Mauritanie : encore une enfant noire, cible d’esclavage

Le 30 mai, de présumés esclavagistes sont déférés au tribunal régional de Aleg, chef-lieu de la région du Brakna, par le procureur Cheikh Baye Seyid Didi ; le magistrat a entendu toutes les parties, avant de les inculper, au grief d’une infraction à la loi 2020-017 du 06 août 2020, portant prévention et répression de la traite des personnes et protection des victimes ; les éléments liminaires parviennent ensuite au juge d’instruction, avec des mandats de dépôts à l’encontre de tous les prévenus. Ce dernier, après avoir écouté l’ensemble des protagonistes de l’affaire, décide d’écrouer Chekroud Ahmed Boibou et son serviteur, Mahmoud  Leije, le père de l’enfant assujetti ; Ensuite, il met, sous contrôle judiciaire, Vatimettou Khattat et Aïchetou Bilal Samba ; la dernière est poursuivie, au motif d’abandon de progéniture mineure.

 

1. Les maîtres traditionnels, d’ascendance arabe, sont Chekroud  Ahmed Boibou, notable de la tribu de Oulad Abdallah âgé de 47 ans, membre de la fraction Iralene et son épouse et cousine Vatimettou  Khattat dite Foiti, de 4 ans sa cadette.

 

2. Le camp des esclaves présumés, subsahariens de naissance, compte Mahmoud Eije 40 ans, Aïchetou  Bilal Samba 35 ans et Folla Mahmoud, 10 ans.

 

A. Genèse

Le Comité des droits humains de l’Initiative de résurgence abolitionniste en Mauritanie (Ira-M) reçoit des informations concordantes sur un cas traditionnel d’exploitation de l’homme par l’homme, dans la localité de Dar El Barka, au Brakna, à environ 300 kilomètres de Nouakchott, la capitale. L’enquête de l’association conclut à la confirmation des faits alléguées. Aussitôt, une délégation que dirige le président Abdallahi Abou Diop, en compagnie de Zeine Mohamed Abdallahi Abdel Aziz, Elhadj Elid, Sidi Mohamed, Oumar Cheikh, Abderrahmane  Saleh, Moussa  Bilal Biram et Hadrami  Deymani, atteint les lieux, le 22 mai. Le lendemain, à 9 heures du matin, ils arrivent au commissariat de police, en vue de déposer une plainte écrite, auprès du commissaire Kassem Maham Boubou. Dans un premier temps, la victime et le couple suspecté de pratiques illicites furent convoqués, avant d’isoler le père et la mère de la susdite. Une semaine durant, la famille biologique de l’enfant et celle des auteurs d’abus demeurent en détention. Le géniteur de la fille reconnaît l’avoir « louée» aux anciens maîtres. Folla et sa maman seront relâchées. La mère prétend que le placement de son rejeton a été réalisé contre sa volonté.

 

B. Contexte

Or, Mahmoud  Leije et ses aïeuls naissaient esclaves de Chekroud  Ahmed Boibou et des siens et ce, en vertu de la supériorité raciale qui caractérise l’espace et l’identité en Mauritanie, depuis des siècles ; tous les habitants de la localité de Dar El Barka témoignent du lien immémorial et de sa pérennité. Malgré la proximité de l’école, Vatimetou Khattat n’acceptait que la petite servante allât s’y inscrire, comme ses propres filles, d’ailleurs plus âgées : la maîtresse avait besoin de faire travailler Folla.

Les chefs d’inculpation retenus – traite de personne – démontrent l’insouciance débonnaire de la justice, devant une violation aussi limpide des normes internes et des engagements du pays envers ses partenaires. Pourtant, quelles que soient les circonstances, tensions et intimidations, Ira-M ne renoncera à la lutte multidimensionnelle pour l’émancipation de l’humanité noire en République islamique de Mauritanie.

 

Nouakchott, le 2 juin 2022

La commission de communication