Que sont-ils devenus ? Un parcours en dents de scie (troisième partie)/Par Sy Mamadou Samba

L’Administration me refusant la diffusion de mon rapport de mission relative à la vulgarisation de la loi abolissant l’esclavage (effectuée avec autres journalistes de la presse publique en 1981), je réalisai qu’il ne servait à rien que je restasse au Journal, en journaliste à bouche cousue, la plume sans encre. Pour ne rien faire de bon, en fait. J’ai du coup compris ce qu’on voulait que je fusse, à savoir un griot de l’État, comme l’étaient et le sont encore aujourd’hui les journalistes mauritaniens, hormis une minorité courageuse et indépendante, qui s’est vaccinée contre la corruption et la peur de demain. Il se trouvait juste que le directeur de l’Office National du Cinéma (ONC) cherchait un collaborateur averti et expérimenté en matière d’audiovisuel. Une médiation entre nous s’établit et aboutit à mon détachement à l’ONC où je fus nommé chef de service d’importation et d’exploitation des films cinématographiques.

Ainsi l’exploitation de la Salle pilote de l’ONC relevait de mes compétences.  L’ONC était en concurrence inégale et déloyale avec les exploitants des salles de cinéma privées. Il n’avait pas pu résister plus longtemps à cette impitoyable rivalité d’autant que l’État n’avait rien fait dans le sens du développement règlementé du septième art. L’entreprise, avec son personnel pléthore, trainant des arriérées de salaires, finit par être privatisée ou semi-privatisée. Et moi, de rejoindre de nouveau le Ministère de l’Information, lequel était alors rattaché au super Ministère de l’Intérieur, des postes et télécommunications, dont le Ministre était l’homme fort du régime à l’époque, j’ai nommé Djibril Ould Abdallah, plus connu sous le nom de Gabriel Semper.

Là au Ministère, je fus nommé au conseil des Ministres, chef de service de l’administration au sein de la direction de l’Audiovisuel, avant quelques mois plus tard d’être de nouveau nommé au conseil des Ministres, chef de service d’études,  en cumul avec le secrétariat permanent de la commission nationale de censure des films cinématographiques, vidéocassettes, de la photographie, et des documents sonores. J’avais en face de moi une lourde responsabilité, en ce sens que, désormais, c’était moi qui validai les travaux de cette commission chargée du contrôle d’entrée et de sortie du pays, toute information audiovisuelle : l’exploitation des salles de cinéma, la diffusion de tout document sonore, les prises de vue et le tournage des films documentaires (par des nationaux, surtout par des étrangers) sur toute l’étendue du territoire national.

Bref, il fallait agir de sorte qu’aucune idée, idéologie, philosophie, culture, de nature à porter atteinte à la sécurité et la sûreté du pays, ne s’infiltre, n’entre en Mauritanie. Ce rôle avait comme corollaire, l’attribution désormais d’un visa à toute diffusion sonore. C’était cette commission dont j’étais le secrétaire permanent qui était seule habilitée à délivrer les visas de diffusion cinématographique, ou de tout support sonore ou visuel.

Cette commission était composée des secrétaires généraux des Ministères de l’intérieur, de l’orientation islamique, de l’information (fusionné avec celui de l’Intérieur), Un représentant de la direction de la sûreté nationale, des directeurs des organes de presse, et du directeur de l’audiovisuel. La réunion était hebdomadaire. Et dès qu’elle s’installe, on me dit : « M. Sy, fais nous un exposé bref sur tes décisions. Quels sont les films et vidéos cassettes retenus pour la diffusion ? On te fait confiance, si des têtes seront à couper, la tienne sera la première! », me met ainsi en garde gentiment, mais fermement, le représentant de la sûreté nationale (je pourrais vous nommer toutes ces personnalités, mais à quoi bon de le faire ?). Ce qui signifie que c’était à moi de prendre la responsabilité de donner ou pas de visa à tous les films destinés à la diffusion dans les salles de cinéma. Parallèlement, je devais contrôler les maisons de vente ou de location des vidéocassettes, des librairies, des photographies. Une lourde responsabilité qui m’obligea à faire recours aux bénévoles pour m’aider à contrôler la diffusion des films dans les salles de cinéma. A cette fin, des cartes d’accès libres dans les salles de cinéma étaient mises à ma disposition par l’Autorité audiovisuelle (directeur). Je distribuais ces cartes à des amis de confiance qui m’avaient vraiment aidé dans ma mission du contrôle de la circulation des idées afin d’en extraire celles qui avaient comme but la subversion, l’intoxication ou la déstabilisation.

 

Salaire de misère

Ce travail impliquait que je visionnais tous les films avant la tenue de la réunion de la commission. Ainsi je veillais tous les jours, la moitié de la nuit, à visionner les films que me présentaient les exploitants des salles de cinéma. L’on peut imaginer quel effort j’avais fourni afin d’être imperméable à la corruption. Les exploitants importaient leurs films de l’étranger, du Sénégal le plus souvent. Imaginez quelle perte ils auraient subie si on leur refusait le visa de diffusion ! J’étais très sollicité. Mais mon intégrité morale et mon sens de responsabilité étaient tels que je fus toujours imperméable à la corruption et c’était avec rigueur que je remplissais mon devoir de patriote et m’efforçais d’être à la hauteur de la confiance que la commission avait placée en moi. Avais-je d’ailleurs d’autres choix ? Je ne tenais pas à avoir la tête coupée ! J’avais l’opportunité d’être millionnaire, chose non facile à l’époque, où un million d’ouguiya équivalait à cinq (05) millions de Franc CFA. Mais comme depuis toujours, je privilégiais mon titre de bon musulman par rapport à tout. Évidemment, personne ne connait mieux que moi, combien il est difficile de résister contre la corruption. Surtout à l’époque, j’avais un salaire de moins de VINGT MILLE OUGUIYA. Mais je ne me plaignais pas, car à côté de moi, je voyais des cadres (j’ignore comment ils l’étaient devenus. Certainement des hauts fonctionnaires non bacheliers qui ont fait des études de je ne sais où, et qui ont été nommés par la voie de magouille), dont les salaires étaient minables, moins que la charité.

Heureusement qu’à l’époque, c’était Monsieur Camara Saidou Boubou qui était directeur de la fonction publique. C’était un homme intègre, un fonctionnaire modèle qui ne blaguait pas avec des diplômes truqués, falsifiés. S’il eût été vivant aujourd’hui, avec la même fonction, il aurait systématiquement rejeté la pléthore de faux doctorats qui pullulent dans ce pays. Il n’était pas complaisant. Et ne se laissait jamais corrompre par qui que ce soit. Il était très légaliste, fidèlement. Est-ce pareil aujourd’hui, je n’en sais rien, j’en doute fort. A l’époque, quand un étudiant revint avec son doctorat, il lui demandait quand est ce qu’il avait obtenu son Bac. On sait bien qu’un doctorat authentique ne s’obtient pas avant au moins huit (08) ans post Bac.

J’étais très épanoui dans ce poste, puisque j’y étais très actif. Je ne m’ennuyais pas. Certes, je n’exerçais pas le métier du journalisme, si on se réfère à la définition d’un journaliste, mais je me sentais vivant et utile. L’emploi de mon temps n’était pas du temps perdu, fictif ! J’avais été très bien apprécié par toutes ces personnalités influentes qui m’avaient ouvert la porte vers le haut. Ils me vendaient partout, tellement ils étaient satisfaits de mon travail. D’autres horizons m’étaient ouverts ; petit à petit je sortais du tunnel. C’est alors que j’ai obtenu une pige au Journal Chaab, et obtenu un poste d’enseignant en tant que vacataire à l’Université, où je m’étais inscris pour une licence en sciences juridiques, grâce à l’appui de mon ami et collègue Mohamed Lémine Ould Dahi (anicien Directeur de Cabinet de feu Ely) qui était alors le Doyen de l’Université. De plus, j’avais effectué deux missions à l’étranger, et plusieurs à l’intérieur du pays. Je devins populaire dans le milieu intellectuel qui avait découvert en moi des qualités, la modestie mise à part, rares. J’avais ouie dire que j’étais intègre, incorruptible, et cela me flattait, plutôt m’honorait à plus d’un titre. Dans n’importe quel milieu intellectuel, dans n’importe quel rassemblement d’individus d’initiés (ministres, ambassadeurs, directeurs, corps constitués…),  quand on parlait de moi, les gens en réaction spontanée, disaient: »Wakhyart M. Sy! ». J’étais vraiment heureux dans ce poste ! J’étais déjà repéré par le pouvoir.  Et peu après, une mission casse-tête chinois m’appela au Journal Chaab.

 

Comment je suis devenu le DGA de la SMPI et directeur du Journal

Ce poste est surnommé « accoucheur des Ministres ». C’était un transit pour entrer au Gouvernement, et c’est pour cette raison qu’il était prisé par tout le monde. Il était vacant pendant cinq ans avant que j’y eusse accédé. Apparemment aucun directeur général de la SMPI ne souhaitait avoir un adjoint, ce qui justifia cette longue vacance de ce poste clé pour la bonne gestion des ressources humaines au sein de l’établissement. La SMPI (Société Mauritanienne de Presse et d’Impression) avait en son sein le Journal Chaab qu’elle imprimait. J’avais renoncé à l’ambition d’être ministre au profit de poste du premier conseiller d’Ambassade à Paris. Le projet avorta avec le départ du Gouvernement de certaines personnalités influentes de l’État, à la fin des années 90. Dieu fait toujours bien les choses! Alhamdulillah ala kulli haaline! Mon départ de la SMPI, suite à ma nomination au conseil des Ministre au poste du directeur du cinéma et de la publicité, et la naissance de l’AMI, date du même jour.

Une destinée, un sort, un hasard?

Un beau jour alors que j’étais chef de service des projets à la direction de l’Audiovisuel, au Ministère de l’Information, détaché au Ministère de l’Intérieur; et secrétaire permanent de la commission nationale de censure, le Destin fit que Lo Amadou dit Baidi Lo me demanda mon curriculum vitae (CV) qu’il remit au Ministre de l’équipement, Monsieur Brahim Ould Aly Ndiaye, en l’occurrence. L’objectif était que Brahim intervienne auprès de son ami et collègue le Ministre de l’intérieur, de l’information, des postes et télécommunication…, Djibril Ould Abdallahi, l’homme « fort » du pays à l’époque, pour ma promotion. C’était un lundi, et le mercredi qui suivit, je fus nommé au conseil des ministres, directeur général adjoint de la SMPI/Journal Chaab. Extraordinairement le même jour (on était le premier Juillet 1987), ma fiancée, une cousine Maghamoise, rejoint le foyer conjugal. Extraordinairement parce que la date de ce mariage, je l’avais fixée quatre mois plutôt! Et elle coïncida avec ma nomination au Journal. J’avais vécu ce double évènement heureux. Il y eut une affluence chez moi: d’aucuns sont venus me féliciter pour la nomination, d’autres pour le mariage et d’autres pour les deux à la fois (ces derniers étaient au courant de la venue ce jour du conjoint). Certains d’entre eux parlaient du hasard, et d’autres du destin. Je rejoignais ces derniers, car pour moi, le hasard n’existe pas. Tout est écrit à l’avance, sous l’angle religion. Il s’agit du « fatum » en latin, de la fatalité chez les Grecs (j’y reviendrai dans un autre registre).

Ainsi, à l’instar de la quasi totalité des cadres élevés aux hauts postes, j’ai bénéficié du « Système » dont ne cesse de parler des méfaits un certain Kaw Touré. Et il n’est pas le seul! Qu’on ne voie pas ce privilège comme une honte (certains soi disant « progressistes » verraient cet avantage comme une « réaction », au sens péjoratif du terme). Le « réactionnaire » aux antipodes de « révolutionnaire » est pris pour conservateur passéiste qui s’oppose aux progrès sociaux. Dans un pays comme le nôtre où l’injustice prévaut et bat son plein, tous les moyens sont permis pour rétablir la justice. En effet, en Mauritanie d’hier comme celle d’aujourd’hui, pour accéder aux hautes responsabilités, il faut avoir, comme on dit, de « bras longs » Il faut être « pistonné ». L’interventionnisme à outrance caractérise malheureusement notre Administration. Ceux qui n’en bénéficient pas, occupent des postes subalternes jusqu’à leur retraite, et ce, en dépit de leurs diplômes supérieurs et leurs compétences professionnelles avérées. « L’homme qu’il faut à la place qu’il faut », est un principe ignoré de l’État, une expression absente du vocabulaire de l’Administration. Sinon un mot vide de sens.

Au passage, notons qu’aller à la retraite en Mauritanie, c’est être jeté à la rue (pour moins dire la poubelle comme un rasoir jetable) après trente ans ou plus de service loyal, avec un statut désormais de pauvre. Pauvre surtout si avant, tu n’as pas pu avoir investi ou réalisé quelque chose qui te garantisse la survie, te mette à l’abri des besoins vitaux, de la précarité. La pire des choses qui puisse arriver à un fonctionnaire ou tout travailleur, c’est de bénéficier de ses droits à la retraite sans se disposer d’un logement à soi. Un retraité locataire à Nouakchott ou ailleurs dans de grandes villes, en dehors de son chez traditionnel où il a au moins  un bâtiment ou une cas(chez les négro-mauritaniens),  une tente ou « khayma » chez les Maures,  c’est grossir le nombre des misérables.

Le problème c’est que l’acquisition d’un tel abri en Mauritanie, d’une manière générale, requiert une trajectoire professionnelle fulgurante émaillée des nominations à de hautes responsabilités qui confèrent la vie aisée permettant l’épargne d’une partie de ses revenus.  La retraite chez nous  est insignifiante  à telles enseigne qu’elle  est synonyme de la pauvreté. Or, à ce stade, deux inconvénients majeurs à relever: premièrement, il n’est pas donné à tout le monde d’accéder aux postes de responsabilités qui conférèrent de salaires conséquents et des avantages qui s’y rattachent (indemnités variées et consorts). Deuxièmement, une fois installé à ces postes de privilèges dont l’accès n’a pas toujours comme critère la compétence, le profil convenable, le fonctionnaire (ou le travailleur tout court) n’a pas et ne peut pas avoir normalement, un salaire qui, quelques mois ou années plus tard, lui permette de construire de villas luxueuses à Tevragh zeina, si et seulement si, il ne procède pas aux détournements des deniers publics, à la malversation; au vol, en un mot. Un tel Monsieur, voleur de la chose publique, peut, une fois à la retraite, vivre à l’abri des problèmes de subsistance. Parfois même, il mène une vie opulente, souvent insolente acquise donc malhonnêtement et vicieusement sur le dos des contribuables (si ceux-ci existent en Mauritanie. Là aussi, c’est un autre problème!).

Pour revenir à notre page, soulignons que le Ministre aurait dit qu’il ignorait qu’il avait un tel cadre polyvalent dans son département dont la promotion ne nécessitait point d’intervention. Toujours est-t-il qu’après une longue traversée du désert, je devins le responsable du quotidien Chaab, grâce à Allah, avec le concours (« Sabab », kullu chey in lahu sabab) de Lo Amadou et Brahim Ould Aly Ndiaye, deux officiers de renom qui symbolisent la compétence en matière militaire. Ce dernier (Brahim) étant un très proche de Djibril Ould Abdallahi, mon ministre d’alors, fut un élément déterminant par rapport à ma promotion « tardive »(il vaut mieux tard que jamais!). Et depuis, une relation humaine, sincèrement amicale se créa entre nous. Elle est aujourd’hui vierge, égale à elle même, voire encore beaucoup plus vive, active et cordiale.

Dans ce poste très convié, je dormais la nuit avec les fenêtres de mon esprit bien fermés, car au règne absolu du Ministre de l’Intérieur en l’occurrence Monsieur Djibril Ould Abdallahi, personne n’osait te relever, ou magouiller pour ton limogeage, si c’est lui Gabriel Cymper qui t’a nommé ou recommandé ta nomination. Tout cela n’est pas sérieux, normal, selon moi, dans un pays qui se dit musulman à 1OO% et qui se vante d’être démocratique. Ici les rapports et relations valent plus que les lois, les rumeurs que l’information officielle, les bonnes humeurs que la logique et la normalité. Tout se négocie et s’échange en marge des règles déontologiques. Mais bon!,  j’avoue que j’avais bénéficié de ce système discriminatoire injuste et rétrograde, par la force majeure, si je puis m’exprimer ainsi. Je le rejetterai plus tard, ce Système, le développement de notre texte le prouvera. Le mal du pays ne se trouve pas dans les Régimes, mais dans ce Système établi imbécilement depuis l’indépendance du pays, voire bien avant, avec l’aide du colon de notre colonisation tardive, mais championne en terme de division et de calcul malveillant.

Quant à Lo Amadou, le premier en Mauritanie bachelier, que je sache, qui opta son entrée dans les corps des constitués, est certes un des premiers cadres de la gendarmerie nationale, formé en Algérie. Il fut incontestablement un des plus brillants, courageux et compétents, physiquement, intellectuellement de l’armée nationale. La guerre du Sahara qui est à l’origine de la pauvreté de la Mauritanie,  en est l’illustration parfaite. Malheureusement il n’a pas eu tous les mérites liés à sa carrière de soldat exceptionnel qui a servi loyalement et patriotiquement son pays. Les motifs de ce manquement flagrant, de cette marginalisation calculée, pourraient se trouver fouillis dans ses relations privées, assez tumultueuses avec ses supérieures hiérarchiques à l’égard desquels il n’avait aucun complexe d’infériorité. Son tempérament rejetait toute soumission aveugle, refusait la complaisance et la subordination autre que celle qu’exige la loi.

Cette rigueur morale et comportementale lui a coûté  la marginalisation. L’exposition à des besoins dont il aurait pu et dû être à l’abri, eu égard à son rang de soldat exceptionnel.  A la limite, on peut dire sans grand risque qu’il fut victime du « Système » discriminatoire, voire raciste, hérité de la colonisation. Et pourtant, nul qui le connaisse, malhonnête fut-t-il, ne peut contester son sens de l’ordre, de légaliste, son dévouement et sa fidélité sans faille à l’État. C’était un vrai soldat, irréprochable professionnellement, mais qui fut victime de l’injustice. En effet, Lo Amadou gendarme n’a jamais, en vérité, échoué à un concours ou examen. Il est super intelligent.(au passage, en guise de rappel, Lo Amadou fut le premier de la Mauritanie à l’entrée en 6e en 1964. J’étais de la même promotion que lui). On l’a toujours ajourné afin de lui casser les ailes, alors officier de la gendarmerie. Il a vécu une situation frustrante quand il voyait périodiquement des gendarmes que lui-même avait formés, passer d’un grade à un autre, d’une promotion aux postes stratégiques à une autre.

Certains d’entre eux devenaient même ses supérieurs hiérarchiques. Il était d’un « Tawhiid » rarement égalé. C’est avec une sagesse exceptionnelle qu’il se résignait chaque fois qu’il se trouvait sous le poids de l’injustice. Une force qu’il tient de sa foi inébranlable au Destin. Mais selon Malraux, l’art est un anti-destin. Mais l’art n’est pas la religion! La liberté de forger son destin, de modifier sa destinée, au gré des évènements, ne se conçoit pas par rapport au message divin. Paradoxalement, les philosophes grecs, bien que non musulmans (puisqu’ils reconnaissaient plusieurs dieux), semblaient reconnaitre le déterminisme en ce sens que pour eux, « ce qui arrive, arrive justement ».

Et pourtant, Lo ne s’était jamais plaint, seuls ses proches qui avaient la certitude qu’il subissait l’injustice s’indignaient du traitement injuste et inhumain qu’il subissait. Ceux ci racontent qu’il était toujours admis (même au premier rang) aux examens pour passer au grade supérieur, mais dès que les résultats reviennent de la Hiérarchie suprême, on le déclare non admis, alors que la réalité est tout autre. C’est de cette manière que les gendarmes que lui même avait formés devenaient plus gradés que lui et du coût, ses supérieurs hiérarchiques.

 

L’École et l’Administration sont des lieux où se manifestent le plus, l’injustice, l’inégalité, et la discrimination, dans les pays dits en voie de développement, d’une manière générale, en Mauritanie plus caractériellement, particulièrement. Nous ferons un « papier » prochainement sur ce grand gendarme, Lo Amadou, qui symbolise la sagesse et la patience, mais aussi, la joie de vivre sa vie en toute  liberté légale et légalisée,  sans se soucier des « flèches » jetées à son adresse. Parfois, et c’est d’ailleurs toujours le cas, on ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre!

Source: Le Calame