presse, a vigoureusement été contesté, ces derniers temps, par l’intelligentsia Haratine et ce à travers, leurs nombreux écrits publiés dans la presse indépendante et sur l’Internet. Elle en fait, alors, assumer la responsabilité à tous les régimes civils et militaires qui se sont suivis depuis l’indépendance.
On peut voir, aujourd’hui comme par le passé, des graffitis sur les murs des bâtiments publics. Ce fait constitue une expression claire de refus de la mise en scène visant à proposer à l’opinion internationale une lecture erronée de la réalité. La distribution récurrente des tracts qui s’est faite à large échelle, par les Haratine toutes obédience confondues, vient corroborer le rejet catégorique de l’exclusion d’Etat qui dépasse, aujourd’hui, tout entendement humain et les prépare en même temps à une prise de décision par rapport à cet ensemble de défis.
2.2. Exclusion des Négro-africains :
Les négro-africains et les Haratine cohabitent depuis la nuit des temps. En effet, leurs traditions se recoupent à plusieurs niveaux: mœurs et coutumes, grâce au principe du don et du recevoir lequel caractérise toutes les communautés ayant en commun l’aire géographique. Ainsi au fil du temps est né le cousinage à plaisanterie et d’autres rapports d’alliance sur la terre notamment le long de la vallée du fleuve Sénégal responsables à la fois du métissage culturel (intronisation du chef coutumier négro-africain en même temps que celle du chef coutumier Haratine, par exemple) et du bilinguisme qui en est une autre forme.
Par ailleurs, il est indéniable que les négro-africains, identiques dans leur structuration sociale, à des exceptions près, aux arabo-berbères, ont naturellement tiré profit de
l’enseignement dispensé par ce qui est convenu d’appeler, Ecole des Fils des chefs, domaine exclusivement réservé aux seuls enfants de l’aristocratie. Mais, très vite, leurs cadres vont faire les frais d’une politique d’élimination progressive de l’administration, car les Bidhaan ont pris conscience de l’ampleur du danger que ces derniers risquent, à long terme, de constituer, dans un pays dont les textes conféraient, aux uns et aux autres, les mêmes droits et les mêmes devoirs.
Un plan était conçu et qui constituait à s’en prendre après aux Haratine, dont la majorité refuse l’assimilation sociale, politique et surtout culturelle qui vise à les faire dissoudre dans un espace géopolitique Bidhaan réducteur.
2.3. Assimilation forcée des Haratine :
Face à cette légitimation du pouvoir aristocratique, avatar du tribalisme inféodé, esclaves et affranchis, sempiternellement assujettis, devaient faire face à plusieurs problèmes :
– le fort ancrage du tribalisme et le sacre du féodalisme; la bénédiction par les pouvoirs publics de ces archaïsmes a compromis toutes les chances d’émancipation Haratine. C’est ainsi que les fils des chefs traditionnels, seuls rédacteurs de la constitution de la première République, évitèrent, par manque de volonté réelle, de donner au dilemme de l’esclavage l’importance requise. Et finalement les textes furent superficiels : ni l’incrimination de l’esclavage, ni le processus de libération et de réinsertion des Haratine n’auront trouvé leur bon chemin vers la concrétisation.
– Absence de propriété privée en matière de terre ; le foncier est enregistré au nom du patrimoine collectif ce qui donne à la tribu le pouvoir d’en exclure à sa guise tout esclave ou affranchi qui ose se rebeller. Les Haratine devaient, également, faire face à l’impressionnant arsenal juridique très riche en lois, décrets et arrêtés, instituant, par-dessus tout, le favoritisme d’Etat.
De toutes ces lois, la plus absurde, restera, pour toujours, celle relative à la reforme agraire de 1981. Sans gène, elle a dépossédé les propriétaires terriens de la vallée du fleuve Sénégal, exclusivement Haratine et Négro-africains, agriculteurs invétérés, de leurs champs ancestraux afin de les redistribuer aux hommes d’affaires blancs, nés au gré du système qui leur permet encore d’user illicitement des deniers publics, grâce aux détournements organisés et aux crédits agricoles non remboursables lesquels demeurent interdits aux parias noirs, en dépit de leur pauvreté.
– Le choix arbitraire, par l’Etat, de la chefferie, comme seule entité à associer à toutes les prises des décisions; ceci a participé et participe toujours à resserrer, davantage, l’étau autour des tributaires de telle sorte que d’aucuns finissent par se soumettre, pour éviter de s’exposer aux différentes formes de pressions à l’instar de l’ostracisme qui pèse actuellement sur la quasi-totalité des intellectuels Haratine. En effet, aujourd’hui comme hier, le droit aux nominations des cadres, les promotions des administrateurs et le limogeage des persona non grata s’effectuent sur la base de fidélité à la féodalité et non en terme de compétence et d’efficacité. On en a pour preuve l’acharnement des chefs des tribus, soutenus par le tandem Sidi – Zeïne, à vouloir recréer la pieuvre moribonde du « PRDS » déchu le 3 août 2005, cette même pieuvre qui fit des couches marginalisé un véritable jouet entre les mains des notables lesquels les transformaient, à chaque fois que c’était nécessaire, en creuset et vivier de voix électorales et les oublient aussitôt le scrutin fini.
III- Les constats:
1. Sur le plan économique:
1.1. Au niveau rural:
Les faits et les chiffres prouvent que les Haratine se sont toujours trouvés exclus de presque tous les programmes de développent durable exécutés, en Mauritanie, depuis l’indépendance. Même lorsque ces derniers sont conçus sur des critères objectifs auxquels les Haratine sont les seuls à répondre, l’administration instrument d’exécution de la volonté féodale, trouvait toujours un prétexte et les détournait définitivement de leurs fins initiales ou les élargissait aux Bidhaan qui n’en sont pas concernés. Cette manœuvre dilatoire confirme que l’Etat a, dans de rares cas, construit des barrages, aménagé des terres pour les coopératives agricoles et prévu d’autres formes d’infrastructures, source d’activités génératrices de revenu, mais aussi moyen sûr pour lutter contre la misère dans les zones rurales à forte concentration Haratine dite adwaba. A cela, l’Etat préfère, par contre, focaliser les regards et centrer les efforts sur les problèmes spécifiques aux Bidhaan et relatifs aux Virgane (campement) dont ces derniers sont les principaux habitants.
Conscients, en fait, de ce type d’injustice d’Etat qui les vise, les Haratine ont très tôt décidés de se prendre en charge. Et ils se sont engagés, à leur initiative et frais, à construire leurs propres écoles, à creuser leurs puits, à construire leurs barrages aidés en cela par leur diaspora éparpillée à l’intérieur et à l’extérieur du pays.
Dans le domaine de l’agriculture, l’effort des Haratine ruraux, champêtres et éleveurs invétérés, n’est jamais accompagné de volonté de soutien financier réel et sincère de l’Etat tels que les crédits agricoles.En outre, les cultivateurs où qu’ils soient ne jouissent ni de formations ni de conseils pouvant, à la fois, en assurer d’une part le perfectionnement de leurs compétences techniques et d’autre part l’amélioration qualitative et quantitative de leurs produits agricoles. Aucune subvention n’est allouée, aucun geste d’encouragement à l’égard des coopératives, malgré la campagne de désinformation et de propagande des différents régimes prétendant œuvrer au profit de l’autosuffisance alimentaire dont les fonds ont été utilisés dans la construction des châteaux, achat des voitures de derniers cris et des milliers de têtes de bétails.
L’élevage dans lequel cette communauté ne cesse de s’investir, depuis les temps immémoriaux, n’a pas pu, lui aussi, échapper à la politique de marginalisation et de paupérisation. Il n’a pas eu la chance de profiter du Fonds Allemand mobilisé pour promouvoir le développement intensif en Mauritanie faute de programmation. Pourtant, la quasi-totalité de l’argent est finalement retournée, faute de pouvoir en justifier la dépense.
Evoquant des cas de détournements de projets grâce à la complicité de l’administration, Monsieur,Pieter Smit, consultant des droits de l’homme dit: »J’ai interrogé plus de trente Européens et Américains qui ont travaillé dans le pays en tant qu’experts ou administrateurs sur des projets de développement. Au cours des 12 dernières années, plusieurs de leurs projets destinés à aider les pauvres, ont été récupérés par des maures blancs, et souvent transformés en nouvelles opportunités de poursuivre l’esclavage. Une Néerlandaise travaillant en développement international a personnellement été témoin d’une telle prise de contrôle, qui s’est déroulée sous la menace des armes. » (L’esclavage dans les projets de la Banque mondiale en Mauritanie, novembre 2002)
1.2. Au niveau urbain:
Les Haratine constituent 90% de la main-d’œuvre nationale. Plusieurs décennies d’exclusion organisée respectivement par l’administration coloniale et les différents régimes mauritaniens qui se sont succédés ont, hélas, suffi pour reléguer cette communauté à l’exercice des travaux subalternes, très mal rétribués. Ils se cantonnent, en conséquence essentiellement dans les secteurs privés et informels où ils sont exposés aux nouvelles formes de pratiques esclavagistes : abus de pouvoir des employeurs, surexploitation, mal paiement, non assurance, stagnation des salaires et refus de prise en charge sanitaire des employés… Tout cela au grand mépris des lois du travail et des droits de l’Homme, par un pouvoir public et un patronat déterminés, l’un et l’autre, à piétiner les centrales syndicales et minimiser les Inspections de Travail dépourvus de moyens et de pouvoir.
En l’absence d’une politique d’emploi et de réinsertion viable, il n’est pas surprenant que le taux très élevé de chômage qui touche les citadins, affecte plus particulièrement les Haratine. En effet, l’embauche est laissée à l’appréciation des entrepreneurs lesquels usent de leurs prérogatives pour recruter spécialement leurs parents au grand mépris des critères de compétence et d’efficacité.
Engagé dans un libéralisme aveugle et une privatisation accélérée et inhumaine, l’Etat se refuse tout droit d’intervention pouvant permettre aux déshérités, surtout, analphabètes de pouvoir participer à contribuer au développement économique du pays. En effet, la formation et le perfectionnement des compétences professionnelles sont encore réservés aux seuls sortants des écoles. Ni encadrement, ni soutien financiers ne sont, cependant, accordés aux catégories socioprofessionnelles vulnérables.Celles-ci souffrent de précarité et de l’abandon. Elles regorgent, en effet, de Haratine: maçons, ferrailleurs, menuisiers, tailleurs, chauffeurs, électriciens, dockers, pêcheurs, marchands, coiffeurs, gardiens, etc. Il n’y a point de subventions ni de crédits bancaires qui soient destinés à renforcer la participation effective de ces derniers et leur apport à l’économie du pays.
Certes, les Haratine se sont beaucoup battus pour pouvoir s’imposer dans le tâcheronnat et percer dans le monde des affaires. Mais la nature de distribution très discriminatoire et arbitraire des offres de marché, la corruption, le népotisme, le clientélisme et le racisme ont fini par biaiser les règles du jeu. A cela s’ajoutent, bien entendu, les jalons sciemment dressés par l’Etat afin de compromettre toute tentative d’émergence économique et toute velléité d’ambition de tous les membres de cette communauté.
La création d’activités génératrices de revenus prétendues devoir lutter contre la pauvreté de cette composante a toujours été une mascarade. Les fonds servaient à d’autres desseins. La raison est simple. A chaque fois qu’il a été question de créer du travail, de mettre sur pied des projets, de financer des activités au profit des Haratine, le pouvoir confie la direction de l’établissement compétent à un féodal qui les saborde et les détourne à leur profit. C’est ce qui arrivé avec l’ensemble des programmes de réinsertion dont seuls les Bidhaan se sont enrichis comme ils se sont enrichis de défunts Commissariat des droits de l’Homme.
Il est refusé aux Haratine pouvoir jouir des licences de pêches, de discrimination positive devant leur permettre d’accéder au monde de l’Entreprenariat, des Banques…
3- Sur le plan socioculturel:
Les 50 ans de discrimination politique et économique explicite et systématique des Haratine se manifestent concrètement aujourd’hui sous plusieurs signes qui constituent une expression sociale de l’injustice et de l’inégalité. Ces derniers peuvent être résumés essentiellement en 7 points:
2.1. Le racisme de plus en plus croissant vis-à-vis des Haratine, leur marginalisation et leur exclusion de tous les projets de développement et de promotion sociale sont les preuves concrètes de l’existence d’un système et d’une doctrine reposant sur le pouvoir plénipotentiaire des chefs des tribus qui ne cessent de marquer tous les niveaux de vie sociale du pays. En effet, les régimes qui se sont suivis depuis l’indépendance et lesquels ne sont, en réalité, qu’une sécrétion de la conglomération des clans et des fractions ont tous flirté avec les figures de proue du tribalisme dont l’association aux prises des décisions ne fait l’ombre d’aucun doute.
2.2. L’absence d’une véritable politique de logement adapté, en dépit de la mobilisation pour cela d’importants fonds rassemblés grâce aux dons, aux conventions bilatérales et aux prêts d’institutions financières régionales et internationales. Le programme: »Twiza » lequel s’occupe des quartiers périphériques, à très forte majorité Haratine, et qui en est, du reste, le fruit s’inscrit dans ce cadre. Mais au lieu de contribuer au règlement des problèmes, il participe à cristalliser davantage la discrimination. En effet, les habitats construits par le projet sont des demeures de rabais, à coût très bas mais fortement surfacturées. Ce sont des ersatz incapables d’abriter une famille entière. Et ce fait là est un abus de confiance des pauvres lesquels se trouvent entassés par dizaine dans un espace étroit où ils sont exposés à la promiscuité.
Quant à la SOCOGIM, société d’habitat, créée pour résoudre aux problèmes de logement des citoyens moyens, elle s’est faite accaparer, depuis un peu moins de deux décennies, par les richissimes et les spéculateurs du système Bidhaan, qui en ont détourné la mission. Elle est devenue mercantiliste et lucrative, délaissant ainsi les citoyens à leur triste sort.
2.3.La flambée continue des prix des matières de première nécessité (riz, huile, blé, sucre, etc.), des bonbonnes de gaz butane et du matériel de construction, pour ne citer que cela, nuisent aux conditions de vie des mauritaniens et les Haratine sont les plus touchés par la misère; car ils font, très souvent, l’objet de spéculation dans l’indifférence la plus totale de l’Etat lequel, ironie du sort, prend, sans gêne, la défense des commerçants en essayant de justifier la hausse par les cours internationaux des marchés.
La situation est d’autant plus grave qu’il n’y a, en l’absence d’une volonté réelle des pouvoirs publics, aucun organe de régulation des prix. A cela s’ajoute le refus d’intervention de l’Etat pour permettre l’amortissement des prix onéreux.
2.4. L’enregistrement de la terre au nom des tribus constitue une entrave à l’égalité et la justice. C’est un moyen d’exclusion, d’asservissement foncier et en même temps une source sûre de conflits et d’insécurité. En effet, les incidents récurrents entre Bidhaan et Haratine, depuis le vote de la loi d’incrimination de l’esclavage, augurent des lendemains incertains. Il n’y a de cela qu’un peu plus d’un mois, une guerre rangée a opposé maîtres et esclaves à Dembal Atchnane , dans l’indifférence la plus totale de l’administration territoriale et du gouvernement, tous déterminés à occulter ces problèmes pour lesquels il n’ont d’autres solutions que la censure.
2.5. Au niveau éducatif, les Haratine doivent faire appel à plusieurs sortent de pratiques racistes dont l’Etat est incontestablement responsable:
– L’exclusion des Haratine de l’école postcoloniale et bien avant, de l’Ecole des fils des chefs, annonce les dérives scolaires actuelles dont les enfants Haratine seront victimes à partir de la fin des années 70, où à la suite de la sécheresse, cette communauté a commencé en ville, loin des milieux conservateurs, à s’intéresser au savoir et à l’instruction. Le système Bidhaan va profiter de l’indigence de cette couche défavorisée et influencer l’Etat qui, graduellement, a réduit l’assistance scolaire. Très vite, c’est la suppression de l’internat et de l’hygiène scolaire, l’arrêt de la distribution des fournitures, la limitation des bourses octroyées aux apprenants à l’intérieur puis et celle du nombre des boursiers mauritaniens essentiellement Beïdanes et négro-africains.
– La politique d’exclusion massive qu’incarne le blocage et l’expulsion scolaires, amorcée avec le début de l’arabisation accélérée et visant les enfants Haratine, différents de ceux des Bidhaan par la couleur et le nom, a abouti à ce que les responsables appellent à tort, dans leur jargon pédagogique « déperdition scolaire »; un phénomène qui dure depuis un peu moins de trois décennies. Ainsi, 80% des enfants Haratine n’atteignent pas le secondaire. Sur les 20% qui restent seul 1% arrive à l’université.
– Fermeture délibérée des portes de plusieurs établissements du fondamental; les missions de contrôle récemment effectuées dans le pays, ont prouvé que la quasi-totalité des écoles toujours fermées se situent dans les zones à forte concentration Haratine, Adwaba. Le ministère de l’Education ne s’empresse pas, pour y affecter des enseignants, ni de les équiper en logistique. Ensuite, malgré l’existence de quelques cantines scolaires dans les adwaba, les enfants sont laissés pour compte et les cantines détournées par les chefs d’établissements, au vu et au su de l’administration.
2.6. Refus de reconnaissance du droit Haratine à la différence; et c’est là une des plus graves injustices et entraves à la liberté collective de cette communauté que le système tient à exposer à la phagocytose afin de pouvoir dénaturer son particularisme socioculturel comme il l’a fait, jadis, à l’histoire malhonnêtement réécrite comme en témoignent aujourd’hui les tas d’objets traditionnels ramassés dans le désert et les montagnes du centre et du Nord ainsi que les résultats des fouilles en moyens archéologiques.
2.7. L’ostracisme religieux; c’est un phénomène qui ne touche, en fait, que les sortants des institutions de l’enseignement originel parmi les Haratine. En effet, une fois leurs études finies, ces derniers ne sont désignés ni imams ni cadis, contrairement à leurs congénères blancs. Ainsi la théologie risque de rester pendant longtemps un domaine purement réservé aux seuls conservateurs Bidhaan, participant de la sorte à l’inféodation des analphabètes de la composante Haratine.
3- Sur le plan politique, administratif et militaire:
L’absence d’une réelle volonté de changement est responsable du climat d’insatisfaction, de colère et de tension qui règne aujourd’hui et qui en cas de non règlement rapide peut être une incontestable source de conflit. En effet, les 50 ans d’indépendance se sont caractérisés par une discrimination sans commune mesure dont les conséquences vont sans dire. Elles n’épargnent aucun secteur de la vie. Ce qui est le plus inquiétant c’est l’évolution de ce mal en éternel sursis dont les avatars prennent des formes inhumaines gangrenant la politique, l’administration et l’armée lesquelles excluent l’ensemble des Haratine, ou presque, de leurs rouages.
Un demi-siècle d’indépendance, l’Etat refuse toujours de concevoir que les donnes ont changé, que les mentalités Haratine ont évolué et que les assujettis récusent, contre vents et marées, le fait accompli.
3.1. Au niveau politique:
Le paysage politique mauritanien prouve, présentement, eu égard aux déséquilibres criants entre l’ensemble des composantes nationales, que jamais le partage du pouvoir, fondement incontestable de stabilité et de sécurité, n’a été la priorité des Bidhaan plus enclins à se battre pour asseoir leur pouvoir hégémoniste exclusiviste et raciste, au nom d’un blanchiment irréaliste, sachant que les Bidhaan ne sont, au juste, qu’une minorité.
Cependant, la montée du nationalisme arabe travesti, bénit par l’ensemble des régimes civils et militaires qui se sont suivis en Mauritanie, a fini par transformer les gouvernements en officine de conception et d’expérimentation des systèmes de bâillonnement, de marginalisation, d’ostracisme, d’exclusion et de nihilisme identitaire quasi-totalement dirigés contre les Haratine.
Si, à cause de l’environnement tribaliste et féodal très conservateur et hostile aux valeurs d’égalité et de justice social, à l’indépendance, on pouvait tenter de comprendre les raisons de marginalisation des Haratine, alors indifférents, il est malhonnête de ne pas reconnaître et apprécier à sa juste valeur la parfaite évolution des mentalités au sein de cette communauté aux prises avec l’archaïsme d’une société Bidhaan encore nostalgique du passé.
Ainsi faut-il dire que les mesures nouvellement prises par Sidi Mohamed Ould Cheïkh Abdallahi ne sont que du tape-à-l’œil, une mise en scène dont le but est la diversion de la communauté Haratine notamment son intelligentsia laquelle réclame, depuis belle lurette, l’incrimination des pratiques odieuses de l’esclavage et la réinsertion des esclaves et affranchis inhumainement livrés par l’Etat aux entreprises voraces des Bidhaan.
Certes, la loi incriminant l’esclavage a été unanimement votée au sein du Parlement. Mais comme l’a répété l’ensemble des députés, l’expérience montre que l’on ne change jamais des mentalités et des pratiques séculaires par le seul vote d’une loi. Alors faut-il l’existence au préalable d’une réelle volonté politique ce qui du reste n’existe pas.
D’autre part, bien que le Président au pouvoir soit élu au terme d’une campagne menée sur fonds de changement, on note aujourd’hui avec beaucoup de déception, que la question du partage de pouvoir ne connaît point d’évolution. En effet, toutes les institutions politiques actuelles, constituées de personnalités désignées, sont totalement dépourvues de Haratine. Il s’agit de:
– Le Haut Conseil Constitutionnel
– Le Haut Conseil Islamique
– Le Haut Conseil de la magistrature
– La chambre Nationale de commerce
– Les conseillers et les chargés de mission à la présidence.
3.2. Au niveau administratif:
Toutes les nominations auxquels l’on assiste depuis l’investiture du Président de la République et la désignation de Zeïne Ould Zeïdane au poste de Premier Ministre excluent de façon flagrante et inadmissible les Haratine: 3 sur 30 Portefeuilles ministériels dont 2 ministres proposés par APP, 2 Secrétaires Généraux de Ministères, 1 Ambassadeur sur à peu près 50, 2 walis sur 13, 1 Directeurs d’Etablissement Public sur un peu moins de 200, etc.
Il s’impose, à la lumière de ces décisions discriminatoires et subjectives, de s’interroger sur les critères de nomination. Et là, il faut dire que face aux critiques de plus en plus nombreuses, le Premier Ministre rétorque: les compétences. Mais l’entendement humain peut-il concevoir qu’il n’y ait de compétences en 50 ans d’indépendance que parmi les blancs, comme si elles se transmettaient dans les gènes. D’ailleurs, ses dites compétences sont celles-là ayant enfoncé le pays dans l’impasse.
Il y a lieu de faire trois constats qui compromettent actuellement le recrutement et la promotion des cadres Haratine:
– Projet de décret relatif aux emplois d’encadrement de l’administration:
Cette mesure d’accompagnement qui vient en application de la loi 93-09 du 18 janvier 1993 consacre le trafic d’influence et le clientélisme politique lesquels, à travers le lobbying, l’appartenance tribale, idéologique et politique, est responsable du placement systématique des 99% de cadres exclusivement Bidhaan dans l’administration centrale et à laquelle l’Etat tient à limiter les nominations. Ainsi, cette loi arbitraire va exclure les critères de compétences, d’efficacité et d’ancienneté, c’est-à-dire le mérite.
A l’instar de plusieurs autres ayant ponctué l’histoire du pays, cette machination s’inscrit dans le cadre d’une large campagne de marginalisation et d’exclusion des cadres Haratine. L’objectif est d’arriver à en freiner l’ambition et réduire les nombreuses voix qui réclament un partage juste et équitable de tous les postes de responsabilité.
– L’exclusivisme de la commission nationale des concours:
De par sa composition raciste et le nationalisme ethnique et raciale de ses membres constitutifs, résolus à défendre becs et ongle la suprématie Bidhaan, La commission nationale des concours fait beaucoup de tort aux Haratine dont les jeunes cadres (maîtrisards, détenteurs de doctorats, médecins, ingénieurs, techniciens supérieurs, etc.), sortants des mêmes académies et écoles professionnelles que leurs condisciples blancs, sont considérés des persona non grata et systématiquement bloqués.
– L’appropriation de l’Ecole Nationale d’Administration:
L’Ecole Nationale d’Administration recrute, ses dernières années, dans le silence le plus absolu: ni affichage ni annonce, en guise d’information, dans les organes de presse. Seuls les Bidhaan (féodaux et nantis) dont les enfants intègrent cet établissement au grand dam des Haratine ont le droit à l’information. A l’insu de tout le monde, ils en sortent, qui administrateurs, qui journalistes, juristes ou autres. Grâce à la complicité de l’administration beaucoup héritaient les postes qu’occupaient leurs parents. Les preuves sont nombreuses à la télévision, à la radio, à l’administration, etc.
3.3. Au niveau militaire:
Le tableau qu’offre la composition ethnique et raciale du corps des officiers militaires et paramilitaires mauritaniens est plein de contradiction, d’hypocrisie et d’injustice. Car au moment où le pays est peuplé par une majorité de Haratine, ceux-ci demeurent relégués aux seuls postes subalternes. Ils constituent plus de 70% des hommes de troupes, tandis qu’ils ne sont estimés qu’à moins de 20% des sous-officiers et à peu près 2% seulement des officiers. Tout cela est la conséquence d’une longue période de discrimination dont on ne peut exclure les responsabilités de l’Etat.
En effet, des sources concordantes affirment avoir effectivement reçu des consignes exigeant l’exclusion systématique des Haratine à tous les niveaux de la hiérarchie. Là, les preuves ne manquent pas. Elles vont des aveux très gênants de Colonel, Baby aux déclarations des principaux responsables des cavaliers du changement, lors de leur procès à Oued Naga, près de Nouakchott.
Cette situation d’exclusion, de bannissement et de dégradation subie aujourd’hui par les Haratine se résume en 5 constats essentiels :
– Seul 1% des officiers Haratine arrive à surmonter le blocus dont ils sont victimes et se nourrir de l’espoir de pouvoir, un jour, assumer de hautes responsabilités. Les 99% autres qui restent, ils sont condamnés de partir à la retraite au grade de Capitaine, quelque soit le corps. Cette pratique, irresponsable du reste, a été récemment dénoncée par un officier Bidhaan déserteur, dans sa lettre ouverte adressée au Président de la république.
– Le dernier mouvement au sein de l’armée nationale a écarté l’ensemble des officiers Haratine des postes de commandant des 7 régions militaires que compte le pays; preuve concrète de l’obstination du système Bidhaan à persévérer dans l’injustice. Sur à peu près les 28 départements et écoles, il n’y a que 2 qui sont dirigés par les Haratine.
– Les candidats Haratine désireux d’intégrer le corps des officiers (armée, gendarmerie, garde, douane et police) sont victimes de rejet immédiat ou ils sont recalés pendant l’enquête de moralité. Dans de rare cas, la commission en retient 1 ou 2 par recrutement: manière de vouloir taire les contestataires des machinations népotistes.
– Les homes de troupes des forces armées et les agents de police issus de la communauté Haratine sont les seuls qui sont affectés dans les zones du front, livrés à eux-mêmes, sans armes, sans véhicules appropriés ni munitions, en chair de canon aux brigands et aux terroristes. Cela s’est vérifié par les attaques respectives, en 2005 et 2008, de Lemgheïty et de Ghallaouiya au cours des quelles l’ensemble des victimes, ou presque, sont des Haratine.
– L’octroi des bourses de formation aux officiers et sous-officiers est très discriminatoire si bien qu’il suscite beaucoup de mécontentement et de protestation de la part des Haratine.
Cette privation de bourses de formation professionnelle contribue au contrôle de tous les départements essentiels par les Beïdanes.
IV- Conclusion:
FUAH rappelle que ce bilan de 5O ans d’indépendance ne contribue guère au renforcement de l’unité nationale à cause des contrevérités, de la manipulation, de la marginalisation, de l’exclusion, de l’assimilation… Aussi faudrait-il, nécessairement, attirer l’attention sur les vérités historiques incontestables et inaltérables que nous avons énoncées pour ramener aux souvenirs le rôle, on ne peut plus incontournable, des Haratine, soupape de sécurité et de stabilité de ce pays, eu égard à leur poids démographique qui envoisine les 50% de la population nationale.
FUAH estime que grâce à leur prise de conscience collective, à l’origine de la naissance, le 5 mars 1978, du mouvement El Hor dont la Direction Historique a toujours préconisé le dialogue et privilégié l’adoption d’une stratégie prônant l’usage des voies pacifiques comme moyen pour parvenir à des solutions sociales, économiques et politiques durables. Les Haratine ont milité en faveur de la création d’un climat saint et propice à l’émergence d’un Etat fort et égalitaire. Mais, au lieu de saisir cette opportunité et apprécier à sa juste valeur les efforts consentis, le système a préféré continuer de serrer l’étau autour de ladite communauté, à travers une politique exclusiviste et agressive, une politique d’asphyxie économique et de dépersonnalisation sociale laquelle est en train de placer le pays dans l’œil du cyclone.
Les mauritaniens ne cessent, en outre, d’assister depuis la promulgation de la loi de condamnation et d’incrimination de l’esclavage, à une campagne de destruction du tissu économique des asservis. En effet, ces derniers sont, actuellement, l’objet d’un harcèlement organisé et systématique, d’attaques armées et perfides, d’un vaste processus d’expropriation de terre et de privation de points d’eau lesquelles dérives ne pourraient être justifiées que par la volonté du système visant à réduire la liberté d’êtres libres par essence et les assujettir éternellement à l’esclave.
C’est dire que le pays est dans l’impasse. Il traverse une situation marquée par l’absence de mesures efficaces susceptibles de redresser l’orientation politique en vue de restituer les Haratine dans leurs droits de manière à garantir le partage équilibré du pouvoir en tenant compte du poids démographique de chacune des composantes nationales dans un Etat où tous les citoyens jouissent de leurs droits fondamentaux, un Etat qui leur garantit l’égalité des chances et la distribution équitable à la fois des richesses et des fonctions.
FUAH attire, par ailleurs, l’attention de la communauté internationale sur l’état socio-économique que vivent les Haratine, particulièrement ceux des milieux ruraux et des périphéries des centres urbains. Il dénonce également la manière avec laquelle le dossier de l’esclavage a été traité depuis la promulgation de la loi d’incrimination de l’esclavage qui n’est en réalité qu’une comédie bouffonne et ridicule destinée à la consommation politique et à la déroute de l’opinion nationale.
Ceci étant, vu la banalisation des conflits par le pouvoir en place que nous condamnons fermement, vu l’ostracisme qui s’en prend à tous les cadres Haratine mais aussi le peu d’intérêt accordé au dossier de l’esclavage rabaissé et confondu à une loi, au demeurant, théorique, vu l’état socio-économique piteux de cette communauté tant dans les zones rurales que dans les périphéries des centres urbains, toujours aux prises avec le mépris et la discrimination, FUAH fait porter toute la responsabilité des conséquences fâcheuses qui peuvent en découler au gouvernement et s’engage, désormais, en l’absence d’un Etat de droit fort et égalitaire, à assumer, en âme et consciemment, son devoir de lutter en vue d’un changement réel et effectif devant aboutir à l’émergence d’un Etat fort basé sur le respect des valeurs de justices, d’égalité et de démocratie.
Enfin, vu la tragédie que vivent actuellement les Haratine, une tragédie objet de censure et de désinformation dont le but est de cacher la réalité et ses incidences malencontreuses à l’opinion nationale et internationale, FUAH prendra, en conséquence, dans les mois à venir toutes les décisions nécessaires et appropriées, si toutefois le système ne change pas sa politique d’agression et crée de nouvelles conditions favorables à l’association des Haratine dans la gestion des affaires de l’Etat.
FUAH
Nouakchott, le 5 Mars 2008
Annexe :
Tableau récapitulatif illustrant le niveau de l’exclusion des Haratine durant tous les régimes civils et militaires:
28 novembre 1960 – 10 juillet 1978 | 10 juillet 1978 – 12 décembre 1984 | 12 décembre 1984 – 3 août 2005 | 3 août 2005 – 19 avril 2007 | 19 avril 2007 – février 2008 | |
Administration Publique | |||||
Ministres | 0 | 0 | 2 à 3 par gouvernement | 2 | 3/30 |
Conseillers et Chargés de missions à la Présidence | 0 | 1 | 0 | 2 | 0 de l’ensemble |
Conseillers et chargés de missions à la Primature | 0 | 0 | 0 | 0 | 1 de l’ensemble |
Secrétaires Généraux | 0 | 0 | 1 par gouvernement | 1 | 2/30 |
Ambassadeurs | 0 | 0 | 1 pendant les 21 ans de Taya | 1 | 1 de l’ensemble |
Walis | 1/13 | 1/13 | 1/13 | 1/13 | 1/13 |
Hakems | 1/53 | 1/53 | 1 à 2/53 selon les périodes | 1/53 | 2/53 |
Chefs d’arrondissements | 0/34 | 0/34 | 1/34 | 1/34 | 2/34 |
Magistrature | |||||
Présidents des tribunaux | 0 | 0 | 0 | 1 | 2 sur l’ensemble |
Greffiers en chef | 0 | 0 | 1 | 5 | 5/171 |
Greffiers | 0 | 0 | 2 | 4 | 4/153 |
Notaire | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 |
Huissiers | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 |
Education | |||||
DREN | 0/13 | 0/13 | 1/13 | 1/13 | 0/14 |
Santé | |||||
DRASS | 0 | 0 | 1 | 1 | 1 |
Institutions militaires et paramilitaires | |||||
Chefs d’Etat Major National | 0 | 0 | 1 moins d’un an seulement | 0 | 0 |
Chefs d’Etat Major de la Gendarmerie | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 |
Chef d’Etat Major de la Garde | 0 | 0 | 0 | 0 | 1 |
Commandants des Régions Militaires | 0 | 1 | 2 | 0 | 0 |
Direction Générale des Douanes | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 |
Direction Générale de la sûreté | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 |
Directions Régionales de la Sûreté | 0 | 0 | 0 | 0 | 0/13 |