Quand des tentatives de parjure se profilent à l’horizon et que les Ulémas observent sans rien dire, Quand un Chief –justice encourage de vive voix la violation de la loi fondamentale dont il est censé être le garant,
Quand la sacralisation de « l’avoir » l’emporte sur tout, alliée à la fourberie, à l’hypocrisie, au mensonge, Quand l’honnêteté cesse d’être une valeur cardinale, que la société se délite pour hisser au pinacle ceux qui pillent l’Etat,
Quand nos bouches convoquent sans arrêt l’Islam pendant que ses principes essentiels ( honnêteté, probité , hygiène , amour du prochain) sont à tous les instants foulés au pied,
Quand l’Unité nationale est scandée en toute occasion , à chaque ‘’ Ifthar ’’comme une cantique, sans en crever l’abcès , et que persiste cyniquement‘’l’unité du cavalier et de sa monture’’,
Quand la mère de famille chérit plus le fils qui rapporte de l’argent aux sources douteuses que le fils diplômé, mais hélas au chômage,
Quand le traditionnel respect dû aux personnes âgées, aux parents, aux aînés lentement s’évanouit,
Quand de pauvres patients des hôpitaux nationaux se voient cyniquement réorientés vers des cliniques privées de ceux-là mêmes qui les traitent , pourtant fonctionnaires de l’Etat -,
Quand une ‘’épaulette’’ intimide le citoyen lambda, et même porte la main sur un fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions, dans l’impunité totale,
Quand la jeunesse, se détourne des idéaux d’antan et se laisse porter par la frénésie de l’enrichissement à tout prix, tout de suite, le souci de nomination du compte en banque, de la villa, de la voiture,
Quand des plaintes ici ou là sont mises sous le coude parcequ’un puissant serait passé par là,
Quand l’élite arabo-berbère continue de garder le silence devant la voie dangereuse et sans issue, jusqu’ici empruntée, et que l’autre élite – la plus concernée – choisit de se coucher,
Quand la loi est considérée comme une contrainte inutile à contourner, sans valeur aucune, juste bonne pour les autres,
Quand cette loi et le Prince ne font qu’un, la loi c’est le Prince, le Prince la loi,
Quand l’Etat reste perçu comme une fiction , au mieux comme une vache à lait au service du clan, de la tribu,
Quand, en toute impunité, chaque portion de l’espace public est squattée, transformée en boutique, en mosquée pour piéger ou capturer, en prédateurs, la manne du Golfe,
Quand des cours de l’Ecole publique sont bâclés, voire séchés au profit d’une course à toute vitesse vers les Ecoles privées, ou que des infirmiers refusent des gardes nocturnes au détriment des malades pour ces mêmes cliniques,
Quand la détention préventive devient parfois plus longue que celle des condamnés eux- mêmes,
Quand l’Administration tombe en déliquescence, que chacun porte sous le bras son dossier d’une administration à l’autre , ou le gage aux démarcheurs,
Quand pour le moindre droit auprès de cette Administration le bakchich semble devenu de règle,
Quand on crache sur les murs de l’hôpital et que l’on s’étale sur le perron devant la salle de consultation sans remontrances aucune,
Quand des ordures partout jonchent les rues , les coins des maisons, que des fosses septiques à ciel ouvert empestent l’air,
Quand des détenus de droit commun encombrent les prisons alors que les villes ploient sous les déchets,
Quand la circulation routière, des plus anarchiques, en rajoute par des infractions à deux vitesses de caractère sexiste,
Quand les mendiants envahissent les rues et se plantent au beau milieu de la chaussée en toute liberté,
Quand des malades mentaux, armés de gourdin, se dressent menaçants sur la chaussée, comme pour forcer l’ aumône des conducteurs,
Quand, sans scrupules, on brûle le feu rouge, ou passe un taxi au coffre ouvert chargé de passagers sous l’oeil indifférent de jeunes agents qui dévisent à l’ombre des arbres,
Quand Nouakchott envahie par des hordes de chiens errant, d’ânes, de chèvres et de vaches devient la norme,
Quand partout, enfin, règne la chienlit, le désordre total qui ne semble plus géner personne,
Quand personne ne se sent ni indisposé ni concerné , personne ne se sent fautif, que seul l’Etat –providence-est tenu pour responsable,
Quand………
Où donc allons-nous pardi ?
Il ne sera manifestement pas aisé de redresser cette Mauritanie profondément en crise qui a perdu ses repères, à moins que Dieu nous dote d’un homme d’Etat, un vrai; des « épaulettes » ? surtout pas !
La lutte continue !
Samba Thiam
Nouakchott 18 –Juin- 2016.
Source : Flamnet