Le 28/02/2020 – Le Mondafrique
Les 24 et 25 février se sont tenus à Nouakchott le Sommet du G 5 Sahel et l’Alliance pour le Sahel. Une chronique de Ahmedou Ould Abdallah, ancien ministre mauritanien des Affaires Etrangères et ancien ambassadeur de l’ONU en Afrique.
De nombreux malentendus et fausses informations embrouillent la crise du Sahel Sahara, contribuant à l’aggraver et à en retarder la résolution. Pour aider, un rappel est nécessaire. La tragique actualité de la crise du Sahel fait oublier sa terrible réalité: l’imbrication de multiples conflits
Des crises multiples
Il y a d’abord la crise politique malienne, la plus ancienne de toutes, datant au moins de 1964. Elle a connu de nombreux règlements, souvent restés formels (dont Accords de Tamanrasset, 1991; Pacte national, avril 1992; Accords d’Alger 04/07/2006; Accords d’Alger 15/06/2015) et, sans exception, suivis de nouvelles crises.
Depuis lors, cette crise, naguère limitée au nord du pays, a contaminé le centre où des violences, contre et entre civils, fragilisent l’état.
Il y a ensuite, greffée sur et liée à cette crise malienne, celle du Sahel Sahara. Elle concerne toute la bande sahélienne, en particulier les pays dit du G 5 Sahel. En réalité, elle s’étend des côtes atlantiques jusqu’aux rives de la Mer Rouge tout en englobant les parties méridionales du Maghreb et septentrionales de la Savane.
La troisième crise, ou celle de la criminalité, se consolide à travers des trafics multiples: drogue, cigarettes, migrations, exploitations d’or, etc. Sans cesse dans d’actualité, aux mains de multiples acteurs nationaux et internationaux, cette criminalité se nourrit de et aggrave les deux premières crises.
Les réponses possibles
La résolution de ces conflits demande une réponse qui tienne compte de cette multiplicité des crises nationales dans la crise régionale du Sahel.
Parler de la crise du Sahel Sahara, comme d’une seule entité, en fausse le diagnostic, affaiblit l’efficacité des remèdes et perpétue l’insécurité. Aujourd’hui, le véritable défi est comment, par une action politique et militaire, nationale et internationale, aboutir à un succès politique durable dans l’un des pays concernés?
Le volet économique a une importance indiscutable pour la consolidation de la paix : reconstruction avec emploi, infrastructures, recettes budgétaires. Comment pouvoir le mettre en œuvre – durant le conflit ou après la résolution des crises demeure – est la question. Un Plan Marshal avant le débarquement.
Un rappel pour la région. Les conflits longs, plus ou moins chauds, existent ailleurs dans le monde: Somalie, Soudan, Sud Soudan, Afghanistan, Yémen, etc. Douloureux, sans doute ! La communauté internationale finit par s’en accommoder ! En d’autres termes, ‘’la légitimité’’ d’une cause et les revendications politiques ne suffisent pas pour résoudre une crise.
Les élites dirigeantes du Sahel Sahara devront se mettre à jour quant à l’effectivité – diplomatique, économique et militaire – des relations de nos pays avec le reste du monde.
Il faudra alors constituer de vastes coalitions, d’abord nationales, pour une gestion transparente des états pris individuellement. Ils pourront ensuite, entre eux et avec leurs partenaires internationaux, constituer des alliances crédibles pour une action collective contre le terrorisme. Avec de réelles chances de réussite et un meilleur usage des appuis extérieurs.